L'éclairage de Adnan Debbarh. Un surcroît de réactivité

Adnan Debbarh.

Adnan Debbarh. . khalil Essalak / Le360

ChroniqueDemander un surcroît de réactivité à un gouvernement qui termine l’année sur un bilan globalement positif peut sembler relever du jugement sévère. Cela serait le cas si le monde ne connaissait pas du fait de la pandémie de Covid-19 des bouleversements rapides et continus.

Le 03/01/2022 à 12h34

Si hier le Royaume avait d’emblée affiché ses ambitions: être dans le groupe des pays qui va sortir par le haut de cette pandémie, c’est ce qu’il est en train de réaliser, pour être en mesure d’affronter les changements qu’elle allait charrier, il gagnerait aujourd’hui encore plus à accélérer les démarches pour devenir un pays producteur de vaccins et à procéder à un réajustement de notre politique industrielle.

Le nouveau variant Omicron oblige à généraliser la troisième dose de vaccin à toute la population adulte et à envisager la vaccination des enfants à partir de 5 ans, ce qui nécessite la disponibilité de doses en quantités. Par ailleurs, l’apparition de nouveaux variants nous oblige à prendre en compte l’éventualité que l’humanité va connaître dorénavant des campagnes de vaccination en continu. 

Le Maroc, bien qu’il dispose, selon les informations disponibles, de suffisamment de doses pour subvenir aux besoins de la population, devrait veiller à obtenir rapidement les homologations nécessaires pour l’entrée en production localement des vaccins. Deux raisons le dictent: sécuriser nos futurs approvisionnements, ce qui est capital, et acquérir le statut très convoité, en termes d’image, et intéressant diplomatiquement, de pays producteur/exportateur de vaccins. Il n’est pas fortuit que des pays comme l’Afrique du Sud et l’Egypte multiplient les efforts pour se positionner sur ce créneau. Inutile de rappeler que la demande mondiale explose.

Le monde connaît aussi, suite à la crise causée par la Covid-19, l’accélération d’un vaste mouvement de relocalisations, à partir de l’Asie, des unités de production industrielles vers leur pays d’origine ou faisant partie de la même région, et une réorientation des commandes de produits manufacturés privilégiant la proximité. Ce n’est pas un phénomène qui est né avec la crise du Covid-19, celle-ci en a été l’accélérateur.

L’hyper-mondialisation de la fragmentation des chaînes de valeur connaît un essoufflement depuis une dizaine d’années. Les avancées de la quatrième révolution industrielle (4.0) englobant l’intelligence artificielle, la robotisation, l’impression 3D et les plateformes digitales, ont fortement réduit la compétitivité des territoires lointains (Chine, Inde) surtout quand il s’agit de produits lourds, chers à transporter (ex: automobile).

Plusieurs secteurs sont candidats à relocalisation, soit pour des raisons financières, écologiques ou de sécurité d’approvisionnement: santé, agroalimentaire, électronique, intrants essentiels à l’industrie, les télécoms 5 G; soit pour des raisons de proximité des consommateurs: prêt-à-porter, cuir.

Le Maroc, qui a fourni beaucoup d’efforts ces deux dernières décennies pour améliorer l’attractivité de ses territoires, augmenter la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique, multiplier les centres de formation, créer de nouveaux écosystèmes, ne doit pas laisser passer l’opportunité de s’inscrire dans cette nouvelle dynamique de relocalisation industrielle post-Covid-19.

La mise en place d’une nouvelle politique industrielle 4.0, qui mobiliserait les moyens humains et financiers nécessaires dans des délais acceptables, rendra notre pays plus attractif. Rappelons que le Nouveau Modèle de Développement, tout en priorisant l’Etat social, n’a pas manqué de mettre en valeur le rôle dévolu à l’Etat stratège.

Les responsables publics et les organisations professionnelles, bien sûr au niveau des déclarations, s’accordent sur le diagnostic, à savoir la nécessité d’opter pour ces nouveaux choix technologiques. Reste à passer à l’acte.

Ainsi, le gain en crédibilité et en image engrangé par le Maroc pour sa gestion réussie de la crise Covid-19, sous la conduite du Roi Mohammed VI, sera capitalisé pour attirer les investisseurs nationaux et étrangers en quête de territoires proches et intelligents, équipés pour accueillir leurs unités nouvelles ou relocalisées d’Asie. Rassurés aussi quant à la capacité de l’Etat marocain à gérer les crises majeures.

Reste au gouvernement à transformer l’essai, en accélérant la cadence et en faisant preuve de plus de réactivité.

Par Adnan Debbarh
Le 03/01/2022 à 12h34