Au-delà de la mort, l’humanité

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ChroniqueDu drame vécu par cette famille a jailli un sentiment d’humanité que nous avions presque oublié. Un peu comme si à mesure que ces mains creusaient la terre et la roche pour sauver une vie, étaient déterrés en même temps les bons sentiments dont sont capables les hommes.

Le 06/02/2022 à 13h10

Nous sommes si peu de choses et pourtant, nous pouvons en accomplir de si grandes… Si l’on devait résumer les derniers jours qui viennent de s’écouler, depuis ce funeste mardi où le petit Rayan est tombé dans un puits, cela tiendrait en ces quelques mots.

Notre douleur à tous est vive ce dimanche matin, notre esprit encore embrouillé par le trop plein d’émotions de la veille et des jours qui ont précédé. L’espoir, l’angoisse de l’attente, le déni, la colère… Nous avons vécu ce drame comme les membres d’une même famille, car ce petit garçon était devenu notre petit garçon à tous. Nous portons tous son deuil et nous compatissons, comme un seul cœur, à la douleur de ses parents et de ses proches.

Aujourd’hui, il n’est plus là mais ce qu’il a accompli, malgré lui, relève de l’extraordinaire et perdura si toutefois nous prenons soin de nous en souvenir. Du drame vécu par cette famille a jailli un sentiment d’humanité que nous avions presque oublié. Un peu comme si à mesure que ces pelleteuses déchiraient la terre, que ces mains creusaient la roche, pour sauver une vie, étaient déterrés en même temps les bons sentiments dont sont capables les hommes.

Dans toute cette souffrance, l’élan de solidarité qui a uni tous les Marocains sans exception était d’une beauté extraordinaire. Quel dommage que cette noblesse n’apparaisse que dans de pareilles circonstances. Faut-il qu’elle soit rare pour qu’on en prenne conscience?

Rayan n’est plus, par un tragique concours de circonstances, et si toutes les prières du monde n’ont pas suffi à le maintenir sur cette terre, sa mort ne saurait rester vaine. Car oublier ce que nous venons de vivre, oublier l’humanité qui nous a tous uni, la fraternité entre les hommes et les pays qui a ressurgi en faisant abstraction des tensions politiques, des luttes absurdes de pouvoir, des races et des religions… Ce serait tuer à nouveau ce petit garçon.

Le meilleur moyen de rendre hommage à ce petit être est de prendre conscience du symbole qu’il incarne désormais, celui de la préciosité de l’amour des hommes. A travers lui, Dieu, l’univers, le karma, ou peu importe ce en quoi l’on croit, nous a rappelé à quel point le fait de donner le meilleur de nous-mêmes aux autres, sans rien attendre en retour, est la chose la plus importante qui soit. La seule qui fasse sens. Les équipes qui se sont relayées jour et nuit pour tenter d’extirper Rayan des profondeurs de la montagne en sont les exemples vivants. A ces héros qui ont tenté l’impossible, qui nous ont émus aux larmes, nous rendons tous hommage aujourd’hui. Leur courage, leur abnégation, leur témérité, leur foi ont été contagieuses et nous ont rendu tellement fiers.

Et que dire de ces familles démunies qui se sont relayées pour offrir des repas, des couvertures aux personnes venues aider. Quelle leçon pour nous autres privilégiés qui suivions le déroulement de ce drame dans le confort de notre modernité.

Aujourd’hui, nous avons perdu un être cher mais nous devons en ressortir grandis et fiers. Fiers de ce qui a été accompli par les Marocains et le Maroc, pour sauver la vie de Rayan, et fiers de faire partie d’un peuple qui a œuvré et prié à l’unisson pour une cause qui en valait la peine.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 06/02/2022 à 13h10