Cannabis légal. «Nous travaillons plus, la peur au ventre en moins» ou la nouvelle vie des producteurs agréés de la Beldia

Au cœur de la culture de la Beldia, dans les montagnes du Rif. (A.Et-Tahiry/Le360)

Le 20/07/2024 à 17h02, mis à jour le 20/07/2024 à 17h23

VidéoDepuis sa légalisation en 2023, la variété de cannabis appelée localement Beldia a le vent en poupe dans le Rif. À Issaguen, au cœur des montagnes, des agriculteurs nouvellement accrédités par l’Agence nationale de réglementation des activités du cannabis (ANRAC) se sont regroupés en coopératives.

Le360 s’est rendu à une coopérative dirigée par Abdellatif Adbid, un natif de la région, qui veut contribuer aux côtés de l’Agence nationale de réglementation des activités du cannabis (ANRAC) au développement socio-économique de la zone montagneuse. Une vingtaine d’agriculteurs, tous porteurs de la carte professionnelle délivrée par l’ANRC, ont intégré la structure agricole dite «Coopérative de production Beldia “Adbib Al Filahia”».

Cette coopérative est actuellement à la recherche d’un foncier pour pouvoir, dans un proche futur, y installer une unité de transformation des dérivés du cannabis. Les agriculteurs «sereins et joyeux» ont accueilli Le360 sous des applaudissements, en «remerciant le Souverain de leur avoir accordé la légalisation de la culture de la Beldia», une plante typiquement marocaine issue de la région de Ketama.

Dans ces montagnes, plusieurs femmes s’activent, dans les champs, à arracher du sol les plantes de sexe mâle. Le cannabis est en effet une espèce dioïque, dont les caractéristiques diffèrent entre pieds mâles et pieds femelles. Le THC aux effets thérapeutiques se concentre essentiellement dans les parties florales de la plante femelle. Ces plantes, dont le pollen a servi à la fertilisation de la plante femelle, sont coupées en cette période de l’année pour servir à d’autres fins.

«Nous sommes tous heureux maintenant de travailler en pleine légalité», ont scandé unanimement ces paysans dont certains ont même embrassé la plante ou accroché à leurs têtes des plants de cannabis. «Après la légalisation, nous travaillons maintenant nos terres la tête haute, sans avoir la peur au ventre comme cela se faisait auparavant», a affirmé El Haj Bejit Mohamed, un octogénaire qui dit que la culture de cette plante se transmet de «père en fils».

Un autre cultivateur, Farid Adbib, évoque la valeur ajoutée qu’a apportée le cannabis légalisé aux foyers de cette région aux terrains accidentés. «Nous sommes tranquilles, nous gagnons notre vie légalement grâce à une plante qui ne pousse que dans cette région accidentée», a-t-il souligné. Ce dernier a saisi l’occasion de notre présence pour tenir une séance de travail avec les membres de la coopérative. La réunion de concertation a eu lieu au domicile du père du président de la coopérative.

Abdellatif Adbib était entouré également de sa collaboratrice, la docteure Monika Brümmer, architecte d’origine allemande et experte en matière de cannabis. Monika Brümmer a construit un chalet quasi exclusivement avec des produits issus des dérivés du cannabis de la variété Beldia.

Selon les règlements de l’ANRAC, les récoltes du cannabis doivent être confiées à toute coopérative agréée avant leur «commercialisation sous le sceau de l’accord et du contrôle exclusif de l’agence». L’agence a été créée aux termes de la loi 13.21 relative aux usages licites du cannabis.

Cette agence publique est dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Elle assure la mise en œuvre de la stratégie de l’État dans le domaine de la culture, de la production, de la fabrication, de la transformation, de la commercialisation, de l’exportation du cannabis et de l’importation de ses produits à des fins médicales, pharmaceutiques et industrielles.

L’ANRC est chargée d’assurer la tenue de l’état des stocks du cannabis et de fournir à l’Organisme international compétent les évaluations et informations demandées en application des engagements internationaux du Royaume du Maroc, et ce, après concertation avec les différentes autorités gouvernementales compétentes.

Par Mohamed Chakir Alaoui et Abderrahim Et-Tahiry
Le 20/07/2024 à 17h02, mis à jour le 20/07/2024 à 17h23