La décision du Conseil de la concurrence d’ouvrir le marché des terminaux de paiement électronique (TPE) au Maroc marque un virage stratégique. Jusqu’ici dominé par le Centre Monétique Interbancaire (CMI), ce secteur s’apprête à accueillir de nouveaux acteurs: établissements de paiement, filiales bancaires et startups fintech, dans un contexte où la digitalisation des paiements devient une priorité nationale.
Dans un entretien avec Finances News Hebdo, Rachid El Fakir, expert en économie monétaire, affirme que cette évolution est porteuse d’opportunités multiples. «Le marché des TPE est une pierre angulaire dans l’édification d’un écosystème de paiements moderne. Sa libéralisation va non seulement stimuler l’innovation, mais aussi démocratiser l’accès à des services jusque-là réservés à une élite commerçante», souligne-t-il.
L’ouverture du marché, effective à partir du 1er mai 2025, devrait booster la qualité des services proposés et entraîner une baisse des coûts de transaction, au bénéfice des commerçants comme des consommateurs. Cette dynamique concurrentielle s’inscrit pleinement dans la stratégie de Bank Al-Maghrib pour réduire la circulation du cash et faire reculer l’économie informelle.
«L’intégration des petits commerçants au système de paiement électronique permettrait de réduire leur dépendance au cash. Cela favoriserait la transparence, améliorerait la bancarisation et contribuerait à l’assainissement des circuits économiques», explique El Fakir. Selon lui, cette réforme pourrait même jouer un rôle dans le renforcement de l’assiette fiscale et la réduction de l’endettement public.
Mais si la libéralisation promet un souffle nouveau, elle comporte également des risques. L’arrivée de multiples opérateurs nécessite une régulation renforcée. «Le régulateur devra faire face à des défis majeurs, notamment en matière de cybersécurité, de protection des données et de standardisation des technologies», avertit El Fakir.
Il insiste également sur la nécessité d’un accompagnement ciblé des commerçants. «Il est impératif de former les utilisateurs finaux aux outils numériques. L’inclusion numérique des petits commerçants est la condition sine qua non du succès de ce chantier».
Face à cette recomposition du marché, le CMI est appelé à se réinventer. Sa part de marché, aujourd’hui supérieure à 97%, devrait inévitablement baisser. Pour El Fakir, «l’avenir du CMI réside dans l’innovation, la cybersécurité et l’ouverture à l’international. Il doit devenir une plateforme technologique de référence, capable de collaborer avec les nouveaux acteurs et d’anticiper les besoins futurs de la monétique».