Gros pavé dans la mare! On le doit au Secrétaire général de l’ONU en personne, Antonio Guterres. C’était il y a une dizaine de jours à peine, précisément le 23 juin, dans le grand amphithéâtre de «Sciences po» Paris, il séjournait alors dans la capitale française où il avait participé au «Sommet sur le climat pour un pacte financier mondial». Il a fait état durant une heure du tableau des questions internationales actuelles -suivi d’un débat. Et à cet égard, il n’a pas manqué de répondre à une étudiante sur le Sahara marocain. Il aurait pu s’en tenir à une lecture conventionnelle, «diplomatique», dira-t-on -saisine du Conseil de sécurité, mission de son envoyé personnel, résolutions de la haute instance onusienne, appel aux parties à s’engager dans la recherche d’un processus de règlement, etc. Il est allé plus loin en faisant part de son analyse et de ses convictions. Il a parlé pratiquement «cash».
Premier cadrage: ce n’est pas l′ONU qui bloque toute solution de recherche et de mise en œuvre du règlement mais d’autres acteurs: «Ce problème est bloqué par ceux qui bloquent». C’est dit, clair et net: qui? Evidemment l′Algérie et partant le mouvement séparatiste. Il a aussi fait un retour en arrière pour rappeler l’histoire. Et celle-ci dit quoi? Que «le Sahara a été décolonisé en 1975 sur la base d’un accord tripartite entre l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie»; que le «Polisario» n’avait alors aucune existence et qu’il a été créé de toutes pièces à cette date par le président algérien Boumédiène et le «guide» libyen Kadhafi. Tout cela est connu depuis toujours mais relève du déni du côté d’Alger. Les généraux de ce pays, hier comme aujourd’hui, s’obstinent et s’emploient à mettre en avant une entité fantoche baptisée «RASD» depuis février 1976. Une fiction qui ne réunit aucun des attributs attribués et requis par le droit international à un Etat: quel territoire? Quel pouvoir effectif? Quelle population? Il n’y a pas de peuple sahraoui mais des populations en grande majorité dans les provinces méridionales récupérées et une minorité qualifiée de «réfugiés» dans les camps de Tindouf. Combien sont-ils? Quelque 40.000 personnes au plus et pas 180.000 comme le soutient la propagande d’Alger. Seuls 10% d’entre elles environ sont d’origine sahraouie - des enquêtes et des rapports notamment d’ONG espagnoles peu suspectes de bienveillance à l’endroit du Maroc qui avancent ces chiffres; le reste est formé de ressortissants d’origine diverse (Tchad, Mali, Niger…)
Cela dit, le chef de l’exécutif onusien n’a pas esquivé le problème de l’organisation d’un référendum. Il avait été effectivement prévu par la Résolution 690 du Conseil de sécurité en date du 29 avril 1991 et la création de la MINURSO chargée de préparer un référendum et du respect du cessez-le-feu instauré cinq mois plus tard le 6 septembre. Or, cette consultation n’a pas pu se tenir faute d’un accord sur l’identification des électeurs sahraouis, le mouvement séparatiste gonflant ses listes d’autres pour s’assurer un corps électoral favorable. Face à cette situation, le Conseil de sécurité n’a pas eu d’autre choix que d’abandonner cette voie devenue «inapplicable». Il s’en suit que la mission de la MINURSO s’est de ce fait limitée au respect du cessez-le-feu. Le 20 novembre 2020, le «Polisario» a annoncé qu’il le dénonçait et qu’il allait s’engager dans l’option militaire. Depuis, il multiplie les communiqués d’opérations militaires dans les «territoires libérés» -on se demande bien lesquels. Il en est aujourd’hui au 712e communiqué de «victoires». Il faut rappeler que c’est à la suite de ce qui s’est passé au poste-frontière de Guergarate avec la Mauritanie deux semaines auparavant que le Maroc a mis fin à une occupation par des bandes armées de ce lieu. Rabat, avec le soutien de l’ONU, a pris des mesures visant la liberté de circulation des personnes et des biens avec la Mauritanie. Une sécurisation et une normalisation du trafic civil et commercial.
La presse d’Alger a multiplié les critiques à propos des déclarations d’Antonio Guterres faites à Paris. Elle dénonce ce qu’elle appelle une «volte-face» en ces termes: «Le Secrétaire général de l′ONU maîtrise-t-il le dossier de décolonisation du Sahara occidental, ou bien a-t-il rejoint la thèse de l’occupant marocain?» Insultant. Et grossier. S’il y a bien une personnalité internationale qui connaît la question nationale, c’est lui. Député, Secrétaire général du PPS, Premier ministre (1995-2001), Haut Commissaire des Nations unies pour les Réfugiés (UNHCR) de 2005 à 2015. Secrétaire général de l’ONU depuis janvier 2017, il a la haute main sur les grands dossiers internationaux et en particulier sur tous les paramètres relatifs au Sahara marocain. Il sait où sont les responsabilités des parties: celles en particulier de l’Algérie opposée à une «solution juste, durable et mutuellement acceptable» conformément aux résolutions du Conseil de sécurité depuis 2018 (2440, 2468, 2494, 2548, 2602 et 2654); au processus des tables rondes; sans parler de son refus du recensement des réfugiés; et au soutien de la mission de Staffan de Mistura‚ envoyé personnel qui ne peut faire une visite dans la région- et à Alger. Tout est là: clap de fin pour l’Algérie!