Ramadan Messaoud: "Pour les crimes du Polisario, on ne peut parler de prescription"

Le juge de l'Audience nationale espagnole, Santiago Pedraz, et le chef du Polisario, Brahim Ghali.

Le juge de l'Audience nationale espagnole, Santiago Pedraz, et le chef du Polisario, Brahim Ghali. . DR

Revue de presseKiosque360. Le président de l'Association sahraouie des droits de l'Homme, Messaoud Ramadan, souligne que les plaintes contre Brahim Ghali et ses acolytes sont imprescriptibles. L’association a, en outre, fait appel contre la décision du juge de classer l’affaire du tortionnaire polisarien.

Le 09/08/2021 à 20h14

Le président de l'Association sahraouie des droits de l'Homme Messaoud Ramadan souligne que, contrairement à ce que rapportent les médias du Polisario, le tortionnaire Brahim Ghali n’a pas été innocenté par la justice espagnole. Dans une longue interview accordée à notre confrère Al Massae, dans son édition du mardi 10 août, Ramadan évoque les suites des plaintes pour génocide déposées contre Brahim Ghali et ses acolytes, la complicité des responsables espagnols dans l’affaire Benbattouche et le témoignage accablant d’Ahmed Trouzi devant la justice espagnole. Le classement du dossier de Brahim Ghali, précise Ramadan, par le juge Santiago Pedraz, est une hérésie juridique quand on sait qu’il continue à instruire les dossiers de ses 27 coaccusés, dont 24 dirigeants polisariens et quatre officiers algériens.

Autant dire, ajoute-il, que cette décision a été prise pour éloigner Ghali de l’enquête qui concernait son entrée clandestine en Espagne. Encore faut-il préciser, ajoute-t-il, que dans cette affaire, la justice espagnole s’est basée sur une loi de 1973 alors qu’une autre loi promulguée en 1995 permet à la haute Cour espagnole de statuer sur ce dossier dans le cadre de la compétence universelle. De plus, poursuit le même intervenant, il faut savoir que le statut de cette juridiction ne lui permet pas de classer cette plainte puisque 80 des victimes sont nées au Sahara, alors sous colonisation espagnole, et sont donc par définition des citoyens espagnols.

L’activiste sahraoui souligne que les crimes contre l’humanité dont sont accusés Ghali et ses acolytes (disparitions, génocide, viols et torture) sont imprescriptibles par nature. Quand on parle de génocide, précise le président de l’association, on évoque l’extermination par le Polisario des minorités sahraouies originaires de l'ancienne colonie, de la Mauritanie et du Maroc. C’est pour cela que notre association réfute toute prescription en interjetant appel de cette décision tout en mettant en exergue les contradictions du tribunal, ajoute-t-il.

Le quotidien Al Massae rapporte que Ramadan souligne que l’enquête sur l’entrée clandestine de Benbattouch en Espagne est en fait un subterfuge destiné à lui éviter d’être poursuivi pour génocide. En effet, souligne-t-il, son entrée en catimini dans le royaume ibérique a été planifiée par plusieurs responsables espagnols qui ont tout fait pour qu’il quitte le territoire espagnol afin qu’il ne soit pas poursuivi par la justice. Pour preuve, ajoute-t-il, Mohamed Benbattouch est arrivé en Espagne malade et est revenu en Algérie malade, tard dans la nuit, directement après avoir été entendu par le juge.

D’ailleurs l’association sahraouie considère ce rapatriement en catastrophe de Brahim Ghali comme une fuite orchestrée par les responsables gouvernementaux espagnols. Ceci étant, ajoute Ramadan, l’opinion publique n’est pas dupe car, si le tortionnaire polisarien n’avait rien à se reprocher, il serait entré en Espagne comme tout le monde, via n’importe quel aéroport international espagnol. D’ailleurs, le témoignage d’Ahmed Trouji, qui a passé dix ans dans les geôles de Lahmada, a été des plus poignants, les traces de tortures étant encore visibles sur son corps.

Ce qui est étonnant, explique Ramadan, c’est qu’au lendemain de cette audience, le juge ait classé l’affaire de Brahim Ghali comme si la décision avait déjà été prise d’avance. Il faut rappeler, ajoute le même intervenant, que les plaintes pour enlèvements, tortures et génocide contre les dirigeants polisariens datent de 2008. Mais, explique-t-il, comme les accusés circulent avec des faux noms et qu’il est difficile de déterminer les lieux de leur présence en Europe, la justice espagnole n’a jamais pu statuer sur cette affaire. Ceci étant, ajoute Ramadan, il ne faut pas oublier les centaines de victimes qui sont mortes sous la torture ou ont été exécutées sommairement, sans que l’on sache où se trouvent leurs corps. D’ailleurs leurs familles demandent à l’Etat algérien d’assumer ces responsabilités dans ces crimes contre l’humanité qui se sont déroulés sur son territoire. Quant aux poursuites contre Brahim Ghali et ses acolytes, l’association sahraouie compte porter cette affaire devant une juridiction supérieure européenne si la justice espagnole ne les sanctionne pas, conclut Ramadan Messaoud.

Par Hassan Benadad
Le 09/08/2021 à 20h14