Ayoub El Aiassi est metteur en scène et préside l’association Compétences marocaines. Après avoir réalisé la fresque historique «Ard Allah» qui a réuni jusqu’à 70 comédiens, il planche actuellement sur un nouveau projet tout aussi engageant.
Il s’agit de la pièce «Le rocher des amoureux» où une comédienne pose des questions au robot Chat GPT. Une œuvre théâtrale où l’intelligence artificielle est mise à rude épreuve et à travers laquelle Ayoub El Aiassi donne son point de vue sur les avancées technologiques et leur rapport à l’art. Il a bien accepté d’en parler exclusivement pour Le360.
Le360: vous avez réalisé une fresque historique intitulée «Ard Allah» qui sera bientôt diffusée à la télévision. Comment cette pièce est-elle née?
Ayoub El Aiassi: «Ard Allah» raconte l’histoire du Maroc depuis la Maurétanie Tangitane à travers des tableaux jusqu’au règne du roi Mohammed VI, en passant par différentes périodes à savoir celles de Youssef Ibnou Tachfine, Mansour Eddahbi ou la résistance à l’époque du protectorat. La pièce relate l’histoire de jeunes qui, pendant la période de la Covid ont des discussions sur l’histoire, font des recherches et découvrent l’histoire de Ptolémée qui parait-il a gouverné à Rome, à la place de l’empereur romain Caligula lorsqu’il est devenu un peu fou.
Il y a ceux qui disent qu’il a carrément gouverné et d’autres qui disent qu’il a été invité par Caligula, son cousin, à le faire. Toute cette fierté du gouvernant et du peuple libre est mise en scène dans cette pièce.
Vous dites prôner le théâtre de l’écart. De quoi s’agit-il précisément?
Étant quelqu’un qui prône le théâtre de l’écart, j’essaie de formuler une manière marocaine, et qui est la mienne, pour une réflexion sur le théâtre post-moderne tout en faisant appel aux nouvelles technologies avec l’intelligence artificielle entre autres, mais dans un contexte marocain, un contexte de théâtre qui a débuté sous forme préthéâtrale et qui a accompagné la réflexion artistique et littéraire au Maroc. Tout autant que l’art plastique, le cinéma ou la littérature, le théâtre est face à une évolution technologique. Comment cette réflexion peut se faire dans un contexte marocain? C’est cela le théâtre de l’écart. Mais ce type de théâtre, je le pratique davantage dans des pièces de théâtre au format réduit avec 5 ou 6 comédiens avec des thématiques marocaines.
«Les spécialistes de l’intelligence artificielle vont dire que si vous ne domptez pas le robot, il va rien vous donner.»
— Ayoub El Aissai, metteur en scène
Actuellement vous êtes sur un nouveau projet nommé «Le rocher des amoureux» où vous faites intervenir l’intelligence artificielle.
Je vous rassure, cette pièce je ne l’ai pas écrite et je ne l’écrirai pas en intelligence artificielle, c’est mon point de vue. Je pense que l’intelligence artificielle pour quelqu’un qui veut gagner du temps, cela peut être intéressant. Par exemple pour «Ard Allah» il fallait parcourir plusieurs ouvrages pour des recherches, collaborer avec des spécialistes de l’histoire comme la grande romancière et professeur d’histoire Malika Retnane pour ne citer qu’elle. Et aussi, en ce qui concerne le zajal, la poésie, j’ai travaillé avec le grand poète marocain Mourad El Kadiri. Il y a donc eu un travail de collaboration avec les humains...
Concrètement à quoi va ressembler «Le rocher des amoureux » où l’intelligence artificielle semble jouer un rôle central?
On raconte l’histoire à travers une jeune adolescente qui parle au robot, à Chat GPT, et qui lui pose des questions. Les spécialistes de l’intelligence artificielle vont dire que si vous ne domptez pas le robot, il ne va rien vous donner. Aujourd’hui, dans le secteur de la médecine, de l’industrie, il y a une précision de diagnostic chez Chat GPT qui est aussi importante si ce n’est plus importante que l’intelligence humaine.
Une jeune adolescente pose des questions à ce robot qu’on voit sur scène. Nous avons du mapping, des hologrammes... Elle lui pose des questions au fil de la pièce sur la musique andalouse qui est le registre sur lequel on travaille. On veut rendre hommage au patrimoine de la musique andalouse, marocaine et à chaque fois il refuse de lui fournir des réponses précises et, mine de rien, il lui explique qu’on a besoin de deux «mobssitine» détenteurs de la culture de l’oralité, car ce patrimoine n’est transmis qu’à travers l’oralité.








