Papier d'angle. Comment les coopératives installent la justice sociale au Maroc

Portrait d'une jeune femme en parure traditionnelle amazighe (photographie d'illustration).

Portrait d'une jeune femme en parure traditionnelle amazighe (photographie d'illustration). . DR

Pertinence, efficacité, richesse (mais aussi) valeurs partagées. Les coopératives deviennent de vrais leviers d'émancipation, notamment pour les femmes, de dignité pour ceux qui n'ont rien mais qui la prouvent, et d'élévation, quand les outils manquent. Et ça se passe au Maroc. Voici comment.

Le 07/07/2018 à 13h23

Les coopératives, qui célèbrent leur journée internationale chaque premier samedi du mois de juillet, continuent de prouver leur pertinence en tant que levier de promotion de la justice sociale et de développement humain à travers la création de l'emploi, la réduction des inégalités de revenus et la valorisation des compétences locales.

Instituée en 1929 en Italie par l'Alliance Coopérative Internationale (ACI), qui rassemble plus de 800 millions de coopérateurs issus de 101 pays dont le Maroc, cette journée vise à faire connaître le modèle coopératif, souligner ses acquis, partager ses principes et renforcer l’esprit de solidarité et de coopération entre les coopératives des différents pays. A partir de 1996, cette manifestation est célébrée également sous l’égide des Nations Unies.

Dans un contexte marqué par des inégalités sociales croissantes dans le monde, le mouvement coopératif international a choisi cette année le slogan "Coopérer pour une société durable", pour illustrer comment, grâce aux valeurs et aux structures de gouvernance qui leurs sont propres, les coopératives peuvent être érigées en modèle économique et social résilient et équitable partout dans le monde.

Basées sur les principes de l’entraide, de la responsabilité, de l’égalité et de solidarité, ces entités affichent un bilan prometteur au Maroc. Cette journée constitue ainsi une occasion pour le mouvement coopératif national de mettre en relief ses acquis, de détecter ses contraintes et de définir ses perspectives d’avenir.

L'esprit coopératif a toujours fait partie de la culture et des traditions marocaines à travers des formes d’entraide et de solidarité familiale et communautaire. Il s'inscrit parfaitement, aussi, dans la lignée des efforts déployés pour promouvoir ce secteur via la mise en place de programmes nationaux adaptés et l’adoption de nouvelles lois favorisant la création et le développement de ce genre d’entités génératrices de revenus.

L’arsenal juridique relatif aux coopératives a été complété par la promulgation de la loi n °112.12, relative aux coopératives, qui témoigne de la volonté des pouvoirs publics de promouvoir ce secteur en lui procurant plus d’indépendance et en exigeant une bonne gouvernance. Le projet de loi n°74.16 modifiant la loi n°112.12 est venu aussi pour promouvoir et appuyer ce secteur.

Le secteur coopératif a réalisé ainsi des avancées considérables, et a contribué largement à la création de richesses et à la lutte contre la pauvreté. Grâce au soutien apporté à ce secteur, le pays a enregistré jusqu’en 2017 près de 16.000 coopératives actives, dont 2.200 créées par des femmes et 370 par des jeunes, selon des chiffres du secrétariat d’Etat chargé de l’Artisanat et de l’économie sociale.

A côté des domaines d'activité traditionnels tels que l’agriculture, l’artisanat et le logement, les coopératives explorent désormais d’autres champs porteurs d'une plus grande valeur ajoutée à l’instar des plantes médicinales, l’huile d’argan, l’Aloevera, ainsi que la commercialisation électronique, les services domestiques et le recyclage.

Mais malgré la dynamique qu’il a connue durant les dernières années, ce secteur a besoin de davantage d’efforts pour contourner certains obstacles relatifs en particulier au volet organisationnel et de gestion, dus au manque de moyens pour recruter des ressources humaines qualifiées.

Par ailleurs, les coopératives en phase de démarrage sont confrontées à une multitude de difficultés qui entravent leur développement. Il s'agit essentiellement de manque de stratégie et moyens de commercialisation, l'ignorance des besoins des marchés, la faiblesse des compétences managériales et techniques et les difficultés d'accès au financement.

Afin d'aider les coopératives les plus vulnérables, notamment celles nouvellement créer, à dépasser ces contraintes et mieux accompagner la dynamique économique et sociale amorcée dans le pays, un programme baptisé "Mourafaka" a été lancé par le ministère de tutelle dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie de promotion de l’économie sociale 2010-2020.

Ce programme d'accompagnement post création traduit une ambition forte d’œuvrer pour l’émergence d’une nouvelle génération de coopératives performantes et innovantes, capables de faire face aux défis du marché, avec de forts impacts économiques et sociaux sur les coopérants et leurs familles.

Il est destiné aux coopératives nouvellement créées sur l’ensemble du territoire national, ayant moins de deux années d’existence juridique, et au moins une année d’activité. Il cible l’accompagnement un total global de 2.000 coopératives sur la durée du programme.

Les axes majeurs de ce programme concernent l’amélioration de la gouvernance et l’organisation interne des coopératives, la maîtrise des techniques modernes de gestion d’entreprises, l’optimisation des procédés et la modernisation des outils et techniques de production et l’adaptation des produits aux exigences du marché et le ciblage de nouveaux segments de marchés.

Toutefois, si les efforts déployés par les pouvoirs publics pour promouvoir le secteur coopératif au Maroc sont significatifs, ils demeurent insuffisants en l'absence d'une mobilisation de toutes les parties concernées, que ce soit à l'échelle nationale, régionale ou locale.

Par Ilias Khalafi (MAP)
Le 07/07/2018 à 13h23