Gaza: les pourparlers de trêve s’intensifient, les craintes de famine persistent

Des Palestiniens se précipitent pour se mettre à l'abri, lors d'un bombardement de l'armée israélienne dans le centre de la ville de Gaza, le 18 mars 2024. AFP or licensors

Les pourparlers en vue d’une trêve entre Israël et le Hamas assortie de la libération d’otages israéliens et des prisonniers palestiniens donnent des signes de progrès mardi sur fond de crainte d’une famine dans la bande de Gaza et d’une opération armée dans le secteur de Rafah, où s’entassent 1,5 million de personnes.

Le 19/03/2024 à 09h06

Le chef des services de renseignement israéliens, le Premier ministre du Qatar et des responsables égyptiens se sont rencontrés lundi à Doha, pour discuter d’un éventuel accord de trêve à Gaza. Selon le site américain Axios, des discussions «positives» ont bien eu lieu et les négociateurs israéliens vont rester sur place pour continuer les pourparlers «détaillés» avec les médiateurs qataris et égyptiens.

Israël avait annoncé vendredi l’envoi d’une délégation à Doha, sans préciser la date, après ce qui apparaît comme un infléchissement de la position du Hamas se disant prêt à une trêve de six semaines après avoir longtemps demandé un cessez-le-feu définitif.

«Nous avons accepté qu’il y ait un retrait partiel de la bande de Gaza avant tout échange, et après la première étape, un retrait total», a affirmé lundi l’un des responsables du Hamas, Oussama Hamdan. «Durant la première étape, il y aura un arrêt total des opérations militaires», a-t-il ajouté en évoquant des discussions qui pourrait se poursuivre sur «quelques jours».

Le département d’État a de son côté annoncé mardi que le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, se rendrait en Arabie saoudite mercredi et en Égypte jeudi dans l’espoir de débloquer la situation.

«Selon la mesure la plus respectée en la matière, 100% de la population de Gaza est dans une situation d’insécurité alimentaire grave. C’est la première fois qu’une population entière est ainsi classée», a déclaré mardi le chef de la diplomatie américaine, citant des données de l’ONU, lors d’une conférence de presse aux Philippines où il est en visite officielle.

L’un des points d’achoppements des pourparlers est le statut des otages et l’identité des prisonniers palestiniens à libérer. Quelque 130 otages du 7 octobre sont encore détenus à Gaza, dont 32 seraient morts, selon Israël qui exige du Hamas une liste précise des otages encore vivants.

Or, le mouvement palestinien dit ignorer qui est «vivant ou mort» parmi les otages et demande de son côté de pouvoir décider de l’identité des principaux prisonniers palestiniens à être libérés.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est sous pression d’une part des familles d’otages, qui l’exhortent à accepter un accord, et d’autre part de membres d’extrême droite de son gouvernement, hostiles à la libération d’un grand nombre de prisonniers palestiniens.

Préparation d’une attaque sur Rafah

Dans un entretien téléphonique avec le président américain Joe Biden, Benjamin Netanyahu a réaffirmé lundi qu’il était déterminé à «atteindre tous les objectifs de la guerre», allusion à une opération militaire terrestre à Rafah, ville où s’entassent selon l’ONU près de 1,5 million de Palestiniens, pour la plupart des déplacés.

Une offensive terrestre majeure sur place serait «une erreur», a déclaré le conseiller à la sécurité nationale américain Jake Sullivan, en assurant qu’Israël ne lancerait pas d’opération avant la tenue, «dans les jours qui viennent», de discussions sur le sujet.

Le président Biden a demandé l’envoi à Washington d’une délégation israélienne pour discuter «des façons de cibler le Hamas sans mener une vaste offensive terrestre à Rafah», a-t- il écrit sur X (ex-Twitter), en disant souhaiter une pause de «plusieurs semaines dans les combats» dans le cadre d’un accord permettant de libérer les otages et d’accroitre «l’aide» à Gaza.

«Famine imminente»

La catastrophe humanitaire majeure provoquée par la guerre et la famine qui se précise chaque jour un peu plus dans le nord du territoire assiégé depuis 5 mois suscitent des inquiétudes grandissantes au sein de la communauté internationale.

Israël a imposé un siège total à la bande de Gaza depuis le début de la guerre et contrôle totalement l’entrée de l’aide humanitaire, qu’il laisse entrer au compte-gouttes. Cette aide arrive principalement depuis l’Égypte via Rafah, mais reste très insuffisante face aux besoins immenses de la population. Elle parvient très difficilement dans le nord, où vivent actuellement plus de 300.000 personnes selon l’ONU, à cause des destructions et des opérations militaires israéliennes.

Un habitant sur deux à Gaza, soit plus d’1,1 million de personnes, connaît une situation alimentaire «catastrophique», en particulier dans le nord, ont prévenu lundi des agences de l’ONU, le patron de l’Organisation mondiale de la Santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, évoquant une «famine imminente».

Gaza «était la plus grande prison à ciel ouvert», elle est devenue «le plus grand cimetière à ciel ouvert. Un cimetière pour des dizaines de milliers de personnes, mais aussi un cimetière pour certains des plus importants principes des lois humanitaires», a dénoncé le chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, ajoutant que «la famine (était) utilisée comme arme de guerre» par Israël.

L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.

En représailles, Israël pilonne depuis plus de 4 mois la bande de Gaza, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué plus de 31.700 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait près de 73.000 blessés, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.

En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 450 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le 7 octobre, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.

Le nord de Gaza a aussi été la cible de bombardements et de raids israéliens, autour et dans l’enceinte de l’hôpital Al Chifa, le plus important du territoire, situé au coeur de Gaza-Ville que de l’armée israélienne avait déjà pris d’assaut le 15 novembre avant de se retirer. Tôt mardi, le ministère de la santé du Hamas a fait état de 78 morts dans la soirée et la nuit à Gaza, incluant 15 personnes dans une résidence à Rafah.


Par Le360 (avec AFP)
Le 19/03/2024 à 09h06