Les hôpitaux publics de Meknès font face à une crise sanitaire d’une ampleur inédite. En cause, indique le quotidien Al Akhbar dans son édition du vendredi 6 juin: une pénurie alarmante d’anesthésistes-réanimateurs, qui paralyse presque totalement l’activité chirurgicale et affecte gravement les services de soins. Ce dysfonctionnement majeur met en péril la prise en charge des patients dans une ville de plus d’un million d’habitants.
À l’hôpital Mohammed V, tout comme à Moulay Ismaïl et Sidi Saïd, il n’est pas rare que l’ensemble des opérations repose sur un seul médecin anesthésiste, lit-on. Une situation intenable, surtout face à l’afflux constant de patients nécessitant des interventions urgentes. Le problème s’aggrave d’année en année, notamment avec les départs à la retraite non remplacés, laissant les établissements publics exsangues.
Selon les chiffres recueillis, le nombre de médecins anesthésistes en poste à Meknès est passé de 196 avant la pandémie de Covid-19 à seulement 28 à 32 actuellement. Cette chute vertigineuse a entraîné un quasi-arrêt des blocs opératoires, notamment dans des spécialités vitales comme l’ophtalmologie, l’ORL ou la chirurgie maxillo-faciale. Les autorités ont tenté de colmater les brèches en recrutant ponctuellement des médecins via une association locale, en partenariat avec le conseil préfectoral. Mais ces mesures transitoires s’apparentent davantage à des rustines qu’à de réelles solutions.
Les syndicats et les professionnels de santé dénoncent une gestion défaillante du capital humain et la fuite continue des compétences vers le secteur privé, plus attractif tant sur le plan salarial que sur les conditions de travail. Ils appellent à une réaction rapide et concrète du ministère de la Santé pour endiguer l’hémorragie.
Face à l’ampleur de la crise, le député Zakaria Ben Ounas a saisi le ministre de la Santé par une question écrite, réclamant des mesures urgentes pour pallier cette pénurie qui impacte directement la programmation des interventions et la gestion des urgences médicales, relève Al Akhbar.
Les données disponibles illustrent l’ampleur du déséquilibre. À Meknès, un seul anesthésiste couvre en moyenne 23 spécialités chirurgicales. Un chiffre alarmant, alors que la chirurgie sans réanimation efficace augmente considérablement les risques de complications post-opératoires, voire de décès.
Le fonctionnement des blocs opératoires est désormais au ralenti. Les opérations urgentes ne dépassent pas 658 par an, soit moins de deux par jour, et les interventions programmées stagnent autour de 1.212 par an, soit à peine trois par jour. Des chiffres qui traduisent un grave dysfonctionnement du système hospitalier et confirment que de nombreux patients sont contraints de reporter leurs soins ou de se tourner vers d’autres structures, parfois privées.