Ourika, vendredi 6 janvier 2023 à 18h15. Le long du creux d’un des plus importants affluents de l'oued Tensift, des ouvriers s’activent autour d’une grue mobile sur un chantier de construction à ciel ouvert. À quelques mètres de là, un flux incessant de personnes s’improvise un passage pour rejoindre l’autre rive du fleuve. Plus agiles, les conducteurs de deux-roues se frayent un chemin sur un sol mi-rocailleux sujet à l'érosion.
Depuis la démolition de l’ancien pont reliant Ourika à son arrière-pays, le nouveau tant attendu par les habitants, dont l’enveloppe initiale est estimée à 27 millions de dirhams, tarde à voir le jour. Devenu un vaste champ de ruines, le chantier paralyse des pans entiers de l'économie locale.
De l’avis des commerçants de Tnine Ourika, qui subissent de plein fouet des perturbations dans leur activité en raison des nuisances liées au chantier (bruit, poussière, circulation perturbée...), les habitants prennent un gros risque en tentant de traverser ce fleuve large d’une dizaine de mètres: «À l’aube, à la tombée de la nuit ou lorsque les conditions météorologiques annoncent des averses, il faut être fou pour traverser seul ici», fulmine Youssef, un commerçant natif de la région.
Lassés par la durée des travaux qui s'étaleront encore jusqu'au printemps minimum (durée totale estimée à 18 mois), les habitants d'Ourika ne cachent pas leur désespoir face à ces nuisances et aux perturbations sur leur quotidien. Selon un habitant du douar, «la ligne du bus 25 ne dessert plus la moitié de la commune» et «les personnes âgées se voient obligées de parcourir des kilomètres à pied alors qu'il y a un pont de déviation».
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Les populations s'inquiètent non seulement du respect ou non des délais de livraison, mais aussi et surtout des conditions de sécurité autour de ce chantier. En effet, l'absence d'éclairage autour du site de reconstruction du pont est une source d'insécurité chronique pour les enfants et les femmes non accompagnés, en particulier le soir.
Les habitants du quartier ont exprimé leur inquiétude face à cette situation qui les empêche de se déplacer en toute sécurité aux alentours du chantier. Malgré plusieurs demandes pour l'installation de projecteurs de sécurité, le problème persiste.
Très peu sollicitée par les touristes attirés par les nombreuses activités qu’offre la vallée montagneuse du Haut Atlas, cette localité, qui regroupe plusieurs douars relevant d'Ourika, demeure néanmoins un important point de négoce où se tient tous les lundis un souk traditionnel.