Carlos Ghosn de nouveau arrêté à Tokyo pour abus de confiance aggravé

Un véhicule quitte le domicile de Carlos Ghosn à Tokyo, jeudi 4 avril 2019.

Un véhicule quitte le domicile de Carlos Ghosn à Tokyo, jeudi 4 avril 2019. . DR

Carlos Ghosn a de nouveau été interpellé jeudi matin à son domicile de Tokyo sur de nouveaux soupçons de malversations financières, un mois à peine après avoir été libéré sous caution, une arrestation qu'il a jugée "révoltante et arbitraire".

Le 04/04/2019 à 11h27

Les enquêteurs du bureau des procureurs se sont rendus au petit matin à son immeuble devant lequel une tenture grise avait été dressée, selon des images diffusées sur les chaînes de télévision japonaises.

Une voiture a quitté les lieux moins d'une heure plus tard, d'après le direct diffusé sur la chaîne Nippon TV. Selon le journaliste de cette télévision privée, Ghosn était à bord.Trois hommes en costume sombre et des dizaines de policiers montaient la garde, a constaté un journaliste de l'AFP.

Il est "extrêmement rare" qu'un suspect soit ré-arrêté après avoir été relâché, a souligné la NHK. "Pourquoi venir m'arrêter alors que je n'entravais en rien la procédure en cours, sinon pour me briser ?", a lancé le magnat de l'automobile déchu dans une déclaration transmise à l'AFP. Et d'ajouter: "Je suis innocent de toutes les accusations infondées portées contre moi et des faits qui me sont reprochés".

Son avocat Junichiro Hironaka s'est lui aussi insurgé contre de telles méthodes: "Nous ne comprenons pas pourquoi ils ont besoin de le placer en détention. (...) C'est extrêmement injuste".

Ce nouveau rebondissement dans un interminable feuilleton, qui s'est ouvert le 19 novembre avec l'arrestation surprise de celui qui était alors le tout-puissant PDG de l'alliance automobile Renault-Nissan-Mitsubishi Motors, intervient alors même qu'il avait décidé de prendre la parole pour la première fois depuis sa sortie de prison.

Ghosn, 65 ans, avait annoncé mercredi via Twitter, de façon impromptue, qu'il prévoyait une conférence de presse le 11 avril. "Je me tiens prêt à dire la vérité à propos de ce qui se passe. Conférence de presse jeudi 11 avril", avait-il écrit dans un court message sur un compte certifié, qui, selon une porte-parole, est administré par ses avocats.

Déjà sous le coup de trois inculpations pour déclarations inexactes de revenus sur les années 2010 à 2018, dans des documents remis par Nissan aux autorités financières, et pour abus de confiance, Ghosn avait été libéré le 6 mars moyennant le paiement d'une caution d'un milliard de yens (8 millions d'euros).

Il est à présent soupçonné d'avoir utilisé la réserve du PDG de Nissan pour des transferts d'argent de plus de 30 millions de dollars à un distributeur de véhicules Nissan à Oman, montants dont une partie lui serait revenue indirectement, selon une source proche du dossier. Il l'aurait notamment utilisé ces fonds pour acheter un yacht et investir dans une société dirigée par son fils aux Etats-Unis.

Des flux financiers similaires ont été signalés ces derniers jours par Renault à la justice française, à l'issue d'une enquête interne du constructeur. Le parquet de Nanterre (Hauts-de-Seine), qui avait déjà été saisi sur d'autres éléments, a ouvert une enquête sur le financement du mariage de Carlos Ghosn au château de Versailles en octobre 2016.

L'audit de la filiale commune de Renault et de son partenaire japonais Nissan, RNBV, basée aux Pays-Bas, a par ailleurs soulevé de "sérieux questionnements" quant à la conformité de plusieurs millions d'euros de dépenses, a annoncé mercredi Renault à l'issue d'un conseil d'administration.

Compte tenu du contexte et du fait que Ghosn a démissionné en janvier de la présidence de Renault alors qu'il était incarcéré au Japon, la marque au losange a décidé de priver son ancien patron de "retraite-chapeau" comme ancien membre du comité exécutif.

Le dirigeant franco-libanais-brésilien a également été révoqué de la présidence de Nissan, et une assemblée générale extraordinaire d'actionnaires devrait lundi révoquer son mandat d'administrateur, coupant tous ses liens avec l'entreprise qu'il a naguère sauvée de la faillite.

Le 04/04/2019 à 11h27