Rien ne va plus entre l’Inde et Amnesty International

Amnesty International ferme ses bureaux en Inde.

Amnesty International ferme ses bureaux en Inde. . DR

Amnesty International a fermé ses bureaux en Inde, en déclarant être victime d’une chasse aux sorcières menée par les autorités. Le gouvernement n’a pas tardé à réagir à ces accusations en rappelant à l’ONG quelques fondamentaux, valables en Inde, comme ailleurs.

Le 01/10/2020 à 11h27

Dans un communiqué de presse publié le 29 septembre sur son site, Amnesty International annonce suspendre ses travaux de défense des droits humains en Inde, «en raison de représailles du gouvernement indien». Ce que l’ONG qualifie de «représailles», c’est le gel complet de ses comptes bancaires, le 10 septembre dernier, par les autorités indiennes.

Amnesty victime de répression, un discours éculéSes comptes bancaires en Inde ayant été gelés, Amnesty International Inde n’a eu d’autre choix que de quitter le navire. Pour Julie Verhaar, secrétaire générale par intérim d'Amnesty International, «il s'agit d'un acte flagrant et honteux de la part du gouvernement indien, qui nous oblige à cesser pour l'instant le travail crucial d'Amnesty International Inde en faveur des droits humains». 

Parmi les «combats» menés par Amnesty en Inde, l’appel à «la responsabilité des actions des autorités pendant les émeutes de Delhi et au Jammu-et-Cachemire et leur travail sur la violence sexiste». 

Selon Amnesty, «ce travail extrêmement important de défense des victimes s'est heurté aux tactiques brutales avec lesquelles la société civile indienne est de plus en plus familière», reproche ainsi l’ONG aux autorités indiennes, accusées de vouloir faire taire «les voix critiques», «ceux qui recherchent la responsabilité et la justice», et de mener une «répression honteuse contre ceux qui se lèvent pour les droits humains des Indiens».

Usant comme à son habitude du champ lexical de l’oppression et de la victimisation, l’ONG dit être victime de «répression», de «harcèlement», allant jusqu’à comparer le gel de ses comptes bancaires au «gel de la dissidence».

Dénonçant un climat de «peur et de répression», Amnesty accuse également l’Inde de «traiter les organisations de défense des droits de l'homme comme des entreprises criminelles et des individus dissidents comme des criminels sans aucune preuve crédible».

Un discours que l’on connaît bien au Maroc, où Amnesty International utilise la même argumentation dans l’affaire du journaliste Omar Radi, en tentant d’influer sur le cours de la justice, en l’accusant d’être corrompue et à la solde des autorités.

Les droits humains, un alibi qui ne tient plus la routeRéagissant aux attaques d’Amnesty International, le ministère indien de l’Intérieur a rejeté en bloc les accusations de «chasse aux sorcières», les qualifiant d’exagérées et de très éloignées de la vérité.

Et pour cause, si Amnesty ne cesse de brandir la carte du respect des lois et de la Constitution, l’Inde, de son côté, accuse l’organisation de vouloir détourner l’attention d’activités qui enfreignaient clairement les lois indiennes et de tenter, en l’occurrence, d’influencer de manière tendancieuse le cours des enquêtes menées par les autorités indiennes sur des irrégularités constatées ces dernières années.

Par ailleurs, il a également été rappelé à Amnesty International que si celle-ci est libre de poursuivre son travail humanitaire en Inde, au même titre que les autres organisations, les lois indiennes n’autorisent pas l’ingérence dans les débats politiques nationaux par des entités financées par des dons étrangers.

Nul n’est censé ignorer la loi, pas même Amnesty Car ce dont il est question ici, c’est des sources de financement de l’ONG, qui tente de noyer le poisson en expliquant la fermeture de ses locaux en Inde par la répression qui sévit dans ce pays. Or, dans cette affaire, le sujet n’est pas la répression, mais une loi du pays, connue sous le sigle FCRA, relative à la réglementation des contributions étrangères.

Cette loi interdit l'acceptation et l'utilisation de contributions étrangères pour «toute activité préjudiciable à l'intérêt national» et permet au gouvernement de contrôler les organisations qui reçoivent des financements étrangers, de qui elles les reçoivent et dans quel but.

«Cette loi s’applique à tous et elle s’appliquera également à Amnesty International», n’a pas manqué de déclarer le ministère indien de l’Intérieur, soulignant par ailleurs que «malgré ses demandes répétées, Amnesty International s’est vu refuser l’approbation de la FCRA par les gouvernements successifs car, conformément à la loi, elle n’est pas éligible pour obtenir une telle approbation».

Et de reprocher à l’ONG, l’envoi par Amnesty UK d’importantes sommes d’argent à Amnesty India, sans l’approbation du ministère de l’Intérieur et en enfreignant la loi relative au FCRA. Pour les autorités indiennes, il s’agit «d’un détournement de fonds» sans compter, comme le rappelle le ministère de l’Intérieur, que «le non-respect par Amnesty International des réglementations locales ne l’autorise pas à faire des commentaires sur le caractère démocratique et pluriel de l’Inde».

Ce n’est pas la première fois que le jeu interlope d’Amnesty international est dénoncé par des Etats. Face à l’Inde, pays souvent qualifié de «la plus grande démocratie du monde», la crédibilité de cette ONG prend un coup supplémentaire, qui ne manquera pas d’encourager d’autres pays à dénoncer son agenda.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 01/10/2020 à 11h27