«Le Temps des combats»: voici ce que pense Nicolas Sarkozy du Maroc, de son Roi, des Marocains et du Sahara

«Le Temps des combats», le nouveau livre de Nicolas Sarkozy (Fayard, 560 p., 28 €) est en librairie à partir de ce mardi 22 août. Le360 a pu en parcourir un exemplaire, et y lire ce que l’ancien président français pense du Royaume, de son Souverain et des Marocains. Il y pointe aussi du doigt le «tropisme algérien» d’Emmanuel Macron et l’appelle à reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Extraits.

Le 22/08/2023 à 11h16

Dans «Le Temps des combats», dernier livre en date de l’ex-président français Nicolas Sarkozy, plusieurs passages sont réservés au roi Mohammed VI, au Maroc et aux Marocains. L’auteur voue une grande estime et un grand respect pour le Royaume, son Souverain et son peuple. L’ancien président français appelle surtout la France à ne pas tromper d’amis ni d’ennemis. Car, pour lui, le principal allié, le «pays frère» en Afrique du Nord est bien le Maroc.

Un roi visionnaire

Dans son nouveau livre, Nicolas Sarkozy ne cache pas sa fascination pour la personnalité du roi Mohammed VI et la manière dont il a dirigé le pays depuis son accession au Trône. Mais il commence par une nécessaire mise en garde contre toute atteinte à la personne du Souverain, car c’est une ligne rouge pour tous les Marocains.

«Les Marocains sont sensibles, parfois jusqu’à la susceptibilité. Il faut y prendre garde, car la moindre maladresse, fût-elle non intentionnelle, peut avoir des conséquences fâcheuses. Ainsi, le roi est le roi. Il est de surcroît le descendant direct du Prophète», lit-on dans «Le Temps des combats», où il est écrit que «Le président de la République française doit avoir la sagesse de comprendre cette particularité et en tirer toutes les conséquences en matière protocolaire».

«Le roi Mohammed VI est un homme de large culture et d’une finesse intellectuelle éblouissante. Combien de fois ai-je été impressionné par sa capacité à anticiper les évènements et à garder le cap de sa vision pour le royaume?», écrit Nicolas Sarkozy, qui revient sur la manière dont le Souverain a géré l’épisode du fameux «Printemps arabe» qui s’est révélé un long automne dans certains pays de la région.

«(Le Roi) me parla longuement de sa volonté de démocratiser et de moderniser le Maroc. Il avait déjà présente à l’esprit la réforme de la Constitution qui permit que, de tous les pays arabes, le Maroc fût l’un des seuls à ne pas connaître de “printemps”. Sa vision de la question des Frères musulmans était audacieuse et prémonitoire: “S’ils gagnent les élections législatives, je nommerai l’un des leurs Premier ministre. Il vaut mieux qu’ils soient confrontés aux réalités du pouvoir plutôt que d’en faire des martyrs en les mettant en prison”», se souvient l’ancien président français, qui dit avoir été «incrédule».

«C’est pourtant ce qu’il fit, et quelques années plus tard les Frères musulmans rassemblèrent moins de 10% des suffrages des Marocains! Le pari royal était gagné. Il fut le seul à agir ainsi. Les faits lui ont donné raison», enchaîne l’auteur. «On ne mesure pas assez en France la chance qu’a le Maroc d’avoir un roi comme Mohammed VI. Il est un rempart contre le fanatisme et les extrémistes», conclut-il sur ce chapitre.

«Le Maroc est un pays frère. C’est un égal de la France qui doit désormais être considéré comme tel. Le royaume est devenu une grande puissance africaine. Ses entrepreneurs, ses intellectuels, ses artistes, ses élites n’ont plus rien à envier aux nôtres», écrit Nicolas Sarkozy pour qui «le roi Mohammed VI restera dans l’histoire comme l’un des plus grands souverains marocains». C’est en ce sens qu’il appelle à nouveau son successeur à laisser de côté «son tropisme algérien», «un pari perdant» et lourd de conséquences.

Quand Macron se trompe sur toute la ligne

«Le président Macron n’a pas toujours su trouver les mots ou les gestes que les Marocains attendaient. Son tropisme algérien lui procurera bien des déceptions. C’est sans doute un point de désaccord qui existe entre nous. Je ne crois pas qu’il nous faille multiplier les initiatives auprès des dirigeants algériens dont la représentativité à l’intérieur de leur pays est aussi faible que la popularité. Plus nous essaierons de bâtir une amitié “artificielle”, plus ils la refuseront. Ils ont besoin d’un adversaire pour détourner l’attention de leur peuple de l’échec patent dans lequel ils ont plongé ce pays magnifique, qui compte parmi les plus riches au monde du fait d’un sous-sol regorgeant de matières premières, spécialement dans le contexte énergétique que nous connaissons», explique l’auteur. Et de poursuivre que «ces initiatives, dont je peux comprendre les raisons et qui partent d’un bon sentiment, sont à mes yeux vouées à l’échec. En outre, elles risquent de nous détourner du Maroc. (…) À ce jeu-là, nous risquons de tout perdre. Nous ne gagnerons pas la confiance de l’Algérie et perdrons celle du Maroc. C’est un pari dangereux, de surcroît condamné d’avance».

Nicolas Sarkozy appelle son pays à prendre une position claire en faveur de la marocanité du Sahara occidental. «Cette question est centrale pour les intérêts stratégiques du Maroc. Elle permettrait d’éviter une république sahraouie dont la solidité et la pérennité laissent tous les observateurs informés plus que perplexes. Savoir choisir ses amis, ne pas craindre d’encourir le courroux de ceux qui le sont moins, s’inscrire dans une perspective longue, s’appuyer sur l’histoire commune: telles devraient être les boussoles du président de la République», insiste l’ex-président français pour qui «s’il est un domaine de la diplomatie française qui mériterait d’être revisité et amodié, c’est celui de notre engagement auprès de nos frères marocains!».

«Nos frères marocains»

«J’ai toujours ressenti cette proximité avec les Marocains. C’est un peuple hospitalier et profondément généreux. Même lorsqu’ils ont peu, ils sont toujours prêts à le partager, à ouvrir leur maison, à entamer la discussion, à offrir ce thé brûlant qui est leur boisson nationale», écrit Nicolas Sarkozy, qui avait pris le temps de connaître le Royaume, ses traditions et ses institutions.

«Le Maroc a réussi son entrée dans le monde moderne sans brader son style de vie, ses traditions, son univers si particulier. Ce n’est pas aux Marocains que l’on a besoin d’expliquer l’importance de la sauvegarde d’une identité nationale. N’est sans doute pas né celui qui voudra la leur faire perdre! La France doit chérir cette relation privilégiée. Elle doit la préserver, car elle ne va pas de soi», avertit l’auteur.

Par Mohammed Boudarham
Le 22/08/2023 à 11h16