En ce qui concerne le nécessaire respect de certaines règles inhérentes à la déontologie journalistique, le Conseil national de la presse marocaine inflige une belle leçon à son pendant français.
Selon Assabah de ce jeudi 12 octobre, cette plainte marocaine faisait suite à des publications parues dans deux médias français, le quotidien Libération, et l’hebdomadaire Charlie Hebdo, qui ont failli à des règles pourtant fondamentales dans la pratique de leur métier de journalistes, lors de la couverture qu’ils ont effectuée du séisme d’Al Haouz survenu le 8 septembre 2023.
Dans un communiqué, le CNP explique avoir reçu 24 heures plus tard une réponse à deux plaintes qu’il avait déposées auprès du CDJM à l’encontre de ces deux organes de presse.
Le CNP s’étonne non seulement du fait que ses deux plaintes aient été rejetées, mais aussi de la démarche se voulant journalistique qui a été adoptée par les deux médias qu’il a incriminés.
Dans ses deux plaintes déposées auprès du CDJM, le CNP établit le fait que Charlie Hebdo a publié une caricature appelant à ne pas se solidariser avec les victimes du séisme et à ne leur apporter aucune contribution matérielle.
Un «dessin» inacceptable, contraire à de simples valeurs humaines, et qui porte aussi atteinte à un principe qui devrait, pourtant, aller de soi: le fait de se solidariser avec les victimes de catastrophes naturelles. Le CNP a également tenu à préciser que dans de pareilles circonstances, la priorité devrait être accordée aux secours et au soutien des victimes, au-delà de tout différend diplomatique et de toute considération politique.
En ce qui concerne Libération, un quotidien français d’obédience de gauche, né après la Seconde guerre mondiale, sa rédaction a cru utile de publier, en Une, la photographie d’une femme, victime du séisme du 8 septembre dernier, avec ce titre trompeur et mensonger: «aidez-nous, nous mourons en silence».
Vérifications effectuées, sur la base de contenus largement partagés sur les réseaux sociaux, le CNP a pu établir que cette photographie et le titre choisi par Libération ne reflètent en rien une quelconque réalité qui aurait pu être constatée sur le terrain, dans les lieux de ce drame humain.
Cette Une, souligne le CNP, porte un sérieux coup à la crédibilité du travail journalistique et au professionnalisme qui doivent être strictement observés dans le traitement d’affaires impactant des êtres humains, tout particulièrement dans la couverture qui pourrait être effectuée pour ce genre de catastrophes naturelles.
Ces considérations, le pendant français du CNP, le CDJM, n’a pas jugé utile de les prendre en considération. Dans sa réponse extrêmement diligente, le régulateur français de médias de ce pays a cru bon d’asséner que ce que ces deux titres de presse ont commis relève d’un «choix éditorial».
«Un choix éditorial»? Au CNP, à la réception de cette réponse rapidement fournie, on s’est interrogé: en quoi «un choix éditorial» exempterait-il des journalistes de la nécessaire obligation de respecter la déontologie de leur métier?
De ce fait, explique-t-on au CNP, cet alibi brandi, celui d’un «choix éditorial» n’est dans ce cas qu’une fuite en avant, de même qu’une tentative de ces deux médias de se désengager de leur responsabilité.
Dans ce cas, poursuit-on au CNP, l’ensemble des médias du monde entier pourraient invoquer un «choix éditorial» ou une «liberté éditoriale» pour se soustraire à de fondamentales règles déontologiques, et donc à ce qui relève de règles basiques, nécessaires à l’exercice de cette profession, telles que doivent les admettre et les mettre en pratique des journalistes sérieux, rigoureux et professionnels.
On ne peut donc se prévaloir d’un quelconque «choix éditorial», explique-t-on au CNP, pour faire de la désinformation éhontée, mentir à ses lecteurs, ou encore inciter des humains à ne pas venir en aide à d’autres humains, quant à eux victimes d’une catastrophe naturelle.
Tous ces arguments, le CDJM, visiblement, s’en balance. Selon cet organe de régulation des médias français, le titre en Une choisi par Libération «a été largement utilisé sur WhatsApp».
Et le CNP de s’interroger encore: dans ce cas, est-il logique que ce réseau social devienne une source d’information fiable, qui permette à des journalistes (chevronnés, professionnels, cohérents, rigoureux, sûrs d’eux, etc.) d’émettre des jugements de valeur aussi assurés à propos de cette catastrophe naturelle?