Depuis plusieurs années, la gestion de la propreté à Fès est entachée de dysfonctionnements persistants. L’ex-délégataire Ozone, miné par des crises récurrentes et un net recul de la qualité du service, a cédé sa place à deux nouveaux opérateurs, Mecomar et SOS, désignés à l’issue d’un appel d’offres dont l’enveloppe dépasse les 220 millions de dirhams. L’arrivée de ces prestataires laissait espérer un nouveau départ pour une ville longtemps confrontée aux défaillances en matière de collecte et de traitement des déchets. Pourtant, plusieurs mois après la fin de la phase transitoire, l’amélioration promise peine à se concrétiser sur le terrain.
Des bacs à ordures délabrés, des rues jonchées de déchets
Malgré les annonces prometteuses, le terrain raconte une autre histoire. L’arrivée de véhicules flambant neufs équipés de GPS et les engagements affichés en matière de communication citoyenne n’ont, pour l’instant, que peu d’impact visible. Dans plusieurs quartiers, notamment en périphérie, les dysfonctionnements perdurent: conteneurs délabrés, déchets non collectés, mauvaises odeurs aggravées par la chaleur estivale… Le sentiment d’abandon reste tenace parmi les habitants, qui peinent à percevoir les bénéfices de ce changement de prestataires.
Des habitants interrogés par Le360 ne cachent pas leur exaspération. L’un d’eux témoigne: «Nous payons une taxe pour un service dont la qualité reste médiocre. J’ai signalé à plusieurs reprises la dégradation des bacs à ordures dans mon quartier, sans aucune réponse de la commune». D’autres dénoncent un décalage criant entre les promesses officielles et la réalité vécue, estimant que cette crise environnementale ternit l’image d’une ville qui s’apprête pourtant à accueillir des événements d’envergure.
Un élu interpelle: «Où sont passés les milliards?»
Ali Kassab, membre du conseil communal de Fès, reconnaît la gravité de la situation: «Le secteur de la propreté a longtemps souffert de dysfonctionnements structurels. L’arrivée des deux nouvelles entreprises, avec une augmentation du budget de la propreté qui est passé de 130 à près de 230 millions de dirhams, avait éveillé l’espoir d’un changement durable. Mais sur le terrain, nous sommes loin des engagements du cahier des charges».
Fès croule sous les ordures. (Y.Jaoual/Le360). le360
Il appelle à une application stricte des clauses contractuelles, y compris les sanctions financières en cas de défaillances: «Il ne suffit pas de changer de prestataires. Il faut une vraie rigueur dans le suivi et l’évaluation. Sinon, on risque de s’enliser dans un état de transition perpétuelle».
Un silence inquiétant des responsables
Contacté par Le360, le président du conseil communal de Fès n’a pas donné suite à nos sollicitations, en dépit de ses engagements passés à faire de la transparence l’un des fondements de sa nouvelle gouvernance.
En attendant, les ordures continuent de s’amonceler, l’espoir des habitants s’effrite, et la confiance dans les institutions locales s’érode. Pour une ville au patrimoine millénaire, qui aspire à un avenir moderne, le défi de la propreté reste, plus que jamais, une urgence civique et politique.