L’Algérie et la question du Sahara marocain

Bernard Lugan.

ChroniqueÀ travers son soutien au Polisario, l’Algérie tente en réalité à la fois de s’ouvrir un débouché sur l’océan Atlantique, et d’empêcher le Maroc de redevenir une puissance océanique et saharienne.

Le 14/05/2024 à 11h07

Pourquoi l’Algérie arme-t-elle et finance-t-elle le Polisario? Pourquoi entretient-elle sa diplomatie dans les pays qui reconnaissent encore la RASD? Pourquoi tente-t-elle de bloquer la solution marocaine d’autonomie? Quels sont ses buts?

La réponse est claire: enclavée dans la Méditerranée, l’Algérie a, à travers le Polisario et la fiction d’une RASD, directement repris le plan colonial qui avait jadis tenté de donner à l’Algérie française un accès à l’océan Atlantique en coupant le Maroc de ses provinces sahariennes.

Voilà pourquoi, depuis 1975, par un soutien militaire, politique, diplomatique et financier jamais démenti au Polisario, Alger bloque toutes les tentatives de règlement de la question du Sahara occidental n’allant pas dans le sens d’une indépendance du territoire.

Voilà pourquoi, depuis 1975, l’Algérie tente de faire croire à l’existence d’une cause sahraouie portée par un peuple distinct de celui du Maroc et revendiquant son indépendance rassemblée au sein du Front Polisario.

Voilà pourquoi, depuis 1975, l’Algérie écarte toute idée de compromis, rejetant sans discussion la proposition marocaine de large autonomie du Sahara occidental marocain. Un jusqu’au-boutisme qui la place dans une impasse diplomatique.

Voilà pourquoi, depuis 1975, contre une réalité clairement admise par l’ONU, l’Algérie ne cesse d’affirmer:

1- Qu’il s’agit d’un problème de décolonisation, alors que le 23 juin 2023, lors d’un colloque à l’Institut des sciences politiques de Paris, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, a déclaré que le Sahara occidental ayant été décolonisé en 1975, à la suite d’un accord tripartite entre l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie, la question ne relevait donc pas d’un processus de décolonisation.

2- Qu’elle n’est pas partie prenante dans la question du Sahara occidental, car il s’agirait d’un problème, non entre elle et le Maroc, mais entre le «peuple sahraoui» et le Maroc. Or, toujours selon M. Guterres, le blocage de la mise en œuvre de la solution à ce conflit ne relève pas du Maroc, qui a proposé une solution répondant aux intérêts de toutes les parties et soutenue par le Conseil de sécurité à travers toutes ses dernières résolutions.

3- Que la seule solution de règlement est le respect du plan de paix de l’ONU impliquant la tenue d’un référendum d’autodétermination du «peuple sahraoui», référendum jugé dépassé par l’ONU. À cet égard, il est d’ailleurs paradoxal de devoir constater qu’Alger parle de l’autodétermination des populations du Sahara marocain, sans jamais évoquer la consultation des populations de Tindouf, du Gourara, du Touat… régions historiquement marocaines et détachées du Maroc par la colonisation. Et pourquoi pas une autodétermination des Touareg et des Kabyles?

En définitive, la position de l’Algérie repose sur l’affirmation selon laquelle son soutien au Polisario et à la RASD se fait au nom du «Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes». Un discours de principe qui cache des objectifs à la fois d’ordre territorial et relevant de la lutte pour le leadership régional. À travers son soutien au Polisario, l’Algérie tente en réalité à la fois de s’ouvrir un débouché sur l’océan Atlantique, et d’empêcher le Maroc de redevenir une puissance océanique et saharienne.

Par Bernard Lugan
Le 14/05/2024 à 11h07