Crise ouverte dans l’opposition après le revers parlementaire

Nabil Benabdallah, secrétaire général du PPS et Driss Lachgar, premier secrétaire de l’USFP: le courant ne passe pas.

Nabil Benabdallah, secrétaire général du PPS et Driss Lachgar, premier secrétaire de l’USFP. DR

Revue de presseÀ la suite de l’échec cuisant de la dernière motion de censure contre le gouvernement, les chefs des partis de l’opposition s’accusent mutuellement, révélant au grand jour les fractures d’une composition déjà fragile. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Assabah.

Le 06/07/2025 à 19h23

Une scène politique surréaliste secoue Rabat. Alors que l’opposition aurait pu capitaliser sur la grogne sociale pour affaiblir un gouvernement critiqué pour sa gestion de l’inflation, l’échec de la récente motion de censure a, au contraire, déclenché une guerre ouverte entre les chefs des principaux partis d’opposition, indique le quotidien Assabah dans son édition du lundi 7 juillet.

Au lieu d’un front uni pour dénoncer la hausse continue des prix et la politique du gouvernement, c’est un règlement de comptes sans précédent qui agite les rangs de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), du Parti de la justice et du développement (PJD), du Parti du progrès et du socialisme (PPS) et du Mouvement populaire (MP). «Chacun rejette sur l’autre la responsabilité de l’échec de cette motion tant attendue», lit-on.

Dans une ambiance électrique, Mohammed Nabil Benabdallah, secrétaire général du PPS, a répliqué avec virulence aux accusations de Driss Lachgar, premier secrétaire de l’USFP. «Notre parti vous a respecté par sagesse. Mais si quelqu’un nous cherche, il nous trouvera. Et il me trouvera, moi, en particulier», a-t-il lancé devant ses partisans, samedi, à Rabat.

Benabdallah, visiblement remonté, a dénoncé les tentatives internes de saboter les efforts de coordination entre les partis d’opposition. «Nous avons enduré en silence et œuvré durant quatre années pour maintenir une unité d’action dans le travail parlementaire, notamment à travers des amendements communs. Mais certains n’ont jamais cessé de vouloir faire éclater cette fragile alliance», a-t-il déclaré, accusant implicitement l’USFP de chercher à affaiblir volontairement la voix de l’opposition.

Le PPS défend une ligne de «responsabilité et de construction positive», selon les mots de son secrétaire général, qui déplore que d’autres préfèrent, dit-il, «approfondir les divisions et faire du scandale médiatique leur méthode politique». Le point de non-retour semble avoir été atteint avec l’échec de la motion de censure, que certains ont «sabotée intentionnellement», selon les accusations à peine voilées de Benabdallah.

Du côté du groupe parlementaire, même son de cloche, relève Assabah. Rachid Hammouni, président du groupe PPS à la Chambre des représentants, a directement mis en cause Driss Lachgar. Ce dernier aurait, selon Hammouni, pris la décision unilatérale de se retirer du processus sans consultation, brisant ainsi les efforts de médiation entre le PJD, le MP et les autres formations.

Le responsable parlementaire rappelle que même Mohamed Ouzzine, secrétaire général du Mouvement populaire, avait consenti à céder à l’USFP la lecture du texte juridique de la motion, preuve d’un compromis. «Tout cela a été réduit à néant à cause d’un comportement destructeur», fustige Hammouni.

Derrière cette crise, c’est la question du leadership au sein de l’opposition qui se pose, note Assabah. Entre ambitions personnelles, calculs partisans et défiance mutuelle, les chances d’une reconstruction rapide d’un front uni apparaissent minces. Le PPS, qui se défend de toute duplicité, estime n’avoir jamais agi autrement qu’au nom de l’intérêt général. Mais dans les rangs de l’USFP, on accuse Benabdallah de vouloir se poser en arbitre alors qu’«aucun mandat ne lui a été donné pour cela».

Cette passe d’armes souligne le malaise profond d’une opposition incapable, pour l’heure, d’incarner une alternative crédible à la majorité en place, lit-on encore. Et si certains avaient imaginé que la motion de censure serait un électrochoc salutaire, elle se révèle aujourd’hui comme un catalyseur de divisions internes.

Par Imane Idrissi
Le 06/07/2025 à 19h23