Vidéo. Covid-19. Maguy Kakon: "Au Maroc, nous avons tout pour réussir"

adil gadrouz

Le 11/05/2020 à 14h09

VidéoDans cette entrevue avec Le360, l’écrivaine et militante politique et associative marocaine, Maguy Kakon, fait part de ses observations concernant la gestion de la crise dans le Royaume, souligne son impact socio-économique et dégage des pistes de réflexion pour construire le Maroc de demain.

Ecrivaine, militante politique et associative, Maguy Kakon, Marocaine de confession juive, se définit comme une femme de terrain.

Souvent qualifiée de "gardienne du phare" par ses amis (des sociologues, des hommes politiques, des historiens) à qui elle rapporte ses moindres observations, elle nous fait part aujourd’hui de sa réflexion concernant la gestion de la crise sanitaire, le confinement et le Maroc de l’après-Covid-19.

Gestion de la crise sanitaire au Maroc et confinement"Les dispositions qui ont été prises par notre souverain pour juguler cette crise sanitaire sont extraordinaires. Cette crise a été gérée de main de maître alors que ce n’est pas évident pour un pays comme le nôtre quand on voit les pays d’Europe et les Etats-Unis dévastés, et pour ça on nous jalouse", souligne Maguy Kakon.

Concernant le confinement, l’écrivaine le décrit comme étant une mi-temps des nations. En citant la philosophe allemande Hannah Arendt, qui, en arrivant aux Etats-Unis au siècle dernier, avait dit: "cette consommation va perdre le monde", Maguy Kakon déplore un monde parti dans une dégénérescence et une consommation effrénée.

"On rentre dans certaines restrictions, dans un ascétisme nécessaire. Il faut positiver ce confinement, je pense qu’il a fait beaucoup de bien à certaines familles qui se sont retrouvées, moi ça m’a permis de réfléchir et il y a beaucoup de choses à faire", explique-t-elle.

Les conséquences socio-economiquesEn ce qui concerne les conséquences socio-économiques de cette crise sanitaire, la militante associative les qualifie de dévastatrices. Nous sommes face à l’inconnu, et même le prix Nobel d’économie, Esther Duflo, a eu l’humilité de dire que ce cas de figure n’a jamais été posé.

Malheureusement ce sont les classes les plus démunies qui seront les plus touchées, déplore-t-elle, et elle regrette l’absence d’acteurs de la société civile qui compteraient parmi les membres du comité de veille économique.

Les observations de la femme politique, militante associative et femme de terrain.En tant que femme de terrain, Maguy Kakon a observé, dans les quartiers populaires de Casablanca, que la population respectait les règles établies et que les consignes étaient largement suivies.

"Notre peuple est capable d’écouter et de faire. Il faut qu’il soit entraîné par de vrais hommes politiques, pas par des politiciens. Aujourd’hui il faut faire de la vraie politique en étant utile au pays et c’est ce que je demande à notre gouvernance, de faire bien et d’aller au bout des choses", s’insurge la militante politique, en dénonçant le comportement de certains politiques séduits par les attributs d'une charge politique et l'attrait du paraître.

Selon elle, la relance économique du pays doit se faire par la relance des secteurs historiques et ancestraux du Royaume: l’industrie, l’agriculture, l’artisanat et l’ensemble des petits métiers en misant sur des formations professionnelles courtes, tout en encourageant les jeunes à rester dans leurs régions.

"Le Maroc n’a pas encore assez pris conscience de sa valeur. On nous a dépossédé de nos concepts et de nos valeurs, il faut qu’on se réapproprie des richesses que nous avons négligées", dénonce-t-elle, et d’affirmer: «nous avons tout pour réussir».

Maguy Kakon appelle aussi à s’affranchir du modèle occidental pour devenir une grande puissance africaine en prenant l’exemple de la Chine qui a pu, en moins d’un demi-siècle, devenir une des plus grandes puissances mondiales.

Le Maroc de demainLe Maroc de demain doit se réinventer et être axé sur de priorités majeures comme l’éducation, la santé et l’habitat salubre.

La scolarisation des enfants doit être la priorité absolue, et Maguy Kakon souligne l’importance d’enseigner l’histoire du Maroc aux enfants pour que la jeunesse prenne conscience de son identité, qu’elle apprenne à aimer son pays et qu’elle ait envie de se battre pour lui. Ce n’est que comme cela qu’on fera de bons citoyens, précise-t-elle.

Pour elle la diaspora marocaine, qu’elle soit juive ou musulmane, doit être mobilisée dans la construction du Maroc de demain. Cette jeune communauté de Marocain(e)s à l’étranger constitue une manne extraordinaire et nous devons lui redonner l’envie de croire en son pays.

"J’ai rencontré ces jeunes, aux Etats-Unis, en Europe, en Asie, et ils sont très compétents. Ils ont essayé de rentrer au Maroc, mais on leur a fermé les portes donc il faut changer cela et les impliquer dans ce renouveau. Je peux vous assurer que tous sans exception, adorent leur pays", explique Maguy Kakon.

Cette situation a montré qu’on peut faire confiance au peuple marocain, on est rangé derrière notre souverain, qui a toujours été capable de faire face à des tas de problèmes (terrorisme, politique internationale, crise sanitaire), il s’en est toujours sorti haut la main et en grand leader.

Il faut restaurer la confiance en notre pays et c’est la gouvernance qui permettra de la restaurer, affirme-t-elle. 

«Inchaallah, j’espère que tout ira bien pour nous et que tout le monde se porte bien», conclut avec optimisme Maguy Kakon.

En 2007, en conclusion de son livre, Mon Journal de campagne, retraçant sa campagne électorale lors des législatives de 2007, l’écrivaine faisait déjà le constat suivant. 

En créant le Maroc, Dieu a créé un chef-d’œuvre! Nous avons tout pour réussir à nous mettre à niveau: la situation géographique, notre civilisation, nos villes prestigieuses, un matériau humain de grande dimension, un peuple qui a du talent et de la résilience. L’aura du Maroc dérange, nos voisins nous jalousent, agacés par notre stabilité et notre ouverture sur le monde qui pourra nous propulser au rang de leader de l’Afrique. Main dans la main, unissons-nous, restons vigilants, soyons le bouclier, les gardes-barrières de nos institutions, de notre jeunesse. Je finis en paraphrasant Proust: Il sera très difficile de défigurer un chef-d’œuvre.

Par Mehdi Heurteloup et Adil Gadrouz
Le 11/05/2020 à 14h09