Une partie du corps des avocats au Maroc poursuit sa mobilisation contre le projet de loi régissant la profession, que le ministre de la Justice s’apprête à soumettre à l’adoption du gouvernement. Les professionnels du barreau estiment que ce texte remettrait en cause l’indépendance de la profession, notamment à travers de nouvelles dispositions encadrant la formation et l’exercice du métier.
Contacté par Le360, Me Omar Benjelloun, avocat au barreau de Rabat, déplore en premier lieu l’absence de concertation autour de ce projet. «Depuis deux ans, aucune instance représentative de la profession n’a été associée au processus d’élaboration du texte», affirme-t-il, dénonçant «le caractère strictement confidentiel ayant entouré les différentes étapes de sa préparation par le ministère de la Justice». Il appelle, dans ce sens, l’Exécutif à «revoir une copie largement contestée par la communauté des avocats».
Parmi les principaux griefs soulevés, Me Benjelloun évoque «une atteinte au principe d’autonomie de la profession». «Les avocats sont particulièrement attachés à l’indépendance de leur corps vis-à-vis des autres institutions, notamment du ministère de la Justice. Or, le projet ne garantit pas cette exigence fondamentale», estime-t-il.
La question de la formation des futurs avocats constitue un autre point de discorde. «Actuellement, les examens d’accès et la formation pratique sont placés sous la supervision des barreaux et des cabinets. Le projet introduit des restrictions et transfère une partie de ces prérogatives», explique-t-il, estimant que ces dispositions pourraient affaiblir le rôle formatif de la profession elle-même.
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Le dispositif disciplinaire proposé par le texte fait également l’objet de vives réserves. Selon Me Benjelloun, «les litiges opposant avocats et justiciables sont aujourd’hui examinés en première instance par les conseils des barreaux avant toute saisine des juridictions compétentes. Le projet prévoit un transfert partiel de ces attributions vers l’Exécutif», une évolution jugée contraire aux principes déontologiques et à l’autorégulation professionnelle.
Membre du bureau exécutif de l’Association des barreaux du Maroc, Me Benjelloun indique par ailleurs qu’une demande de convocation d’une session extraordinaire de l’Association a été déposée. «Le quorum légal des signatures requises a été atteint», affirme-t-il, précisant que cette réunion devrait permettre d’harmoniser les positions et d’élargir la démarche de concertation interne.
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Il convient de rappeler que le corps des avocats n’en est pas à sa première mobilisation. En novembre 2024, la profession avait déjà mené un mouvement national de protestation — incluant une grève illimitée et un boycott des audiences — pour s’opposer à certains volets des réformes des Codes de procédure civile et pénale.








