Le parlementaire islamiste et le short des bénévoles belges

DR

Revue de presseKiosque360. Le parlementaire n’a pas vu les ruelles qu’elles ont dallées, ni les canaux d’irrigation qu’elles ont remis en état, ni même le centre socioculturel qu’elles ont construit, entre autres travaux qu’elles ont réalisés depuis 2005. Il n’a vu que l’"indécence" de leur short.

Le 07/08/2019 à 19h07

Des jeunes Belges, des deux sexes, se sont rendus dans notre pays, dans la région de Taroudant, pour un programme d’activités pour jeunes entrant dans le cadre humanitaire de la tolérance entre religions. Entre autres activités prévues dans ce programme, le pavage des ruelles d’un douar de la région. Les jeune gens se sont donc mis au travail dans une tenue adaptée à la chaleur de cette saison estivale, sous l’œil bienveillant des habitants du douar «Adar Ouamane».

Jusque-là tout va bien. Sauf qu'un conseiller parlementaire du PJD, élu dans la région de Taounat, à des centaines de kilomètres plus loin, y a trouvé à redire. En fait, le parlementaire islamiste n’a retenu de tout cela que la tenue des jeunes femmes, trop obscène à son goût. Le travail qu’elles ont accompli ne l’émeut point, seule leur «âwra», la partie de leur peau non couverte, l’indigne. Il trouve même cela scandaleux et l’a fait savoir sur un post qu’il a publié sur facebook. «Seul un parlementaire PJD peut être capable de faire montre d’un comportement aussi extrémiste et de tenir des propos aussi infâmes contre ces jeunes volontaires», note le quotidien Assabah dans sa livraison du jeudi 8 août.

A «Adar Ouamane», ce douar situé dans les montagnes de la province de Taroudant, le spectacle n’a rien de choquant. Les jeunes du douar, tout comme les moins jeunes, sont habitués à ce genre d’activités auxquelles ils ont d’ailleurs pris part. Les jeunes filles et garçons belges ne se sont jamais, non plus, sentis différents. Au contraire, ils se sont vite intégrés dans cette communauté villageoise avec laquelle ils ont partagé gîte et couvert. Les jeunes filles ne se sont à aucun moment senties harcelées ou regardées de travers, précise le quotidien. Il faut dire, souligne Assabah, que les villageois se sont habitués, depuis longtemps, à ce type de programmes pour jeunes puisqu’ils font partie d’une convention signée, depuis 2005, entre une association locale et son homologue belge. C’est-à-dire bien avant que le conseiller PJD ne goûte à la rente et aux privilèges politiques que lui confère son poste de parlementaire, note le quotidien.

Depuis cette date, bien des programmes ont été menés avec une composante «travail bénévole». C’est ainsi que, bien avant la «promotion» de cette année, d’autres jeunes gens, filles et garçons belges, ont contribué à la réfection des canaux d’irrigation artisanale dans cette même région. Ils ont également construit un complexe socioculturel avant de s’attaquer, cette année, aux ruelles du douar qu’ils ont dallées. Tout cela, le parlementaire auteur de cette publication sur facebook, qui pourrait d’ailleurs être facilement assimilée à de l’incitation à la haine, ne l’a pas vu. Il n’a vu que le short des jeunes filles, juste ce qu’il faut pour attiser son obsessions sexuelles et susciter des réactions extrémistes.

En réagissant de la sorte, le conseiller parlementaire du PJD veut sans doute se montrer sous le visage de l’élu soucieux de la préservation des valeurs, des mœurs et de la religion des Marocains. Pourtant, cela est un domaine encadré par la loi et les coutumes. Le pire, c’est qu’un tel comportement émane d’un parlementaire qui a été président du groupe d’amitié et de coopération maroco-canadien. Ce parlementaire s’est, d’ailleurs, déjà fait remarquer pour avoir accusé, via une publication sur les réseaux sociaux, le joueur du football Cristiano Ronaldo d’être «responsable de naissances hors mariage».

Comme il fallait s’y attendre, et vu les réactions d’indignation que sa publication a suscitées sur les réseaux sociaux, le parlementaire islamiste a tenté de faire marche arrière. Mais il n’a fait que s’enfoncer davantage. Il a ainsi prétendu que sa «remarque» portait uniquement sur les considérations sécuritaires du chantier. Selon lui, la tenue des bénévoles ne répondait pas aux normes de protection exigées pour ce genre de travaux. Ce faisant, il a critiqué sévèrement, au passage, tous ceux qui ont réagi à ses propos. Mais il n’a jamais osé répondre à la question de savoir s’il avait un jour participé, à titre bénévole, à un travail utile à la communauté.

Par Amyne Asmlal
Le 07/08/2019 à 19h07