Le Projet de loi de finances (PLF) 2024 se veut audacieux, prenant le pari de renouer avec la croissance et d’inaugurer une nouvelle ère pour le Maroc. Aux côtés d’un ambitieux chantier social, d’importants investissements dans les infrastructures et les secteurs porteurs de l’économie nationale sont prévus dès l’année prochaine.
L’effort d’investissement global du secteur public s’élève ainsi à 335 milliards de dirhams (MMDH) dans le cadre du PLF 2024. Cette enveloppe est répartie notamment entre le Fonds Mohammed VI pour l’investissement (45 MMDH) et le Budget général, les comptes spéciaux du Trésor (CST) et les services d’État gérés de manière autonome (SEGMA), en neutralisant les transferts du Budget général vers les établissements et entreprises publics (EEP), les CST et les SEGMA (103 MMDH).
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Pour Ahmed Azirar, économiste et directeur de recherche à l’Institut marocain d’intelligence stratégique (IMIS), le recours à l’endettement est inévitable pour mobiliser les ressources financières nécessaires au financement des projets programmés pour l’année prochaine.
Globalement, cet économiste estime que la dette au Maroc reste «fiable», ce qui laisse au royaume d’importantes marges de manœuvre. Cela est dû en grande partie à la prédominance de la dette intérieure, qui permet au pays de s’appuyer sur ses ressources nationales pour répondre à ses besoins financiers, sans dépendre excessivement des marchés internationaux.
En 2022, la dette du Trésor a augmenté de 7,5% par rapport à l’année précédente, pour s’établir à 951,8 MMDH, atteignant ainsi 71,5% du PIB national. Cette dette se compose à hauteur de 24% de dette extérieure et de 76% de dette intérieure.
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Ainsi, l’encours de la dette intérieure s’est établi à 722,9 MMDH à fin 2022, en hausse de 6,1% par rapport à 2021, et celui de la dette extérieure s’est élevé à 228,9 MMDH, en hausse de 12,3% par rapport à l’année précédente.
Un endettement productif
Cependant, notre interlocuteur insiste sur le besoin d’orienter l’endettement vers des investissements productifs, et pas seulement dans l’infrastructure, au risque de déstabiliser les équilibres macro-économiques. «Le Maroc bénéficie d’une bonne réputation sur le marché international, mais il faut rester vigilant, car on ne peut pas s’endetter à l’infini. Il est impératif de maintenir les équilibres macro-économiques», souligne-t-il.
«Il est essentiel que la dette contractée serve à stimuler l’économie nationale et à créer de la valeur et des emplois à long terme. Il ne faut surtout pas s’endetter pour rembourser une dette antérieure (…). Durant les années 90, plusieurs pays ont investi excessivement dans des infrastructures non productives, notamment sportives, et cela n’a fait que creuser leur déficit budgétaire», précise-t-il.
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Afin de prévenir tout déséquilibre entre les investissements productifs et les infrastructures, le Maroc doit également encourager les exportations. D’après Ahmed Azirar, les revenus en devises provenant de l’exportation peuvent contribuer à stabiliser la dette extérieure et à maintenir les équilibres macro-économiques. Ainsi, «des secteurs comme l’agroalimentaire et l’électronique doivent être accompagnés et boostés au même niveau que le secteur automobile ou celui des phosphates et dérivés».
Pour financer les ambitieux projets économiques et sociaux du Maroc, Ahmed Azirar suggère plusieurs leviers, outre la dette. Les fonds souverains, les partenariats public-privé et les investissements étrangers sont autant de ressources potentielles pour soutenir le développement économique et social du pays.