Chaque fois qu’un responsable d’un pays ami du Maroc visite l’Algérie, la junte au pouvoir lance des intox liées à une médiation pour rétablir les relations diplomatiques entre Alger et Rabat. Les Algériens ont inventé plusieurs médiations: la saoudienne, la koweitienne, l’égyptienne et même l’américaine. La dernière pseudo-médiation en date est liée à la visite du roi de Jordanie Abdallah II bin Hussein en Algérie, les 3 et 4 décembre derniers. Le journal espagnol La Vanguardia cite une source algérienne qui évoque une médiation jordanienne, en vue de réactiver le Gazoduc Maghreb-Europe.
Certains médias se sont même emballés pour annoncer que la réouverture du gazoduc est une étape préliminaire au rétablissement des relations diplomatiques entre Alger et Rabat. Peu de temps après avoir lancé ce énième ballon d’essai lié à une médiation fictive, le régime algérien lance sa horde médiatique pour s’auto-démentir. Certains journaux évoquent une «désillusion» du Makhzen, d’autres parlent de «désinformation effrontée»…
Interrogée par Le360, une source marocaine bien informée dément toute tentative de médiation entre le Maroc et l’Algérie, que ce soit par le souverain hachémite ou les d’autres acteurs évoqués dans le passé. Cette source rappelle que «dans sa définition politique, une médiation ne s’exerce pas sans l’accord préalable des deux parties concernées». Et d’ajouter: «non seulement aucune initiative de ce genre n’a été adressée au Maroc, mais tous les pays partenaires du Royaume savent très bien que Rabat considère qu’il n’y a pas besoin d’un médiateur entre le Maroc et l’Algérie».
A ce sujet, le roi Mohammed VI n’a cessé de plaider pour un dialogue direct entre les deux pays voisins. Rien que pendant ces deux dernières années, le Souverain a interpellé directement les dirigeants algériens. En 2021, lors du discours du Trône, il a affirmé: «Nous renouvelons notre invitation sincère à nos frères en Algérie, pour œuvrer de concert et sans conditions à l’établissement de relations bilatérales fondées sur la confiance, le dialogue et le bon voisinage». Une année plus tard, à l’occasion, encore une fois, du discours marquant l’anniversaire de son accession au trône, le Souverain a tendu une nouvelle fois sa main à l’Algérie: «Nous aspirons à œuvrer avec la présidence algérienne pour que le Maroc et l'Algérie puissent travailler, main dans la main, à l'établissement de relations normales entre deux peuples frères».
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Les dirigeants de pays supposés jouer les médiateurs connaissent très bien la position du Maroc sur ce sujet. «Le problème est maroco-algérien et ne sera réglé qu’entre le Maroc et l’Algérie», précise notre source. Et d’insister que «le Maroc n’a jamais demandé une médiation avec l’Algérie et ne la cherche pas, parce qu’entre les deux pays, il s’agit davantage d’une question de volonté pour régler un problème qui est bien identifié que du besoin de bons offices d’autres pays pour se parler».
Voilà donc pour ces médiations à la pelle que le régime algérien invente. Il finit par croire en son propre mensonge et fait ensuite appel à des responsables comme le chef de la diplomatie, Ramtane Lamamra, ou sa meute médiatique pour les démentir.
Maintenant que l’on sait qu’il n’y a jamais eu de tentatives de médiation entre le Maroc et l’Algérie, il convient de chercher à comprendre les raisons qui poussent régulièrement la junte algérienne à remettre un sujet qui n’existe pas sur le tapis.
La junte a créé un problème et appelle de ses vœux son règlementQuand l’Algérie a rompu de façon unilatérale, en août 2021, ses relations diplomatiques avec le Maroc, elle pensait qu’elle avait provoqué un tremblement de terre dont les effets seraient désastreux sur le Royaume.
Le régime algérien imaginait que l’onde de choc du séisme de cette rupture allait parvenir jusqu’aux grandes puissances occidentales et tétaniser les pays influents dans le monde arabe. Le but recherché par le duo Chengriha-Tebboune était de dire que «l’Algérie nouvelle» a rompu avec la politique de Bouteflika et a remis au goût du jour le boumediénisme, basé sur les coups de menton et les postures hystériques.
Avec la fermeture du Gazoduc Maghreb-Europe et l’interdiction de l’espace aérien algérien aux avions marocains, les médias du régime ont prédit des nuits sombres dans les villes marocaines, des coûts supplémentaires insupportables à sa compagnie aérienne, un isolement total du Royaume en Afrique et dans le monde arabe. Ils se frottaient déjà les mains de voir le Maroc supplier ses partenaires pour mettre un terme aux sanctions que lui inflige l’Algérie.
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Or, non seulement les pronostics des caciques du régime se sont révélés faux, mais deux puissances en Europe, l’Allemagne et l’Espagne, ainsi que plusieurs autres pays européens, ont reconnu –après la rupture unilatérale décidée par Alger– la pertinence du plan d’autonomie, présenté par le Maroc, comme solution au conflit du Sahara.
La junte algérienne a joué à fond la carte d’Israël après le rétablissement des relations diplomatiques entre Rabat et Tel-Aviv, avec la certitude d’isoler le Maroc dans le monde arabe. La Coupe du monde au Qatar a montré à ce régime que le Maroc est la fierté des peuples arabes.
Le régime algérien pensait que la guerre fictive du Polisario allait s’inviter en permanence dans les débats à l’Union africaine et isoler le Maroc dans le continent. Il n’en a rien été.
En somme, le régime algérien pensait avoir sorti une carte gagnante, un game changer. La junte a constaté amèrement que rien n’a changé. Bien au contraire, la dynamique de soutien à la marocanité du Sahara n’a jamais été aussi forte que depuis cette rupture qui a généré des mesures contraignantes et exceptionnelles pour le régime algérien. En atteste le dernier Sommet de la Ligue arabe avec l’envoi d’un émissaire au Maroc, la réouverture de l’espace aérien, l’accueil de la délégation marocaine dans les réunions du sommet, l’obligation de faire des concessions sur la carte du Maroc et de présenter des excuses, etc. En somme, une série de contradictions douloureuses avec la fin assignée à cette rupture. Celui qui a vendu l’idée de la rupture aux généraux les a piégés.
Du côté du Maroc, la décision algérienne a apporté du réconfort et un précieux gain de temps. Un ancien diplomate confie pour Le360 que «depuis cette rupture, on n’est plus dans l’hypocrisie de convoquer l’ambassadeur pour protester. Le Maroc ne proteste plus! Et il s’épargne de la sorte une perte de temps inutile et des tracasseries futiles. On est davantage à l’aise depuis que l’Algérie a rompu ses relations avec le Maroc».