Ceux qui veulent nous dépecer et ceux qui nous prennent pour des ânes

Fouad Laroui.

Fouad Laroui.. KF Corporate

ChroniqueIl serait temps que certains députés du Parlement européen et certains journalistes du même continent en prennent bonne note et qu’ils cessent de vouloir nous démembrer comme Saint Côme ou de nous prendre pour des ânes comme Marion.

Le 25/08/2021 à 11h02

J’ai lu avant-hier dans le Journal de Matthieu Galey, publié par Robert Laffont dans la collection ‘Bouquins’, une drôle de note en date du 28 Octobre 1964 (page 281): «ce matin, la voisine vient proposer à Marion d’engager un domestique marocain. Marion, tentée, hésite et demande, du ton le plus naturel: “Oui, mais tout de même, cela doit coûter cher. Avec quoi le nourris-tu?“»

En lisant cette dernière phrase, j’ai complété mentalement: «… avec du son, de l’avoine ou de l’orge?»

C’est peut-être ce à quoi pensait Marion. Avec quoi nourrit-on ce drôle d’animal?

Il y a quelques années, je contemplais à Florence une toile de Fra Angelico qui représente Saint Côme, patron des chirurgiens, et son frère Damien, en pleine action: ils sont en train de greffer la jambe d’un ‘Maure’ à un sacristain qui a perdu la sienne. Comment les deux hommes se sont-ils procuré la jambe du Marocain? La légende ne le dit pas. Était-il mort ou vivant, était-il consentant? Ou bien s’était-on approprié son corps?

Dans le premier cas, le Marocain (que va embaucher Marion) est mis au rang d’une bête de somme qu’il faut nourrir pour s’assurer de ses services. Dans le second cas, celui des chirurgiens, il est réduit à un corps dans lequel on peut se servir –une jambe par-ci, un rein par-là.

Heureusement que les temps ont changé…

Mercredi dernier, je regardais sur BBC2 un reportage sur la construction de la centrale nucléaire hyper-moderne Hinkley Point C en Angleterre. Pour nourrir les milliers d’ingénieurs, de techniciens et d’ouvriers, une escouade de cuisiniers prépare chaque jour des repas. Ce jour-là, le chef cuisinier annonce fièrement à l'équipe de télévision:

– Aujourd’hui, c’est très spécial: je cuisine marocain!

Et de plonger avec enthousiasme une grande écuelle de bois dans un immense chaudron, de goûter le truc et de brailler en direction de ses aides:

– Eh oh, un peu plus de cumin, les gars!

Résumé: il y a mille ans, Saint Côme dépeçait le corps d’un Marocain; il y a un demi-siècle, Marion nourrissait son Marocain comme un âne; aujourd’hui, un maître-queux anglais s’extasie devant la gastronomie marocaine.

Y'a pas à dire, les gars, on a fait des progrès dans la façon dont on nous traite.

Il serait temps que certains députés du Parlement européen et certains journalistes du même continent en prennent bonne note et qu’ils cessent de vouloir nous démembrer comme Saint Côme ou de nous prendre pour des ânes comme Marion.

On les invitera alors à partager un bon tajine, sans rancune.

Par Fouad Laroui
Le 25/08/2021 à 11h02

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VOS RÉACTIONS

Chapeau bas Monsieur LAROUI Votre Talent, et votre finesse d’esprit, votre style et votre pertinence témoignent bien du grand intellectuel que vous êtes J’adore vous lire

Vous pouvez encore entendre, aujourd'hui,en France, dans certains milieux bobo bourge branché start uppe, des femmes, et oui, françaises, solidaires jeunes et libérées, qui parlent de "leur"femmes de menage marocaines comme en parlaient leur arrière grand mère ou grands mères. Le colonialisme se traduit aussi par des mots.. et il est inscrit presque génétiquement dans certaine classes françaises, voir européenne. Vous avez du boulot les gars mais je suis confiante.j aime le Maroc !

Bjr professeur.Une fois de plus vous parlez d'or car la fibre patriotique qui est en vous est très forte.Si on a bien lu votre billet,on doit tout de suite commencer à travailler et même très fort pour nous imposer sur l'échiquier mondial.Il y a beaucoup de Marocains de par le monde dont le pays est fier,mais ce n'est pas encore suffisant.Il faut donc travailler d'arrache-pied pour se hisser et se mettre au même niveau que certains pays nouvellement très développés.Merci pour vos conseils et salutations de Mohammedia.

Merci Mr laroui

No Comment..!!!!

PATRIOTE ! C'est un honneur de vous lire. merci.

Le respect que l'on reçoit ne se commande pas, il s'impose naturellement par nos propres actes ! Faisons de grandes choses, soyons géniaux, et les autres nous respecteront naturellement ! La gastronomie que vous citez en est un parfait exemple. Je citerais,juste â titre d'exemple des pays commele Japon, la Corée du sud, Israël,..etc.

Incisif comme d'habitude.. Merci pour les rires et le bonheur que vous ne procurez en vous lisant.

C'est bien autour d'un bon plat que les affaires se traitent. Surtout chez les personnes raffinées.

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