Famille Ben Jelloun

ChroniqueLe conflit israélo-palestinien n’est pas fini. Ce n’est pas parce que la presse occidentale dans sa majorité n’en parle pas qu’il n’existe plus. L’assassinat de cette journaliste a rappelé, pour ceux qui l’auraient oublié, que la guerre se poursuit dans ces territoires meurtris et disputés depuis 1948.

Le 16/05/2022 à 10h58

L’assassinat, le 11 mai dernier, de la journaliste palestinienne de la chaîne Al Jazeera, nous rappelle qu’Israël occupe des territoires qui ne lui appartiennent pas. Ainsi, l’armée israélienne, dans une intervention dans un camp de réfugiés palestiniens en Cisjordanie, a vraisemblablement tiré sur Shireen Abu Akleh, journaliste très connue et appréciée pour son travail de reporter sur le terrain.

L’émotion est là. Une enquête, nous dit un responsable israélien, est en cours pour déterminer la façon exacte dont le drame s’est passé.

Les Accords d’Abraham, qui ont rétabli les relations entre l’Etat d’Israël et notre pays, ne doivent pas nous empêcher de réagir quand un tel drame se produit et nous émeut.

«La lune de miel» actuelle entre les deux pays a fait que les choses ont pris une vitesse anormale. Il ne faut pas oublier que le nouvel allié et ami du Maroc est un Etat, condamné par plusieurs résolutions des Nations-Unies, résolutions qu’il piétine avec arrogance.

Dernièrement, l’armée de Tsahal a délogé des familles palestiniennes d’un village où elles habitaient depuis plusieurs décennies pour y installer des familles juives et planter sur une colline le drapeau à l’étoile de David. La presse a peu parlé de cette agression, laquelle a été autorisée par la Cour de justice d’Israël contre le droit et la justice.

Les récentes manifestations de Palestiniens autour de la mosquée d’Al Qods ont été réprimées violemment.

Le conflit israélo-palestinien n’est pas fini. Ce n’est pas parce que la presse occidentale dans sa majorité n’en parle pas qu’il n’existe plus.

Il faut dire que la division des Palestiniens et la politique du Hamas, lequel est aidé par l’Iran qui espère installer à Gaza un nouveau Hezbollah, laisse à Israël le terrain libre pour poursuivre en tout impunité les implantations coloniales dans les territoires occupés.

Officiellement le Maroc n’a rien changé dans sa politique de soutien à la cause palestinienne. Le fait que le Souverain préside le Comité Al-Qods est primordial.

Mais Israël, avec ses conquêtes diplomatiques rendues possibles grâce à la volonté américaine, n’a rien changé dans sa politique d’occupation, n’a fait aucune concession. Au contraire, il a accentué l’installation de nouvelles colonies. On a pensé qu’avec la chute de Netanyahu, le nouveau gouvernement s’engagerait dans un assouplissement de sa politique dans les colonies. Rien.

Nous sommes tous pour la paix. Les citoyens marocains, dans leur écrasante majorité, ont plutôt bien accueilli les Accords d’Abraham. Des bras ont été ouverts pour les touristes israéliens ainsi que pour les hommes politiques et hommes d’affaires qui ont afflué dans le Royaume.

L’assassinat de cette journaliste a rappelé, pour ceux qui l’auraient oublié, que la guerre se poursuit dans ces territoires meurtris et disputés depuis 1948. Cependant l’enterrement de Shireen a été l’occasion de démonstration de ferveur et de colère.

L’histoire nous enseigne que jamais un peuple occupé ne le reste éternellement. Tôt ou tard la justice sera faite au peuple palestinien dont plusieurs générations de jeunes ont grandi dans des camps et avec les privations à cause de l’embargo imposé sur la bande de Gaza depuis plusieurs années.

L’histoire de la Palestine n’est pas figée. Israël devrait le comprendre et composer avec un peuple qui ne demande qu’à vivre en paix. Israël devrait aussi ne pas embarrasser ses amis dans le monde arabe. Les meilleures garanties pour la sécurité d’Israël sont des relations diplomatiques normales avec les pays arabes, y compris avec un Etat palestinien, dont l’avènement est rendu quasiment impossible par la politique des colonies.

Par Tahar Ben Jelloun
Le 16/05/2022 à 10h58