Le Pérou et le Sahara marocain: des positions au gré de l’humeur et des crises internes

Le président péruvien Pedro Castillo.

Le président péruvien Pedro Castillo. . DR

Connu jusqu’ici par sa politique étrangère claire et constante, le Pérou du président Pedro Castillo semble désormais vaciller. A peine 20 jours après le retrait de reconnaissance à la prétendue «rasd», le chef d’Etat péruvien envoie un message suggérant un revirement. Que faut-il retenir? Lecture.

Le 12/09/2022 à 14h52

Le revirement aura été brutal. A vingt jours seulement jours de la décision de retrait de la reconnaissance de la prétendue «rasd», annoncée le 18 août 2022 par le biais d’un communiqué officiel du ministère péruvien des Relations extérieures, et réaffirmant pour l’occasion le soutien du Pérou à la souveraineté du Maroc sur son Sahara, le président Pedro Castillo a publié un tweet ambigu, qui sème la confusion à propos de la position de son pays. «Après une année du rétablissement des relations avec la République arabe sahraouie démocratique, nous persistons dans la défense de son autodétermination souveraine», peut-on lire dans ce post laconique, publié sur Twitter le jeudi 8 septembre 202.

On ne saura rien, ni sur les motivations d’une telle prise de parole, ni sur la portée de cette déclaration. Mais loin des arguments objectifs, en phase avec la dynamique internationale d’appui à l’intégrité territoriale du Maroc et à l’initiative d’autonomie en tant que solution pour le différend régional autour du Sahara marocain, cette sortie répond à des considérations politiciennes et conjoncturelles internes, contingentes à la crise politique que connaît le pays et à l’instabilité gouvernementale qui en découle.

L’impact sur la politique d’Etat est négatif en matière de relations internationales, ainsi que sur la crédibilité du pays. En réaction immédiate, le chef de la diplomatie péruvienne Miguel Rodriguez Mackay a présenté sa démission et ce, dès le lendemain, vendredi. Une «démission irrévocable» due à des «divergences» sur la conduite des questions internationales par le gouvernement. Il ne se sera maintenu à son poste, en tout et pour tout, qu’un seul mois et quatre jours. Le ministre des relations extérieures, Miguel Rodriguez Mackay, a donc à l'évidence refusé de cautionner cette déviation hasardeuse du président, préférant quitter son poste cinq semaines seulement après sa nomination.

Comme conséquence de cette instabilité politique et institutionnelle qui frappe son gouvernement, le président Pedro Castillo va devoir nommer son cinquième ministres des Relations extérieures, en un laps de temps de moins de 15 mois. Les décisions prises par le président Pedro Castillo dénotent d’un manque de vision flagrant, qui ne fait que jeter le discrédit sur une politique étrangère péruvienne en proie aux injonctions idéologiques, alors que le pays peine à retrouver l’image de marque de la politique d’Etat sage et stable qui a traditionnellement caractérisé l’action diplomatique péruvienne.

Loin de donner un message claire et rationnel sur la position du Pérou, le tweet posté par le compte officiel du président Pedro Castillo vient non seulement semer le doute, mais également brouiller le communiqué du ministère des Relations extérieures, porte-voix de la politique étrangère du pays, et instrumentaliser le principe d’autodétermination pour désavouer les arguments valablement invoqués par son propre ministre des relations extérieures pour défendre celui du respect du droit international et de l’intégrité territoriale des Etats.

Cette improvisation ne manquera pas d’amener la communauté internationale à douter du sérieux des positions prises par la présidence de la République préuvienne, et d’impacter par conséquent négativement le positionnement du Pérou à l’international.

Par Tarik Qattab
Le 12/09/2022 à 14h52