Peut-on aujourd’hui se contenter, que ce soit dans l’enseignement ou dans la vie quotidienne, d’une seule langue? Le monde ne cesse d’être secoué par le temps qui, grâce aux nouvelles technologies, est devenu plus riche et divers. La communication court plus vite que la lumière et tout débat sur le bilinguisme ou le multilinguisme devient obsolète. Il est certain que les enfants d’aujourd’hui ont besoin d’apprendre le plus de langues possibles, car il en va de leur culture et de leur chance dans la compétition qui les attend dès qu’ils entrent dans la vie active.
Soyons clairs! Il est évident que les élèves marocains doivent absolument maîtriser parfaitement la langue arabe, classique, non seulement parce que c’est la langue de notre civilisation, mais parce qu’elle est très belle, certes complexe, mais d’une richesse extraordinaire. (Je le sais pour avoir traduit au français des poèmes de Mahmoud Darwich et d’Adonis). Elle doit être la langue première et fondamentale. Surtout pas de darija, une langue parlée qui a ses qualités, mais qui en aucun cas ne peut se substituer à la langue du Coran. Langue utilitaire, populaire et parfois poétique, la darija doit rester à son niveau en tant qu’outil de communication.
Une fois la langue arabe classique acquise, il faut se tourner vers les langues qui comptent aujourd’hui dans le monde. L’anglais vient en premier. Partout dans le monde l’anglais, même et surtout pauvre et squelettique, s’impose. Ne pas parler l’anglais, vous isole et met un frein à votre ambition et projets. C’est ainsi, et on n’y pourra rien. Ensuite vient l’espagnol qui lui aussi s’impose de plus en plus. Quant au français, il ne cesse de se voir supplanter par l’anglais. Les Français n’ont pas su défendre leur langue, laquelle est parlée par des populations de pays anciennement sous colonisation ou protectorat français. La sphère francophone est plus ample que l’espace de l’Hexagone. Cette langue est mieux défendue par les non Français que par les Français eux-mêmes.
Au Maroc, cette langue continue d’être privilégiée, aussi bien par les responsables que par une partie de la population. On passe dans la même phrase de l’arabe au français, ce qui fait que nous sommes en train d’inventer une troisième langue, le franco-marocain pour ne pas dire l’arabo-français massacré!
Qu’importe, c’est une réalité linguistique qui est plus forte que notre propre volonté ou désir.
Nous avons intérêt à avoir une vision de l’avenir plus ouverte et plus prospective : nos enfants ont besoin d’être multilingues. Les frontières culturelles sont en train de tomber. La recherche scientifique se fait principalement en anglais. Si vous voulez publier les résultats d’une recherche en médecine ou en physique nucléaire, c’est en anglais et uniquement en anglais que vous pourrez le faire. On peut le déplorer mais le monde a été vite sous la coupe anglo-saxonne. Il en est de même pour les écrivains non anglo-saxons qui publient en anglais. Leur public est automatiquement plus important que celui des écrivains francophones. En outre, il faut attendre et espérer être traduit en anglais pour intéresser des éditeurs japonais, nordiques ou latino-américains.Telle est la réalité. On ne peut pas la changer ni l’ignorer.
Reste que la superbe langue arabe ne cesse d’être bafouée à cause des crises à répétions dans ce monde arabe déchiré, meurtri par des dictatures et des guerres qui englobent, hélas, la culture et la civilisation qui ont tant donné au monde.
Arrêtons de nous lamenter et mettons nous au travail! Apprenons à nos enfants l’arabe classique, ainsi que les autres langues qui comptent dans le monde! Ne perdons pas de temps dans des débats inutiles!