Par son apport scientifique et indépendant, la médecine légale contribue de manière essentielle au progrès judiciaire et aux garanties qui le caractérisent. Médecine des morts mais ô combien davantage médecine des vivants, elle n’a cessé, ces dernières décennies, de s’ouvrir à de nouvelles disciplines, tout en produisant de nouvelles données scientifiques précieuses.
Parmi les champs d’action de la médecine légale, tous les aspects médico-légaux liés à l'électrocution.
Les résultats d’un travail scientifique mené conjointement par les services de médecine légale des CHU de Tanger et de Marrakech, qui ont travaillé sur les cas d’électrocution autopsiés sur une période de trois ans (2013-2015) viennent d’être publiés dans le numéro de décembre 2021 de la Revue de médecine pratique.
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La majorité des électrocutions accidentelles surviennent en milieu professionnel (42,86%) et à domicile (35,71%).
La majorité des victimes avait un âge inférieur à 30 ans (57,14%) avec une légère prédominance masculine (57%). L’été est une saison favorable à plus d’électrocution (42,86%).
Les décès par accident électrique sont souvent accidentels, rarement suicidaires et exceptionnellement criminels. Les électrocutions accidentelles sont dues à une mauvaise manipulation des appareils électriques, une négligence ou une mauvaise maintenance des équipements électriques et du câblage.
Un autre champ d’action de la médecine légale est la détermination des aspects médico-légaux de la mort criminelle.
Dans un travail récent réalisé sur des rapports des autopsies complètes au Centre Hospitalier Préfectoral Al Ghassani à Fès a montré différents aspects liés au profil de la victime, les circonstances de survenue et la cause directe du décès.
Au total, 1485 autopsies médico-légales ont été effectuées pendant la période de l’étude, dont 78 étaient des décès suite à un acte criminel.
Cette étude révélé la prédominance des homicides auprès des victimes de sexe masculin, jeunes, vivant dans un milieu urbain et ayant des activités de toxicomanie. Le décès survient le plus souvent suite à l’utilisation d’un agent tranchant ou contondant. La victime succombe fréquemment dans les 24 heures suivant l’acte criminel suite à des blessures crâniennes ou thoraciques graves et mortelles.
La principale conclusion de l’étude est le fait que toute mesure préventive pour réduire le taux des homicides au Maroc devra cibler les jeunes adultes vivant dans un milieu urbain et ayant des traits de violence et de toxicomanie.
Autre volet de la médecine légale, la mort accidentelle. Il faut préciser que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime qu’environ 3,9 millions de décès dans le monde sont consécutifs à une mort accidentelle. 90% de ces décès surviennent dans les pays à faible revenu.
La récente étude marocaine publiée dans le numéro de décembre 2021 de la Revue de médecine pratique dresse les différents aspects épidémiologiques et médicolégaux de la mort accidentelle dans la région de Fès-Boulemane.
Cette région, située au centre-nord du Royaume, est considérée comme un carrefour entre l'est et le nord-est d’une part, et le sud-ouest du Maroc. Elle s’étend sur une superficie de 20.318 km², et comprend 15 communes urbaines et 48 communes rurales. Elle compte 1.808.295 habitants en 2015, soit 5,2% de la population totale du Royaume.
La compréhension des aspects médico-légaux de la mort accidentelle aidera à trouver des solutions pour réduire le nombre de ce type d'accidents.
Il s’agit d’une enquête épidémiologique rétrospective de décès suite à un fait accidentel.
Au total, 1980 autopsies médico-légales ont été accomplies pendant la période de l’étude, dont 550 étaient des décès suite à un accident (28%). La majorité des victimes était des femmes (82%). L’âge moyen des victimes était de 37 ans, avec des extrêmes allant de 1 à 105 ans.
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Les accidents de la circulation viennent en tête de liste avec 271 cas (49,3%). Le lieu de survenue de l’accident était urbain auprès de 52,2% des cas. Les trois premières causes de décès étaient les traumatismes crânio-cervicaux (40%), les polytraumatismes (24,2%) et les asphyxies suite à une noyade (13,1%).
Les trois premières causes de décès étaient respectivement les traumatismes crânio-cervicaux, les polytraumatismes et les asphyxies par noyade.
Le décès accidentel reste un problème de santé publique. Il faut renforcer les mesures préventives, sécuritaires et législatives pour réduire le nombre des accidents de la circulation, des noyades et des accidents du travail. Par ailleurs, l’éducation sanitaire est de plus le facteur clé pour diminuer le nombre des accidents parmi les enfants et les femmes.
*Le Dr Anwar Cherkaoui est médecin. Lauréat du cycle supérieur de l'Iscae, il a été, trente années durant, le responsable de la communication médicale du CHU Ibn Sina de Rabat.