Après avoir constamment supplié le secrétaire général de l’ONU, par la voix même du président Abdelmadjid Tebboune, en vue de nommer le plus rapidement possible un émissaire onusien au Sahara, Alger exprime aujourd’hui ses complaintes au moment où certains profils sont annoncés pour occuper ce poste vacant depuis mai 2019.
«A quoi joue Antonio Guterres?», se demande le journal algérien El Watan, proche de l’armée, qui reproche ouvertement au chef de l’ONU d’avoir griffonné le nom de l’ancien Premier ministre roumain, Petre Roman, sur la short-list des potentiels candidats au poste d’envoyé spécial onusien au Sahara.
Et que reprochent les Algériens au candidat roumain? Rien moins que d’avoir «participé à de nombreuses reprises au Forum de Crans Montana» à Dakhla, ce qui prouverait, selon eux, son «alignement» sur la marocanité du Sahara. Une occasion de s’acharner sur Antonio Guterres, tantôt coupable de se «tromper de casting», tantôt de «fermer les yeux» volontairement sur l’amitié présumée entre Petre Roman et le Maroc, ou carrément de «donner un coup de pouce au Maroc».
En étant ainsi le premier à réagir aussi violemment à ce qui n’est encore qu’une proposition au poste d’émissaire onusien au Sahara, le régime algérien donne clairement la preuve que c’est bien lui qui entérine au final toutes les décisions du Polisario.
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Même le diplomate algérien, l’actuel Commissaire à la paix et à la sécurité de l'Union africaine, Smaïl Chergui, est appelé en renfort pour participer à ces tirs algériens nourris ciblant le SG de l’ONU.
Dans une longue interview à un autre journal algérien parue en début de semaine, et relayée par l’agence APS, Chergui, qui est toujours salarié du ministère algérien des Affaires étrangères en plus de son poste au sein de l’UA, déclare que Guterres aurait dû empêcher l’ouverture de consulats au Sahara marocain: «J’estime que le SG de l’ONU aurait dû saisir le conseiller juridique en vue d’émettre un avis juridique concernant l’ouverture de consulats et de représentations diplomatiques» au Sahara. Pourtant, Guterres a déjà clairement émis son avis sur cette question, en affirmant que ces ouvertures de consulats ne concernent en rien l’ONU, car, juridiquement, il s’agit de décisions relevant de la seule souveraineté des pays concernés.
Mais toute cette cabale prouve finalement que c’est la personne même d’Antonio Guterres qui dérange le plus Alger. «Depuis son élection au poste de secrétaire général de l’ONU, il ne s’est distingué par aucune initiative d’importance destinée à régler définitivement le conflit du Sahara occidental. Au contraire…, M. Guterres s’est employé à y maintenir le statu quo. C’est également durant son règne que des tentatives sournoises de changer les paramètres du conflit ont été enregistrées», écrit le journal algérien.
En réalité, les attaques algériennes contre le SG de l’ONU sont inconséquentes. Car depuis la reconnaissance par les Etats-Unis d’Amérique de la souveraineté du Royaume du Maroc sur le Sahara atlantique, l’agence de presse algérienne n’a eu de cesse que de se cramponner aux Nations Unies pour claironner que sa position sur le conflit du Sahara demeure inchangée. Dans un environnement international indifférent aux thèses de l’Algérie, l’ONU a constitué l’unique consolation au régime et à la presse du voisin de l’est.
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Isolé, avec un président malade et absent du pays depuis deux mois, le régime algérien n’a quasiment pas obtenu de marque de soutien, ni pour le rétablissement du trafic à El Guerguerat, ni contre la proclamation historique de Donald Trump.
Maintenant que le SG de l’ONU a trouvé une personne qui répond aux qualités requises pour jouer le rôle d’un envoyé au Sahara, le régime d’Alger n’est pas content du casting. Affolé et perdant toute retenue, il lâche la presse et un délinquant de la diplomatie contre le patron des Nations Unies.
La question qui se pose maintenant est celle-ci: après cet excès de rage du régime algérien, quelle conduite va-t-il dicter au Polisario? Opposer une fin de non-recevoir au candidat Petre Roman, au risque de retarder davantage, pendant des mois encore, la nomination d’un envoyé onusien au Sahara ou bien ne pas préjuger de ce profil et accepter de faire avancer le dossier pour une solution politique? Quelle que soit la réponse que va souffler Alger au Polisario, il faut ranger dans un tiroir la rengaine de «l’impatience» à voir Guterres nommer un envoyé au Sahara.
Tant qu’Alger et le Polisario ne prendront pas en considération la teneur des dernières résolutions du Conseil de sécurité qui appellent à une solution réaliste au conflit du Sahara, les candidats au poste d’envoyé personnel du SG de l’ONU au Sahara ne vont pas se bousculer au portillon. Ils savent très bien que seule une solution politique négociée, avec une large autonomie sous souveraineté marocaine, est l’unique option réaliste. La balle est dans le camp du tandem Algérie-Polisario obligé de jouer le jeu.