Imsouane, aux pieds de l’Atlas, village de pêcheurs, paradis du surf. 82 km au nord d’Agadir et 109 km au sud d’Essaouira, entre océan et montagnes.
On quitte la route principale pour une route sinueuse, bordée d’arganiers. Une immense étendue de mer turquoise, à perte de vue, ourlée de sable doré qui scintille sous le soleil et d’immenses falaises ocre.
Imsouane est en région amazighe. Son nom serait une composition amazighe de imi, «bouche», car le port a la forme de la bouche, et issouane, «bien mouillé». Certains disent: «la bouche où s’engouffre la mer». Ce village existerait depuis les Phéniciens, mais je n’ai aucune référence historique.
Plus de 10.000 habitants. Des touristes très nombreux toute l’année.
La température est toujours supérieure à 15 degrés. Même en hiver, on se baigne dans une eau cristalline.
La pêche à la ligne est l’une des activités majeures. Sur le sable, des dizaines de barques bleues forment un magnifique tableau.
La meilleure période pour y surfer est de novembre à avril car les houles sont les plus fortes. Mais toute l’année est favorable. En juillet et août, on voit surtout des touristes nationaux.
Des conditions de surf exceptionnelles avec 3 spots légendaires, célèbres mondialement. La Cathédrale, célèbre par sa vague pouvant attendre 300 mètres de longueur, où les surfeurs confirmés réalisent de très belles manœuvres. Le Reef Spot offre des vagues plus rapides. La Baie, idéale pour les longboards. Trois minutes de glisse sur sa vague longue de plus de 600 mètres, une des plus longues d’Afrique. Les surfeurs viennent du monde entier, même d’Australie, haut lieu du surf.
Les montagnes invitent à des randonnées avec des vues panoramiques fantastiques sur l’océan.
Dans les restaurants aux locaux rudimentaires, une gastronomie à prix très abordable. Poissons et fruits de mer du jour, fournis par les pêcheurs. Il y a d’importantes richesses halieutiques. Une soixantaine d’espèces de poisson et de crustacés: langouste, homard, poulpe, sar, sole, congre, calamars… La baie est un lieu où frayent les poulpes et différentes espèces de poissons.
Cette richesse a attiré de nombreux pêcheurs qui vivaient dans des cabanes insalubres. En 1995, une coopérative a été créée pour développer la pêche maritime traditionnelle. En 1998, l’Agence japonaise de coopération internationale a construit pour les pêcheurs près de 100 magasins de stockage, un local pour la coopérative, un dépôt de carburant…
Plus le site devenait célèbre, plus des familles et des marins s’installaient dans des bâtiments souvent insalubres. Ce qui a fait d’Imsouane un site pittoresque, où les séjours sont à bas prix. Mais les conditions d’hygiène étaient lamentables: espaces infestés d’excréments et d’urine, et on se bouchait le nez pour emprunter le passage menant à la Baie. Ce n’est plus le cas depuis un moment.
Des maisons, restaurants et kiosques ont été construits en bord de mer, en dur ou en meulière, dans le domaine public maritime, sans autorisation. Certains commerces et familles y sont installés depuis des décennies, paisiblement.
Mais une rumeur de destruction des locaux non règlementaires circule depuis une année. Le 18 janvier dernier au matin, les bulldozers sont passés. La population dit avoir été avisée seulement 24 ou 48 heures à l’avance. À ce jour, les ruines sont encore entassées, comme après un séisme.
Certains locaux ayant des contrats de location auraient été détruits. Les destructions ont eu lieu en haute saison de surf, en présence de surfeurs étrangers. Leurs vidéos ont fait le tour du monde, dénonçant une injustice. Des chaînes de télévision françaises s’en sont mêlées, comme si en France on pouvait installer un kiosque sans autorisation! Une pétition a regroupé plus de 20.000 signataires à travers le monde.
Certains habitants disent détenir des papiers qui justifient l’appartenance des maisons à leurs familles depuis le 19ème siècle. Des maisons ont été sauvées quand leurs occupants ont présenté des pièces justificatives.
On dénonce aussi la destruction d’un patrimoine composé de troglodytes et même l’atteinte à la culture amazighe.
On m’a rapporté qu’un restaurateur ayant construit, depuis des années, son local sur le front de mer a résisté à la destruction. On lui a donné le choix entre la destruction ou payer ses impôts et la location du terrain. La somme aurait été tellement élevée qu’il a cédé à la destruction.
Un plan d’aménagement est établi par la Société de développement régional du tourisme de Souss-Massa: plus de 20 hectares du domaine public de l’État seront aménagés en une trentaine de projets touristiques destinés aux petits et moyens investisseurs. Les travaux débuteront début 2024, selon la presse.
En démolissant de nombreux sites sur les côtes marocaines, l’État veut stopper l’anarchie qui a régné depuis des décennies avec la complicité des élus et de membres des autorités locales. C’est louable. Mais que vont devenir les dizaines de familles qui ont perdu leur toit et leur source de revenus et qui, du jour au lendemain, tombent dans une extrême précarité? Vont-ils avoir des facilités pour bénéficier des nouveaux projets?
J’espère que ce nettoyage de la part de l’État va concerner tous les domaines!
Imsouane. Une beauté exceptionnelle, une biodiversité, un climat doux en toutes saisons. Une merveille écologique. Classée par le magazine Forbes 10ème sur les 27 plus belles plages au monde.
J’espère que ce joyau se modernisera, sans perdre sa touche pittoresque et sans préjudice pour la population qui a fait son authenticité et sa culture.