Le 28 avril à 12 h 33, une importante défaillance du système électrique européen a plongé la péninsule Ibérique dans le noir. Si le rétablissement du courant s’est fait progressivement jusqu’en soirée, certaines régions du Nord et du Sud de l’Espagne ont pu être réalimentées plus rapidement grâce au soutien de la France et du Maroc.
«Depuis Madrid, le chef du gouvernement espagnol, Pedro Sánchez, a salué l’assistance fournie par ces deux pays, dont les interconnexions ont permis de stabiliser le réseau électrique espagnol dans un moment critique», souligne le magazine Jeune Afrique.
Le rôle du Maroc, en particulier, s’est révélé déterminant. Grâce à ses deux câbles sous-marins reliant son réseau électrique à celui de l’Espagne via le détroit de Gibraltar, le Royaume a pu transférer jusqu’à 1.400 mégawatts (MW) en courant alternatif à très haute tension (400 kV). Ce 28 avril, l’interconnexion a été exploitée à son maximum. Près de 38% de la capacité de production marocaine a été mobilisée pour secourir les lignes espagnoles et relancer leurs centrales, un geste de solidarité technique remarquable.
«Paradoxalement, alors que le Maroc est habituellement importateur d’électricité, il a joué le rôle de fournisseur d’appoint en pleine crise énergétique», relève Jeune Afrique. Cette capacité à inverser les flux est le fruit d’une coopération technique étroite entre Rabat et Madrid, et d’une infrastructure interconnectée robuste. Contrairement aux idées reçues, cette interconnexion repose sur du courant alternatif (AC), comme en témoignent les installations de transformation à Tarifa (Espagne) et Ferdioua (Maroc).
Cité par le magazine, Amin Bennouna, expert marocain en énergie, explique que «le Maroc recevait de l’électricité d’Espagne au moment de la panne, mais l’impact a été nul sur le réseau marocain grâce à une stratégie proactive». Il évoque l’utilisation de générateurs à réponse rapide et de mécanismes de gestion de la demande, qui ont permis de préserver la stabilité du réseau national tout en apportant un appui concret à l’Espagne.
Ce soutien n’est pas un épisode isolé, mais s’inscrit dans une dynamique de renforcement durable. «Un troisième câble d’interconnexion est actuellement en projet, cofinancé par l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) et Red Eléctrica, pour un montant de 150 millions d’euros. Il devrait entrer en service d’ici 2026, portant à 2.100 MW la capacité d’échange entre les deux pays», précise Jeune Afrique.
Tandis que l’Espagne faisait face à une crise majeure, le Maroc, bien que légèrement touché par ricochet, est resté résilient. Les aéroports ont basculé en mode manuel, et des perturbations ont été enregistrées dans la connectivité d’Orange Maroc, liées à des serveurs basés en Espagne. La remise en service s’est faite progressivement grâce au rétablissement des échanges transfrontaliers, preuve d’une interdépendance désormais mature entre les deux rives du détroit.