RÉTRO 2017. Jbel Irhoud: les premiers Homo sapiens sont Marocains

Un Homo sapiens découvert dans la grotte de Jebel Irhoud, au Maroc.

Un Homo sapiens découvert dans la grotte de Jebel Irhoud, au Maroc. . DR

Le premier Homo sapiens est Marocain et date de 300 000 ans. Cette découverte exceptionnelle, révélée le 7 juin 2017 et publiée dans la revue scientifique "Nature", remet en question nos connaissances sur le plus ancien représentant de l'espèce humaine.

Le 24/12/2017 à 11h49

Le 7 juin dernier, le Maroc devient le nouveau berceau de l’Humanité. Cette excellente nouvelle est liée à la découverte au Maroc des plus anciens restes au monde d’Homo sapiens, le plus ancien représentant connu de notre espèce, vieux de 315 000 ans.

C'est à Jbel Irhoud, dans la région de Safi, à 400 km au sud de Rabat qu'a eu lieu cette découverte. Ce site est bien connu des archéologues puisqu’en 1968 déja, il avait livré le fossile d’un enfant Homo sapiens, appelé Irhoud 3, initialement daté de 40.000 ans puis de 160.000 ans.

Cette datation n'avait pas convaincu tous les chercheurs. Jean-Jacques Hublin et son ancien collègue du laboratoire d’anthropologie de Bordeaux, Abdelouahed Ben-Ncer, avaient décidé d'engager de nouvelles fouilles en 2004, qui aboutiront en 2017 à cette mise à jour. Leurs découvertes ont fait l’objet de deux études distinctes qui ont été publiées en Une de la célèbre revue scientifique Nature.

L’institut Leipzig, dont fait partie Jean-Jacques Hublin, a pu financer l’enlèvement de 200 mètres cubes de blocs de pierre pour dégager le site et assurer les datations. C'est ce qui coûte le plus cher en archéologie selon le binôme de paléontologues. La chance sera au rendez-vous: à trois mètres d’épaisseurs de dépôts anciens et préservés, seront exhumés année après année seize ossements humains supplémentaires. Au total, cinq individus, dont un adolescent et un enfant de 7 à 8 ans.

De nombreux éclats de silex brûlés permettront d’établir des datations par thermoluminescence, un phénomène physique lié à la capacité de certains cristaux d’accumuler l’énergie cédée par les rayonnements ionisants issus de la radioactivité et de restituer cette énergie sous forme de lumière lorsqu’ils sont chauffés.

La datation de ces fossiles a été obtenue par Daniel Richter, expert en géochronologie au même Institut de Leipzig. Les hommes de Jbel Irhoud détrônent Omo I et Omo II découverts à Omo Kibish en Ethiopie et datés de 195.000 ans. Un peu plus tôt, en Ethiopie toujours, trois crânes fossilisés vieux d’environ 160.000 ans avaient été découverts près du village de Herto, en pays Afar.

(Abdelouahed Ben-Ncer joint par le360)Ces découvertes, toutes réalisées dans la même région, laissaient penser que les hommes descendaient d’une population qui vivait en Afrique de l’Est, «un jardin d’Eden». Cette théorie a été remise en cause par les découvertes de Jbel Irhoud au Maroc.

Le site de Jbel Irhoud "marque un nouveau jalon dans l’histoire humaine la plus récente à une époque où plusieurs espèces apparentées coexistent sur la planète –Néandertaliens en Europe, Dénisoviens et Homo erectus en Asie, Florès en Indonésie".

Abdelouahed Ben-Ncer, co-auteur de la découverte, conseille par ailleurs de garder la tête froide. «Quand on jette un coup d’œil sur les différents fossiles dont nous disposons à l’échelle du continent, nous trouvons d’autres restes venant d’Afrique du Sud et âgés de 260.000 ans. Avec notre découverte, dont les fossiles remontent à 300 000 ans, l’interprétation de ce fragment a évolué et par conséquent, les restes de Jbel Irhoud et les restes trouvés en Afrique du Sud correspondent à la première phase d’évolution de l’Homo sapiens».

Le Maroc est donc le nouveau berceau de l’Humanité jusqu'à preuve du contraire. Car le site de Jbel Irhoud, entouré de mines, un "site martyr" pour reprendre les propos de Abdelouahed Ben-Ncer, a toujours été généreux. 

Par Qods Chabaa
Le 24/12/2017 à 11h49