Hossein Tallal a fini par rejoindre sa mère, Chaïbia. Celui qui avait pendant tant d’années vécu volontairement à l’ombre de sa mère, l’immense Chaïbia Tallal, a fini par tirer sa révérence. Il est décédé à l’âge de 80 ans dans son domicile à Casablanca, ce samedi 19 février dans la matinée. Dévoué à sa mère de son vivant et après sa mort, Hossein Tallal n’en était pas moins un très grand artiste peintre, très attaché à la peinture figurative.
Sa pratique de la peinture commence depuis ses années de formation à la ferronnerie, à l’école professionnelle de Casablanca. Il s’installe à Paris dans les années soixante où il peint et fréquente les cercles artistiques de l’époque, notamment le peintre marocain Ahmed Cherkaoui. Sa participation au Salon d’hiver de Marrakech en 1965 lui vaut le premier prix et sa première exposition individuelle a lieu, deux ans plus tard, à la galerie La Roue à Paris. Il participe, dès lors, à plusieurs expositions à travers le monde, en Espagne, au Danemark, aux États-Unis ou encore en Égypte.
Traversant diverses périodes créatives et usant aussi bien de la peinture que du dessin, Hossein Tallal puise dans des thématiques telles que la solitude, la mélancolie, ou le corps pour donner à voir des séries d’une puissance singulière, notamment les séries Cirque oublié et Portraits imaginaires. Sa peinture, d’une force troublante, oppose à l’environnement dépouillé qui entoure ses personnages, la puissance des couleurs qui les habillent. Œuvre de la nouvelle figuration, elle touche au fantastique pour se pencher sur des problématiques existentielles.
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Tallal aimait peindre les marginaux, les troubadours, les funambules. Il avait une vision romantique de l’art et considérait qu’un artiste, vrai, est un génie incompris et un peu maudit. Il se méfiait des intellectuels qui avaient collé l’étiquette de «naïf» à l’art à sa mère qu’il a toujours appelé par son prénom Chaïbia. Il aimait raconter cette repartie de sa mère à toute personne qui utilisait l’adjectif naïve à propos de sa peintre. «Naïve, ta mère», répliquait-elle. Il citait cette anecdote avec son grand rire franc et tonitruant. Ce rire franc manquera beaucoup aux personnes qui ont connu Hossein Tallal.
Hossein Tallal laisse derrière lui une œuvre très importante, atypique, vigoureuse. Il était aussi très doué en dessin et sa ligne serpentine accentuait le vertige de ses personnages marginaux. Hossein Tallal, c’est aussi la galerie Alif Ba, l’une des adresses historiques de Casablanca. La directrice de cette galerie, Rabia Aroussi, a servi avec dévouement autant l’essor de la carrière de Chaïbia que de son fils.
Avec le départ de Tallal, c’est une partie de Casablanca, de son panache qui s’en va. L’on pourra se consoler en se disant que l’on va au moins regarder les œuvres sans être troublés par la profonde sympathie pour leur auteur. Et ces œuvres sont suffisamment vigoureuses pour porter le nom Hossein Tallal très haut et très loin.