La question de l’égalité en matière d’héritage revient sur le devant de la scène. Plusieurs réflexions ont été menées simultanément par des acteurs de la société civile et des personnalités publiques issus d’horizons divers. Les partis politiques s’y mettent également. C’est le cas du PPS qui vient d’organiser un débat autour de la question de l’héritage par Ta’sib.
Revenant sur le déroulement de ce débat, le quotidien Al Ahdath Al Maghrebia s’est particulièrement arrêté, dans son édition du week-end des 25 et 26 mars, sur l’intervention de l’ancien détenu islamiste, Abdelwahab Rafiki. Aujourd’hui reconverti en «penseur» et chercheur dans le domaine des études islamiques, l’ancien cheikh salafiste n’a pas mâché ses mots. Il a appelé ouvertement à l’abrogation pure et simple de cette règle d’héritage, la considérant comme discriminatoire envers la femme. Cette règle désavantage aussi les veuves et les orphelines, empêchées de disposer de l’intégralité du patrimoine d’un père après sa mort.
Cette règle, rappelle le quotidien, oblige les héritières n’ayant pas de frère à partager leurs biens avec des parents masculins du défunt, même éloignés. Et ce sans aucune contrepartie ou contribution de leur part. Selon Rafiki, cette règle n’a aucun fondement religieux. Elle n’est nullement mentionnée, ni dans le Coran, ni dans le Hadith. Elle trouve son origine, selon lui, dans les pratiques sociales, aujourd’hui désuètes.
En effet, explique Abdelwahab Rafiki, si cette règle du Ta’sib trouvait auparavant sa justification dans la place centrale du chef de la tribu et du grand-père qui s’occupait de l’entretien de toute la famille, elle ne répond plus aux besoins de la famille moderne, réduite aux parents et à leurs enfants.
D’après l’ancien salafiste, cette évolution sociale permet aujourd’hui d’envisager d’en finir avec cette pratique. De par les changements sociologiques et culturels que notre société a connus au fil des dernières décennies, il est peu probable qu’elle s’oppose aujourd’hui à l’abrogation de cette règle. Les institutions religieuses ne s’opposeraient pas non plus à actionner le levier de l’Ijtihad pour en finir avec cette injustice sociale, estime l’intervenant cité par le quotidien. D’ailleurs, ajoute-t-il, le principe de l’Ijtihad est encouragé pour trancher sur des questions comme le Ta’sib, qui n’a aucun fondement dans le Coran.
Ainsi, pour lui, ceux qui avancent «qu’il n’y a pas de place pour l’Ijtihad en présence d’un texte» ne se fondent pas non plus sur un quelconque verset coranique pour étayer leur propos. C’est pour préserver leurs privilèges que certains «fokahas» défendent une telle position, a-t-il estimé. S’agissant du cas de Ta’sib, il faut l’abroger immédiatement, car, insiste-t-il, il ne se fonde sur aucun verset coranique. Il va même à l’encontre de la finalité de l’Islam. Abdelwahab Rafiki va plus loin, estimant qu’il est même possible de revoir le système législatif lié à l’héritage dans sa totalité.