Pour la première fois dans ce conflit, la Russie a déclaré hier, samedi 19 mars 2022, avoir utilisé en Ukraine un missile hypersonique, un type d'arme défiant tous les système de défense anti-aérienne, selon Moscou.
A Marioupol, ville stratégique dans le sud-est de l'Ukraine -bombardée depuis plusieurs semaines et souffrant d'une pénurie d'eau, de gaz et d'électricité- des familles ont raconté les cadavres gisant plusieurs jours dans les rues, la faim, la soif et le froid mordant des nuits passées dans des caves avec des températures inférieures à zéro.
Un groupe de 19 enfants, pour la plupart orphelins, y sont «en grand danger», bloqués dans un sanatorium, leurs tuteurs n'ayant pu les récupérer en raison des combats, ont affirmé samedi leurs proches et des témoins à l'AFP.
Infliger «une chose pareille à une ville paisible (...), c'est un acte de terreur dont on se souviendra même au siècle prochain», s'est indigné ce dimanche le président ukrainien Volodymyr Zelenski, dans un discours. Le siège de Marioupol «entrera dans l'histoire pour répondre de crimes de guerre», a-t-il déclaré.
Les bombardements ont aussi fortement endommagé l'usine sidérurgique et métallurgique Azovstal de Marioupol, cité portuaire et industrielle d'importance cruciale pour les exportations d'acier produits dans l'est du pays.
«Une des plus grandes usines métallurgiques d'Europe est détruite. Les pertes économiques pour l'Ukraine sont immenses», a affirmé la députée Lesia Vasylenko, qui a publié sur son compte Twitter une vidéo montrant d'épaisses colonnes de fumée s'élevant d'un complexe industriel. Un autre député, Serhiy Taruta, a écrit sur sa page Facebook que les forces russes, qui assiègent Marioupol, «ont pratiquement détruit l’usine».
«Catastrophe humanitaire absolue»Dans le nord du pays, le maire de Tchernihiv, Vladislav Atroshenko, a dépeint une «catastrophe humanitaire absolue» dans sa ville.
«Les tirs d'artillerie indiscriminés dans les quartiers résidentiels se poursuivent, des dizaines de civils sont tués, des enfants et des femmes», a-t-il raconté à la télévision. «Il n'y a pas d'électricité, de chauffage et d'eau, l'infrastructure de la ville est complètement détruite». Dans un hôpital bombardé, «les patients opérés gisent dans les couloirs par une température de 10 degrés», a-t-il affirmé.
Les frappes n'ont pas davantage cessé à Kiev, la capitale, à Mykolaïv (sud) et à Kharkiv, grande ville russophone du nord-ouest, où au moins 500 personnes ont été tuées depuis le début de la guerre, selon des chiffres officiels ukrainiens.
Dans l'ouest du pays, le ministère russe de la Défense a affirmé samedi avoir utilisé la veille des nouveaux missiles hypersoniques «Kinjal», vantés par Vladimir Poutine, pour détruire un entrepôt souterrain d'armements.
«L'Ukraine est malheureusement devenue un terrain d'essai pour tout l'arsenal russe de missiles», a déclaré au site Ukraïnska Pravda le porte-parole des forces aériennes ukrainiennes, Iouri Ignat.
Pour le ministère britannique de la Défense, la Russie «n'a pas réussi à prendre le contrôle de l'espace aérien et s'appuie largement sur des armes à distance lancées depuis la sécurité relative de l'espace aérien russe pour frapper des cibles en Ukraine», a-t-il analysé dans un communiqué.
Selon le ministère ukrainien de la Défense, les troupes russes, dont la progression sur le terrain a été beaucoup plus difficile que prévu face à la résistance acharnée des Ukrainiens, ont effectué 291 frappes de missiles et 1.403 raids aériens depuis le début de l’invasion le 24 février.
La Chine et la «bonne décision»Face à la poursuite des bombardements meurtriers et à des négociations qui s'éternisent -le quatrième round entre Kiev et Moscou s'est ouvert lundi- la présidence ukrainienne a exhorté Pékin à prendre position.
La Chine, allié stratégique de Moscou et membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, figue parmi les grands absents, avec l'Inde, du concert de condamnations et de sanctions qui s'est abattu sur la Russie.
«La Chine peut être un élément important du système de sécurité mondial si elle prend la bonne décision de soutenir la coalition des pays civilisés et de condamner la barbarie russe», a tweeté Mykhaïlo Podoliak, un conseiller de Volodymyr Zelensky et un des participants aux négociations avec la Russie.
Le président américain Joe Biden s'était entretenu vendredi avec son homologue chinois Xi Jinping, pour lui exposer «les conséquences si la Chine fournissait un soutien matériel à la Russie», selon la Maison Blanche.
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Mais Xi Jinping a maintenu l'ambiguïté, se bornant à souligner que les conflits militaires n'étaient «dans l'intérêt de personne», selon la télévision chinoise.
A New Delhi, c'est le Premier ministre japonais, Fumio Kishida, qui a exhorté l'Inde, gros acheteur d'armes et de pétrole russes, à sortir de sa réserve et à condamner l'invasion. Son homologue indien, Narendra Modi, s'est gardé de mentionner l'Ukraine, et la déclaration conjointe s'est bornée à un appel à «un arrêt immédiat de la violence».
Dans une liaison vidéo avec Berne, Volodymyr Zelensky a fustigé hier, samedi, les entreprises comme le groupe Nestlé qui poursuivent leurs activités en Russie. Il a appelé la Suisse à geler les actifs des milliardaires russes et des proches du Kremlin.
L'Australie, de son côté, a annoncé ce dimanche, dans un communiqué du gouvernement, un embargo sur ses exportations vers la Russie d'alumine et de minerai d'aluminium, «ce qui limitera sa capacité à produire de l’aluminium», un matériau stratégique pour l'industrie de l'armement notamment.
La Russie est dépendante à hauteur de 20% de l'Australie pour ses besoins en minerai d'aluminium, selon Canberra.
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Le président ukrainien a indiqué que 180.000 personnes avaient pu à ce jour fuir des zones de combat par des couloirs humanitaires.
«Mais les occupants continuent de bloquer l'aide humanitaire, tout particulièrement autour des zones sensibles. C'est une tactique très connue. (...) C'est un crime de guerre», a lancé hier, samedi, Volodymyr Zelensky.
Selon les autorités ukrainiennes, 6.623 personnes ont été évacuées par les couloirs humanitaires samedi, dont 4.128 fuyant Marioupol et 1.820 fuyant Kiev.
Depuis le 24 février, plus de 3,2 millions d'Ukrainiens ont pris les routes de l'exil, dont près des deux tiers vers la Pologne, parfois seulement une étape avant de continuer leur exode.
A Londres, le drapeau jaune et bleu de leur pays a flotté samedi soir à l'extérieur du London Coliseum, siège de l'English National Opera où des stars internationales du ballet ont offert un grand gala humanitaire pour l'Ukraine et envoyer un message de paix.