Après une croissance qui a transformé sa carte économique, l’émergence latino-américaine bascule. En pleine débâcle financière, les regards se sont tournés vers ce merveilleux sous-continent, omettant l’interdépendance globale. La cherté des matières premières a entraîné des difficultés réelles pour les pays exportateurs. Les pays latino-américains ont succombé à la crise qui est aussi le signe de l’avènement d’un nouvel ordre géopolitique régional.
Il est possible que les Panama Papers et leurs conséquences, ne soient que le début de la fin du rôle de ce petit paradis artificiel. Son canal subit la réduction des flux commerciaux et une concurrence féroce. L´investisseur chinois Wang Jing veut construire un canal alternatif au Nicaragua. De plus, après sa réintégration dans la carte du libéralisme, le Cuba post-castriste va retrouver son rôle avant la révolution.
Le Venezuela de Maduro est aveuglé par sa pulsion totalitaire qui risque de conduire le bolivarisme à sa fin. Si les Vénézuéliens n’arrivent pas à mettre la cohésion du pays au-dessus des clans, l´avenir ne leur augure rien de bon. Le taux de pauvreté a dépassé les 35% et a crise du bolivarisme étend ses ombres un peu partout en Amérique latine.
L´Argentine a été récupérée par la droite. Cependant le péronisme usera toutes ses cartes pour affaiblir la gouvernance.
Au Brésil, Dilma Rousseff, victime de la récession, a dû revoir à la baisse les programmes sociaux qu’elle avait promis de défendre. Elle a affronté par ailleurs une droite fondamentaliste extrêmement nostalgique. Certains députés sont allés jusqu’à pactiser avec d’anciens militaires de la dictature.
En Équateur, des manifestations réclament le départ de Rafael Correa, qui avait sû insuffler l´espoir dans le cœur d’une population assoiffée de justice sociale. Encore une fois, le retour des conservateurs est imminent.
Au Pérou, le cas de Keiko Fujimori est révélateur de la maturité et des fondements politiques des pays latino-américains. 40% des Péruviens défendent la fille d´un dictateur qui est toujours derrière les barreaux, à ce jour. Son adversaire, Pablo Kuczynski, largement plébiscité par le prix Nobel Vargas Llosa, a soutenu Keiko en 2011. Ce paradoxe génère une grande méfiance entre les électeurs.
Les pays qui s´en sortent malgré des difficultés plus ou moins complexes sont le Chili, le Mexique et la Colombie. Cette dernière a pu maintenir dans la continuité une ligne d’action économique et politique, malgré les violences. Son point faible reste la réconciliation nationale, qui ne peut être que politique. Beaucoup de Colombiens n’adhèrent pas à cette solution. La violence structurelle a laissé des traces indélébiles.
Surfant sur la crise, comme il l'a toujours fait, le Mexique veut se positionner dans la géopolitique globale. Le discours du président Peña Nieto a dénoncé il y a quelques jours à l’Assemblée générale des Nations Unies, le trafic de drogue, de la mort et de la violence dans les pays producteurs ou de transit. Il a ajouté que dans un monde globalisé, les drogues sont aussi une affaire globale, devant impliquer toutes les nations pour apporter des solutions globales.
Le discours de Peña Nieto rappelle le débat initié par un leader politique marocain que d’autres acteurs veulent enterrer, usant d’arguments moraux et religieux. Les opposants à ce débat ne voient pas encore les vraies visées locales et géopolitiques de la question du trafic des drogues, dans une région où 53% de la population tire des revenus de cette culture. Comme le Mexique, le Maroc est un pays producteur de cannabis. Il est aussi une terre de transit d´autres drogues, mais aussi de substances et d’idées tout aussi terrifiantes.