Algérie: après les rapports accablants de l’ONU sur les violations des droits humains, le Département d’Etat US épingle la junte

Vue extérieure du siège du Département d'État américain dans le quartier de Foggy Bottom à Washington, DC, le 15 avril 2025.. AFP or licensors

La mauvaise réputation de l’Algérie, surtout en matière de violations flagrantes et permanentes des droits humains, continue de susciter de vives dénonciations sur la scène internationale. Après une série de rapports accablants d’experts onusiens ayant constaté sur place de multiples abus, c’est désormais le Département d’État américain qui vient enfoncer le clou en accablant le régime algérien.

Le 26/08/2025 à 13h16

Alors que le régime algérien n’en rate pas une pour jouer au racolage diplomatique, allant même jusqu’à montrer, sans le moindre respect pour son «nif», qu’il est prêt à livrer son pays poings et pieds liés à l’administration américaine, afin, croit-il, de la faire revenir sur son soutien à la marocanité du Sahara, le Département d’État américain vient de signifier à ce régime qu’il est tout simplement infréquentable. En effet, dans son rapport annuel sur la situation des droits humains à travers le monde pour l’année 2024, il loge l’Algérie à la mauvaise enseigne. Comme d’habitude, ce pays est une nouvelle fois classé parmi les États faillis qui ne respectent rien, même pas leurs citoyens.

Dès le résumé introductif, présentant une vue globale, mais non exhaustive, sur la situation des droits humains en Algérie, le rapport du Département d’État américain dépeint un tableau noir de violations en tous genres, attribuées à l’un des régimes des plus répressifs du monde. Car ce dernier ne se maintient au pouvoir, depuis 1962, que par sa pratique des mêmes méthodes sanguinaires.

Le rapport précise ainsi qu’en Algérie, «des informations crédibles font état de disparitions; tortures et traitements cruels, inhumains ou dégradants; arrestations et détentions arbitraires; graves restrictions à la liberté d’expression et à la liberté des médias, notamment violences ou menaces de violence contre des journalistes, arrestations et poursuites injustifiées de journalistes, et censure; restrictions à la liberté de religion; traite des êtres humains, y compris le travail forcé; et violences ou menaces contre des militants syndicaux ou des syndicalistes».

Même si le rapport américain mentionne que pour la première fois depuis plusieurs dizaines d’années, aucun cas d’exécution extrajudiciaire n’a été enregistré en 2024 en Algérie, il a eu le mérite de faire remarquer qu’un citoyen algérien a échappé à la perpétuité, juste pour avoir rappelé un fait historique bien établi.

«Le 16 novembre (2024), les autorités ont arrêté l’écrivain français Boualem Sansal pour terrorisme, accusé d’«atteinte à l’intérêt national» et d’«atteinte à l’intégrité du territoire national», en vertu du Code pénal. Les accusations portaient sur des déclarations faites à un magazine français, dans lesquelles il évoquait des questions frontalières historiques entre l’Algérie et le Maroc. Cette accusation, considérée comme un acte de «terrorisme» par le Code pénal, était passible de la réclusion à perpétuité», écrit le rapport.

Même si ce rapport a passé sous silence de nombreux cas de violations des droits humains – comme l’interdiction faite à des millions d’Algériens de quitter leur pays – il a néanmoins retenu, à titre emblématique, l’affaire de la journaliste Amira Bouraoui. Celle-ci illustre l’acharnement du pouvoir algérien contre les médias et, plus largement, contre la presse indépendante.

Ainsi, selon le rapport américain, «Mustapha Bendjama, ancien rédacteur en chef du journal indépendant ‘Le Provincial’, basé à Annaba» a fait l’objet de deux poursuites pénales. «La première pour avoir prétendument aidé la journaliste Amira Bouraoui à fuir en France et pour avoir fondé une organisation criminelle. Dans la seconde affaire, il a été reconnu coupable de réception de fonds étrangers préjudiciables à l’intérêt national et de diffusion d’informations classifiées visant à porter atteinte aux institutions de l’État, d’espionnage et d’appartenance à un groupe terroriste».

Le rapport ajoute, que le 14 avril 2024, le journaliste algérien, Farid Allilat a été empêché d’entrer en Algérie et refoulé dès son arrivée à Alger vers Paris sans la moindre justification légale ni de sa détention à l’aéroport d’Alger, ni de son expulsion vers la France.

Si des millions d’Algériens sont retenus contre leur gré dans une prison à ciel ouvert de crainte qu’ils aillent grossir les rangs de la très active opposition de l’extérieur, cette dernière a également fait l’objet de vives inquiétudes américaines à cause des nombreux cas de «répression transnationale», c’est-à-dire les tentatives d’enlèvements et/ou d’assassinat dont ont été victimes plusieurs opposants algériens établis à l’étranger. Quelque 24 crimes transnationaux ont été imputés, en effet, au régime algérien entre 2020 et 2024.

Le rapport évoque brièvement des actes antisémites visant la communauté juive, pourtant très minoritaire en Algérie, ainsi que des exactions dirigées contre des militants amazighs.

Alors que ce rapport a quasiment été entièrement consacré à la répression implacable dirigée surtout contre la liberté d’expression en général et contre les journalistes en particulier, les médias locaux n’ont pas osé y consacrer une seule ligne. Ils se sont plutôt rabattus sur une réaction officielle indirecte à ce rapport. Il s’agit d’un décret présidentiel, publié au Journal officiel, et qui annonce que l’Algérie lève définitivement toutes ses réserves sur la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). Pour justifier cette mesure-surprise, l’agence de presse algérienne (APS) a écrit, ce lundi, que des «groupes hostiles à l’Algérie» ont profité de la persistance des réserves algériennes sur l’article 15-4 de la CEDAW pour «promouvoir auprès des organisations de défense des droits humains l’idée que notre pays maintient une discrimination entre les hommes et les femmes en matière de droit de circulation et de logement».

Par Mohammed Ould Boah
Le 26/08/2025 à 13h16