Maroc-France: alors qu’un prudent dégel se profile, France 24 refait des siennes

Des reporters de la chaîne France 24.

Bras médiatique du ministère français des Affaires étrangères, la chaîne de télévision France 24 nous gratifie, une fois de plus, d’une interview-tremplin d’un pseudo-intellectuel marocain qui cache ses méfaits de droit commun derrière un épais voile d’activisme politique et d’auto-victimisation. Si le procédé est somme toute classique, le choix du moment est tout sauf innocent et interpelle à plus d’un titre.

Le 19/01/2024 à 15h35, mis à jour le 19/01/2024 à 15h51

Les enthousiastes des deux côtés de la Méditerranée, et ils sont nombreux, qui espéraient une reprise du cours normal des relations exceptionnelles entre le Maroc et la France devront tempérer leurs ardeurs. Alors que d’aucuns voyaient les prémices d’un dégel de la crise diplomatique entre Rabat et Paris, à la faveur notamment des derniers contacts entre les autorités des deux pays, la chaîne France 24, une émanation directe du ministère français des Affaires étrangères, vient suggérer que tout change… pour que rien ne change.

Jeudi 18 janvier 2024, la chaîne française, désormais sous la tutelle du nouveau chef de la diplomatie Stéphane Séjourné, à l’hostilité jadis franche vis-à-vis du Maroc, nous a gratifiés d’une interview accordée comme une tribune à Maâti Monjib, «opposant» habitué aux coups d’éclats médiatiques pour mieux cacher l’origine suspecte de sa fortune. Au Maroc, l’«historien» est sous le coup de la justice dans des affaires de droit commun, en l’occurrence de détournement de fonds. En France, il est occasionnellement ressorti des tiroirs à la seule fin d’attaquer le Maroc, ses institutions et sa monarchie. Le registre est évident: les droits de l’Homme.

Que nous apprend la chaîne française de nouveau? Absolument rien si ce n’est les mêmes accusations farfelues et les invectives sans fondements. Celles-ci veulent que le Maroc soit un État policier, où les renseignements tiennent le gouvernail d’un pays où le Roi est absent… Le tout par la bouche d’un Franco-Marocain de service qui se veut l’autoproclamé porte-étendard des valeurs de démocratie et de liberté d’expression. Franchement? La seule particularité d’une telle sortie reste, évidemment, son timing, au lendemain de la nomination par le président Emmanuel Macron d’un nouveau gouvernement sur lequel bien des espoirs étaient fondés s’agissant des relations Maroc-France.

En déroulant le tapis rouge à Maâti Monjib, plus connu pour ses frasques judiciaires que pour ses idées, le message du Quai d’Orsay, dont dépend la très étatique France 24, interpelle à tous les étages. Alors que bien des forces s’activent pour que les deux pays tournent définitivement la page de la crispation de leurs relations, il faut se résoudre à croire qu’en France certaines voix sont habilitées à freiner cette dynamique des quatre fers.

En offrant une tribune à un pseudo-opposant, Stéphane Séjourné, son équipe et ses médias veulent-ils nous rappeler que la cabale orchestrée contre le Maroc au Parlement européen avec, à la sortie, deux résolutions non contraignantes mais clairement hostiles au Maroc, entre le 19 janvier et le 16 février 2023, n’était pas une simple tactique, mais une politique d’État? Stéphane Séjourné n’était alors que le secrétaire général du parti Renaissance, député européen et président du groupe Renew. Mais il était également l’ancien conseiller (et toujours très proche) d’Emmanuel Macron.

Quand on sait que le réchauffement dans les relations entre Paris et Rabat est encore embryonnaire, on peut légitimement s’interroger sur les fins assignées à la tribune résolument hostile de France 24 contre le Royaume. Cherche-t-on à étouffer dans l’œuf le dégel en cours? Car donner libre antenne à un pseudo-intellectuel, qui, au demeurant, détient la nationalité française (un autre bien mal acquis) et n’hésite pas à servir le même vieux cocktail de vitupérations s’agissant du Maroc, n’est certainement pas le meilleur moyen d’entamer une nouvelle ère dans les relations entre les deux pays.

Par Tarik Qattab
Le 19/01/2024 à 15h35, mis à jour le 19/01/2024 à 15h51