On sait déjà que l’actuel Parlement n’a produit, durant ses trois années d’exercice, que quelque 400 propositions de loi, dont plus de 96% ont été rejetées. Pour la seule année législative 2023-2024, une seule proposition de loi a été adoptée. Et cela contrairement aux projets de loi présentés par le gouvernement, qui passent le plus souvent comme une lettre à la poste.
Mais le cas du rejet de la proposition de loi, tel que relaté par le quotidien Al Akhbar dans sa livraison du mercredi 25 juin, interpelle. Car de deux choses l’une: ou bien les députés ignorent le contenu de la loi fondamentale du pays, ce qui est extrêmement grave, ou bien ils estiment qu’ils ne sont là que pour voter les projets présentés par le gouvernement et doivent donc rejeter toute proposition de loi qui émane des groupes parlementaires, surtout quand ces derniers sont issus de l’opposition.
Ainsi, lundi dernier, la majorité parlementaire menée par le RNI a voté contre une proposition de loi, présentée par le groupe du PJD et visant à assurer la conformité de la loi 9.97 formant Code électoral avec le texte de la Constitution, en ce qui concerne l’âge légal de l’éligibilité.
En effet, selon l’article 41 du Code électoral, pour être éligible, il faut être électeur et âgé de 21 ans révolus à la date du scrutin. Ce texte a déjà fait l’objet d’un vaste débat lors des élections générales, communales, régionales et législatives du 18 septembre 2021, débat qui est allé jusqu’aux prétoires des tribunaux administratifs, saisis par de nombreux plaignants qui estiment que ce texte est non seulement anticonstitutionnel, mais écarte et viole les droits d’une importante frange de la population.
Selon le député du PJD, Abdessamad Haikar, qui a présenté cette proposition de loi, le Code électoral viole l’article 30 de la Constitution qui dispose que «sont électeurs et éligibles tous les citoyennes et les citoyens majeurs jouissant de leurs droits civils et politiques. La loi prévoit des dispositions de nature à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives». Or, le Code de la famille a fixé, selon les termes de son article 209, la majorité légale à 18 ans révolus, avec jouissance de tous les droits civils et politiques.
Haikar a également cité plusieurs lois d’application qui se réfèrent à la majorité légale, comme le texte organisant le Parlement ou celui relatif à l’élection des conseils communaux, qui posent comme condition la majorité légale pour participer au vote ou pour être élu.
Al Akhbar solde ce semblant de contradictions entre l’âge de la majorité légale et celui de l’éligibilité en rapportant que, en 2021, un tribunal administratif a expliqué que la Constitution marocaine n’avait pas fixé avec précision l’âge légal pour être éligible et électeur. Cette omission a ainsi laissé à chaque texte d’application la latitude de fixer l’âge de la majorité légale.