Une bénédiction pour certains pays, les hydrocarbures sont bien souvent une malédiction pour d’autres. Sur ce dernier registre, l’Algérie bat tous les records, allant de scandale en scandale avec la prévarication comme fil rouge. Une nouvelle affaire vient d’éclater, cette fois-ci aux Etats-Unis, où la société Honeywell International a consenti à s’acquitter de près de 203 millions de dollars pour mettre un terme à des enquêtes, lancées aux Etats-Unis et au Brésil, au sujet de pots-de-vin versés à des responsables en Algérie et à la compagnie pétrolière publique brésilienne.
L’annonce a été faite lundi 19 décembre 2022 par le groupe qui opère dans nombre de secteurs, dont l'aérospatial, mais aussi dans la fabrication des catalyseurs utilisés pour le raffinage du pétrole. Elle a été notamment relayée par le Wall Street Journal.
Les enquêtes ont révélé qu’UOP, une filiale américaine d'Honeywell, avait conspiré pour verser des dessous-de-table à un ancien haut responsable de Petróleo Brasileiro SA afin d'obtenir un contrat de raffinage de pétrole de 425 millions de dollars. «La Securities and Exchange Commission (SEC, organisme fédéral américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers, NDLR) des Etats-Unis a également constaté que la filiale belge d'Honeywell avait versé des pots-de-vin à des responsables algériens pour obtenir des contrats avec la société pétrolière publique algérienne Sonatrach», relève ce journal.
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Dans les détails, l’affaire algérienne remonte à 2011, quand la filiale belge d'Honeywell a remboursé, via une autre société, un consultant pour des pots-de-vin qui ont aidé à résoudre un différend sur le calendrier des mises à niveau que la société achevait sur une raffinerie à Oran, a déclaré la SEC. Selon le site algérien TSA, le consultant en question a «offert» quelque 75.000 dollars à un responsable du gouvernement algérien, dont l’identité n’a pas été révélée.
Honeywell a reconnu vendredi avoir versé les dessous-de-table et a conclu une série d'accords avec la SEC et le ministère américain de la Justice, ainsi qu'avec les autorités brésiliennes. Les autorités américaines ont accusé l'UOP d'avoir enfreint la loi américaine sur les pratiques de corruption à l'étranger, et les règlements obligent Honeywell à procéder à des révisions de conformité et à déposer des rapports périodiques.
A l’époque, le ministère de l’Energie était dirigé par Youcef Yousfi, qui a remplacé à ce poste un protégé d’Abdelaziz Bouteflika, Chakib Khelil, lui-même condamné par contumace à 20 ans de prison ferme en juin dernier dans le cadre d’une autre affaire de corruption impliquant la Sonatrach et Saïpem, filiale du géant italien des hydrocarbures ENI. Cette affaire concernait l’octroi de marchés de gré à gré d’une valeur de 11 milliards de dinars (80 millions de dollars).
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Ce scandale avait provoqué le limogeage de Mohamed Meziane à la tête de Sonatrach et sa condamnation, le 12 décembre dernier, à cinq ans de prison ferme, alors que ses deux enfants Mohamed Réda et Bachir Fawzi ont écopé chacun de quatre ans d'emprisonnement.
Plus récemment, l’achat par Sonatrach, en 2018, de l’usine de raffinage Augusta, au sud de l’Italie, a également valu à l’ancienne direction de la compagnie, et à son ex-PDG, Abdelmoumen Ould Kaddour, des poursuites judiciaires. Ceci, sur fond d’un contrat d’un montant mirobolant de 725 millions de dollars pour une raffinerie qui fait partie des antiquités avec une mise en service il y a plus de 70 ans.
Autant dire qu’il ne se passe pas un jour sans que l’actualité algérienne ne soit entachée par des scandales en lien avec ce qui aurait pu être une manne pour développer le pays, mais que les caciques du régime considèrent comme un butin qu’ils partagent goulûment avec leurs proches.