Interview. Faouzi Annajah, créateur marocain du HUV NamX, premier véhicule doté de capsules amovibles d’hydrogène vert

DiaporamaA 29 ans, Faouzi Annajah s’est imposé dans l’univers automobile à l’échelle mondiale en créant un véhicule à nul autre pareil, équipé d’un stockage amovible en hydrogène vert qui offre de très nombreux avantages dans le segment des véhicules alimentés aux énergies renouvelables.

Le 25/05/2022 à 12h33

Faouzi Annajah, créateur du HUV NamX, le premier véhicule à capsules amovibles d'hydrogène vert. . DR

Passionné pour l’univers automobile où son père a travaillé pendant plus de trente ans, Faouzi Annajah y est entré d’une autre manière, en repensant ce monde mécanique à la lumière de l’environnement et des énergies renouvelables. A peine âgé de 29 ans, il bouscule les codes de ce secteur en créant sa propre marque automobile. Un pari fou qu’il est parvenu à relever, malgré le scepticisme des uns et des autres.

Aujourd’hui, le rêve est devenu réalité, et à Turin le 11 mai, le jeune entrepreneur a dévoilé le prototype d’une nouvelle gamme de voitures lors d’une première mondiale très suivie. Son concept? Un HUV (Hydrogen Utility vehicule), dont les codes esthétiques sont ceux du SUV (Sport Utility Vehicule) et qui répond au nom de NamX, acronyme de new automotive and mobility exploration. Et pour le jeune entrepreneur, c’est précisément l’exploration qui dicte principalement sa démarche, raison pour laquelle «la lettre X revient partout sur le design du véhicule».

Mais au-delà de la question environnementale de son projet, Fouazi Annajah, qui a grandi en France dans le Val d’Oise et dont la famille est originaire de Marrakech, poursuit une ambition, celle d’inscrire le Maroc et l’Afrique au cœur de son projet. Interview.

Quelles sont les spécificités du HUV NamX ?C’est un véhicule premium du segment SUV taille L. C’est donc un grand SUV coupé, qui mesure 4,90 mètres de long, 2 mètres de large et 1,60 mètre de haut. Sa version haut de gamme, qui s’appelle GTH, compte 550 chevaux. C’est un véhicule puissant, qui a vocation à s’inscrire sur le marché premium, aux côtés des meilleurs au niveau mondial, en terme de performance, de qualité intérieure et extérieure.

Quel est l’intérêt présenté par l’hydrogène pour le secteur automobile d’un point de vue énergétique?Tout d’abord, le principal intérêt est de pouvoir faire en sorte que l’hydrogène avec lequel est alimenté le véhicule soit vert, c’est-à-dire qu’il provient des énergies renouvelables.Il y a ainsi une question cruciale que tout le monde doit se poser, qu’on roule avec une batterie électrique ou avec une voiture à hydrogène: d’où provient la source d’énergie de ce véhicule? Est-ce d’une usine à charbon? D’une centrale nucléaire? D’énergies renouvelables? Ainsi, grâce à l’hydrogène vert, à cette technologie-là, on peut disposer d’une énergie qui est réellement propre, conduite du puits à la roue, c'est-à-dire que sur l’ensemble de l’utilisation de la voiture, on est le plus propre possible. Voilà pour le contexte de l’aspect énergétique.

Quels sont les avantages de ce véhicule en comparaison aux voitures électriques?S’agissant de l’aspect du véhicule, l’avantage principal de ce HUV sur le segment des SUV électriques, c’est son temps de recharge. Aujourd’hui, grâce à l’hydrogène, on a un temps de recharge qui se situe entre trois et quatre minutes pour une autonomie de 800 kilomètres.

C’est loin d’être négligeable, car dans le cas des véhicules électriques à batterie il faut compter dans le meilleur des cas quinze minutes pour charger une batterie électrique. Pour peu que quatre ou cinq véhicules attendent leur tour devant vous pour recharger et qu’il n’y a pas assez de batteries ou de points relais, l’attente peut durer jusqu’à une heure voire plus.

L’avantage certain de ce HUV c’est donc son temps de recharge. Ensuite, le deuxième avantage par rapport aux véhicules à batteries électriques, c’est l’autonomie. Aujourd’hui, sur un long trajet avec une prise au vent importante, l’autonomie de l’électrique est de 400 kilomètres. En effet, on ne recharge jamais à 100% les batteries de ces voitures car ça les abîme et parce que ça prend plus de temps, donc on recharge généralement à hauteur de 80%. En revanche, avec l’hydrogène, on dispose d’une autonomie, en fonction des versions, comprise entre 750 et 850 kilomètres. Ce sont des estimations réelles d’autonomie.

En terme d’expérience utilisateur, ce véhicule est tout aussi agréable à conduire qu’une voiture électrique. Très douce, très silencieuse tout en offrant de la puissance, à la différence près que la voiture hydrogène ne rejette que de l’eau à travers l’échappement situé en bas du véhicule. C’est dû à la résultante de la pile à combustible qui en mélangeant de l’hydrogène et de l’oxygène ne rejette que de l’eau.

Quels sont les inconvénients présentés par ce véhicule d’un nouveau genre?Il y a évidement l’aspect énergétique, car il y a des notions de rendement énergétique qui sont en train d’être améliorées entre la production d’hydrogène et le rendement de la pile à combustible sur le bilan global. Ensuite, le deuxième inconvénient concerne le réseau de distribution d’hydrogène, car comme vous le savez, aujourd’hui, il y a encore très peu de stations hydrogène. Elles sont en train d’être développées. En Europe, il y a beaucoup de plans qui sont annoncés pour avoir des stations en déploiement dans les prochaines années, mais on sait que ce challenge est uniquement une question de temps.

Quid du système de capsule à hydrogène que vous avez développé? En quoi cela diffère-t-il des véhicules alimentés à l’hydrogène déjà développés par Toyota ou Hyundai par exemple?Ce système de capsule est une solution supplémentaire, complémentaire, visant à rendre accessible plus facilement l’hydrogène à nos clients et aux futurs utilisateurs de cette technologie-là.

On sait que les stations hydrogène coûtent cher, avec un coût de l’ordre de plusieurs millions d’euros pour une station hydrogène avec le génie civil, mais avec le système que nous proposons, nous avons la possibilité de le rendre plus simple, plus accessible, à des coûts beaucoup moins élevés. Voilà pourquoi nous avons pensé à ce système-là. Nous avons travaillé de longues années avec des experts de l’ingénierie, de l’hydrogène, de tout ce qui est lié à l’homologation et à la sécurité.

Concrètement, comme se déroule l’acte de recharge de ces capsules?Il y a deux manières de recharger notre HUV: la manière classique via a une trappe à carburant qui permet de recharger le véhicule avec un pistolet à hydrogène dans une station classique, ce qui en Europe existe déjà depuis de nombreuses années et ensuite, il y a le système de capsules.

Nous sommes en train de développer tout un écosystème autour de l’accès à ces capsules et de leur intégration au véhicule. Tout ceci va être présenté, détaillé, illustré prochainement, au salon de l’automobile de Paris. Mais pour l’instant, certains sujets sont encore confidentiels… Un peu de patience. Ce dont vous pouvez être sûrs, c’est qu’on a pensé au client, à quelque chose d’extrêmement simple et d’accessible et sans contraintes supplémentaires. Pour résumer, le système des capsules s’apparentera à celui des consignes. 

Vous placez l’Afrique mais surtout le Maroc au cœur de votre projet avec l’annonce de l’implantation d’unités de fabrication dans ce pays. Pourquoi ce choix?Le Maroc, s’inscrit dans le futur avec une vision long-termiste, basée sur un plan hydrogène vert, avec plus de 8% du PIB annuel qui est investi dans cette énergie. Pour nous, naturellement, c’est quelque chose de très positif et le Maroc est un pays très important pour nous.

C’est aussi un pays qui est naturellement tourné vers l’automobile, avec aujourd’hui Renault et PSA qui y sont installés, et non sans raisons, car il y a l’expertise et des talents sur place. Il y a tout un écosystème qui y a été développé donc évidemment c’est un pays important et on expliquera bientôt comment NamX sera appliqué au niveau marocain.

Des annonces officielles seront faites prochainement concernant le lieu de production, les intervenants dans ce processus de production, la façon de faire mais aussi les différents pays impliqués … C’est clairement un projet qui reliera l’Europe et l’Afrique, et plus précisément le Maroc.

Concernant l’aspect marché, notre intérêt est d’avoir une industrie technologique forte en Afrique, liée avec le futur de la mobilité.

La technologie développée autour de ces capsules amovibles sera-t-elle à l’avenir adaptée à d’autres marques de constructeurs ou uniquement aux véhicules de NamX, si toutefois vous projetez de développer une ligne?C’est encore confidentiel. Ce que je peux vous dire, c’est que NamX n’est pas qu’un modèle. Nous commençons par un modèle et nous y allons étape par étape, avec une gamme qui est en train d’être designée. On ne s’arrêtera donc pas qu’au HUV coupé.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 25/05/2022 à 12h33