Une loi contre le harcèlement... parce que c'était légal?

Bassima El Hakkaoui, ministre de la Famille. 

Bassima El Hakkaoui, ministre de la Famille.  . DR

Le projet de loi sur la violence à l'égard des femmes sera, ce jeudi, au menu du conseil de gouvernement. Si certains ont applaudi des deux mains ce texte, d’autres sont restés quelque peu circonspects.

Le 06/11/2013 à 15h42

Certains ont applaudi des deux mains, d’autres sont restés quelque peu circonspects. Le projet de loi contre le harcèlement n’a, quoi qu’il en soit, laissé personne indifférent. Mais il y a en effet, après s’être surpris à applaudir des deux mains, de quoi se poser des questions. Car, tout d’abord, le "harcèlement" est devenu là un concept extensible à l’infini. Tout y est : le harcèlement tel qu’on pouvait se le représenter jusqu’à présent (il va falloir changer notre représentation de la chose) dans le milieu professionnel, par exemple.

Sur le plan privé, cafouillage total : ça semble aller, ce qui est en train d’affoler tous les marocains, du "pssst la gazelle" dans la rue qui, une fois justiciable et amendable, va leur rendre la rue beaucoup moins sympathique (à part ça, ils n’ont d’ailleurs pas l’air au courant ou, alors, ils sont en train de s’en donner à cœur joie avant l’adoption de la loi, il faudrait voir à clarifier ça, tant qu’on y est) à, ce qui en affole d’autres pour d’autres raisons moins triviales, la violence conjugale, en passant par les photos et vidéos à caractère sexuel sur le net etc, et ça saute allègrement du coq à l’âne avec une prestance déconcertante.

Les questions qui fâchent

Et là, nous cessons d’applaudir des deux mains pour poser la question qui fâche, ou les questions, plutôt, qui nous taraudent depuis : tout d’abord, la violence conjugale, donc, n’était pas punissable ? La nouvelle loi spécifie que seront désormais justiciables les coups et blessures contre une femme enceinte : c’était légal, jusqu’à présent ? Et elle sera adoptée quand, la loi ? Parce qu’il s’agirait quand même de ne pas traîner car, maintenant que les fous furieux ont confirmation qu’ils pouvaient jusqu’ici y aller aussi allègrement qu'impunément, ça risque d’être un peu plus compliqué à gérer que les "pssst" compulsifs qui électrisent les trottoirs. Tout aussi délirant : seront aussi désormais punissables les violences faites aux femmes devant des enfants ou parents. C’était légal ? Et quand les violences se font sans témoins ? Légal ? Bon, nous n’avons pas fini de nous poser des questions. On nage en plein marasme intellectuel et moral.

Par Bouthaina Azami
Le 06/11/2013 à 15h42