De 790 à 1554, durant près de huit siècles, avec un intermède à la fin du XIVe siècle et au début du 15ème, Tlemcen fut sous influence ou même sous domination marocaine. Avant la conquête turque de 1553 (ou 1555), Tlemcen a ainsi connu quatre périodes marocaines: la période idrissienne (790-931), la période almoravide (1078-1143), la période almohade (1143-1236) et la période mérinide (1337-1358).
Tlemcen fut islamisée à la fin du 12ème siècle avant de devenir l’éphémère centre d’une principauté kharijite dirigée par Abou Qorra. Au siècle suivant, la ville passa sous le contrôle des Idrissides de Fès, fondateurs du premier État marocain. La période idrissienne, qui dura 139 ans, de 790 à 931, fut la première séquence de présence marocaine.
En 931, les Idrissides furent chassés de Tlemcen par les Fatimides. Ces derniers conservèrent la ville durant 24 ans, jusqu’en 955, date à laquelle le calife omeyyade de Cordoue, Abd al-Rahman III, prit la ville qui fut confiée à l’Ifrénide Yahia Ben Mohamed. Peu de temps après, ce dernier fut tué par les Fatimides.
Un siècle de grande confusion débuta alors, qui dura jusqu’en 1078, date de l’arrivée des Almoravides qui ouvrirent la seconde période marocaine de Tlemcen, occupant la ville jusqu’en 1146. Ce furent les Almoravides qui bâtirent le noyau de la ville actuelle et qui y édifièrent la Grande mosquée érigée sur ordre d’Ali Ben Youcef (1083-1143). Sous les Almoravides, Tlemcen devint la seconde capitale de l’empire marocain après Marrakech.
La troisième période marocaine débuta en 1143 (ou en 1144, ou en 1145), quand le sultan almohade Abd el-Moumen (1130-1163) prit Tlemcen. Les Almohades confièrent la ville à des gouverneurs issus de la tribu berbère Zianide (ou Beni Abd el-Wadide). En 1236, le gouverneur Yaghmorasan ben Zayan (1236-1283) se proclama indépendant du Maroc et il fonda un royaume dont, avec nombre d’inter-règnes et d’occupations marocaines, ses descendants demeurèrent les souverains jusqu’à la conquête turque.
Durant le règne du Zianide Abou Saïd Othman I (1283-1304), et sous celui de son successeur Abou Zyan I (1304-1308), Tlemcen subit un siège de huit années, de 1299 à 1307, durant lequel le Mérinide Abou Yakoub Youssef (1286-1307) construisit le camp fortifié de Mansoura afin de prendre la ville. Petit à petit, tous les territoires zianides furent conquis par les Mérinides: Oran et sa région en 1300, Alger et ses environs en 1301-1302, puis le massif de l’Ouarsenis. Il ne restait plus aux Marocains que la ville de Tlemcen à enlever quand, en 1307, le sultan Abou Yakoub Youssef fut assassiné à Mansoura. Son petit-fils, Abou Thabet (1307-1308) qui lui succéda, décida de lever le siège.
Tlemcen retrouva alors brièvement son indépendance avec le Zianide Abou Musa I (1308-1318), qui fut assassiné. En 1334, sous le règne d’Abou Tachfin I (1318-1337), une nouvelle guerre éclata avec le Maroc du Mérinide Abou l’Hassan (1331-1351). Le 13 avril 1337, ce dernier enleva Tlemcen et, durant l’assaut, Abou Tachfin I et trois de ses fils furent tués.
Redevenue indépendante en 1350, Tlemcen fut de nouveau occupée dès 1351 par le sultan marocain Abou Inane Faris (1351-1358). Après sa mort, Tlemcen recouvra une nouvelle fois son indépendance. Sous le règne du Zianide Abou Hamou Musa II (1359-1388), la ville connut une grande prospérité, illustrée par un développement architectural et culturel qui en fit une ville de savants et d’artistes réputés.
Le royaume entra ensuite dans une longue période de décadence, oscillant à plusieurs reprises entre deux maîtres successifs, le Mérinide marocain à l’ouest et le «Tunisien» hafside à l’est. Cependant, dès que la poussée mérinide ou hafside cessait de s’exercer, Tlemcen redéveloppait son dynamisme commercial, notamment avec l’Espagne, tant chrétienne que nasride (Grenade).
En 1411, Abou Malek (1411-1424) prit le pouvoir pour un premier règne, grâce au soutien du sultan mérinide Abou Saïd III (1398-1420), puis se retourna contre son allié marocain et prit même Fès. Cette reconstruction de la puissance tlemcénite inquiéta les Hafsides de Tunis qui fomentèrent une révolution en soutenant un oncle d’Abou Saïd III qu’ils reconnurent comme sultan en 1424 et qui régna une première fois sous le nom d’Abou Abdallah Mohammed (1424-1428).
Un nouveau retournement de situation se produisit en 1428 quand, réconcilié avec les Hafsides, Abou Malek, qui avait été détrôné en 1424, reprit Tlemcen grâce à leur aide. Il redevint alors sultan pour un second règne qui dura de 1428 à 1430, date à laquelle il fut renversé et tué par son prédécesseur Abou Abdallah Mohammed. Ce dernier n’eut cependant un second règne que d’une année à peine car, en 1431, le sultan hafside de Tunis, Abou Faris al-Mutawakil (1394-1434), prit Tlemcen où Abou Abdallah Mohamed fut capturé et mis à mort.
En 1432 ou en 1433, profitant du départ d’Abou Faris al-Mutawakil, les Zianides reprirent le pouvoir à Tlemcen, mais la ville traversa des temps difficiles marqués par des luttes de clans meurtrières.
En 1512, le sultan tlemcénite Abou Abdallah mourut sans héritier, ce qui provoqua de multiples conflits familiaux. Abou Zeyane, frère aîné du défunt, accéda alors au pouvoir en s’alliant aux Espagnols, maîtres d’Oran depuis 1509. En 1517, Arudj Barberousse prit Tlemcen, où il fit mettre à mort Abou Zeyane. Mais, commandés par Diego de Cordoba, marquis de Comares, les Espagnols lancèrent une offensive qui s’acheva par la mort d’Arudj Barberousse en 1518.
Désormais, Tlemcen n’eut plus de destin autonome. Belle endormie, elle vivota jusqu’à la période ottomane qui débuta en 1553 (ou en 1555), quand le pacha turc d’Alger, Salah-Raïs prit la ville. Tlemcen ne fut dès lors plus qu’une cité parmi celles de la Régence turque d’Alger.