Attaques d’Es-Semara: au siège de l’ONU à Genève, Abdellatif Ouahbi pointe la responsabilité directe d’Alger

Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, devant la 111ème session du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) de l’Organisation des Nations unies (ONU), à Genève.

Depuis Genève et devant la 111ème session du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) de l’Organisation des Nations unies (ONU), le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a qualifié l’attaque perpétrée contre des civils dans la capitale spirituelle du Sahara atlantique de «terrorisme d’État» commis depuis le territoire algérien contre le Maroc.

Le 25/11/2023 à 12h34

La sortie a ce mérite qu’elle constitue la première réaction officielle d’un membre du gouvernement marocain s’agissant des attaques contre Es-Semara commises avec l’aval et l’appui de l’Algérie de la junte, pointant leur caractère terroriste. On s’en souvient, quatre déflagrations de projectiles ont touché, dans la nuit du 28 au 29 octobre dernier, des quartiers civils d’Es-Semara, dans le sud du Maroc, faisant 1 mort et 3 blessés, dont 2 graves, en plus de pertes matérielles.

Si un faisceau d’indices crédibles, concordants et probants établissent, depuis, la responsabilité du Polisario, une milice séparatiste agissant depuis Tindouf, en Algérie, qui l’héberge, la finance et l’arme, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a, cette semaine, apporté un cachet officiel au caractère éminemment criminel, terroriste et constituant un acte de guerre à ces attaques.

C’était mercredi et jeudi derniers, à Genève, dans le cadre d’une intervention devant la 111ème session du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, à l’occasion de l’examen combiné des 19ème au 21ème rapports périodiques relatifs à la mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Sur un ton faussement interrogatif, celui qui occupe également le poste de secrétaire général du Parti authenticité et modernité (PAM, alliance gouvernementale) a interpellé l’Algérien Noureddine Amir, membre dudit comité. «Ne peut-on pas ajuster certains comportements du voisin algérien pour y voir une atteinte et une menace à la paix et la sécurité dans le monde? Envoyer des missiles, partis du territoire algérien et visant nos terres, n’est-il pas du terrorisme? Ne sommes-nous pas passés d’un terrorisme commis par des individus à un terrorisme d’État. Quand j’essaie de comprendre, je me rends compte que vous êtes (l’Algérie, NDLR) plus dans une position de faiblesse que dans une situation de force» pour donner des leçons, a réagi le ministre marocain en réponse à une énième provocation algérienne sur la définition du principe d’autodétermination.

«Tu quoque fili»

Abdellatif Ouahbi suggère un acte de trahison. «Il est clair que la géographie nous a porté préjudice, en nous mettons côte à côte avec nos voisins. Et nous n’avons aucun pouvoir sur la géographie. Par contre, nous nous référons à l’Histoire pour dire que notre sang s’est mêlé dans notre lutte pour nos indépendances. N’est-ce pas suffisant pour que l’on puisse vivre en paix et en sécurité? À celui qui me qualifie de frère, je lui réponds: “Toi aussi, mon fils!”.» Référence est faite à la célèbre locution latine que la tradition attribue à Jules César, qui l’aurait adressée, en guise de dernier souffle, à Brutus. César considérait Brutus comme l’un de ses alliés, mais ce dernier s’est mis du côté de ceux qui l’ont assassiné.

Pour l’heure, le Maroc, dans le cadre de l’État de droit, préconise la sagesse et la retenue. Le parquet compétent à Laâyoune a ouvert une enquête et les analyses techniques et balistiques sont en cours pour définir la nature et la provenance exactes des projectiles. En attendant, les autorités se gardent de préempter les résultats de cette enquête et ne font pas de commentaire sur le processus judiciaire. «Elles s’exprimeront dès l’obtention des premiers éléments», précise une source informée. Sereines face à ces provocations inconsidérées, elles mèneront les investigations à leur terme, jusqu’à établir les responsabilités et appliquer, alors, la loi dans son implacable rigueur.

Dans le cadre de son enquête sur les attaques d’Es-Semara, une équipe de la mission onusienne au Sahara (MINURSO), menée par son chef, Alexander Ivanko, s’est notamment rendue à Rabat. Ses investigations ont abouti à un rapport, qui a été remonté au quartier général de l’ONU avant d’être soumis au Conseil de sécurité.

Saisie par les autorités immédiatement après les explosions, la MINURSO a pu constater leur localisation exacte: le quartier Essalam, où deux des déflagrations ont eu lieu, le quartier Al Wahda, objet d’une explosion et le quartier industriel dans la périphérie de la ville. «Ils ont pu relever qu’il n’existe aucune installation militaire ni dans ni autour de ces quartiers. Comme ils ont pu attester que toutes les victimes innocentes sont des citoyens civils», avait précisé l’ambassadeur représentant du Maroc à l’ONU, Omar Hilale, le 30 octobre dernier au siège de l’organisation à New York, à l’issue de l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 2703 sur le Sahara.

Par Tarik Qattab
Le 25/11/2023 à 12h34