La séquence qui vient de se clore aux Nations Unies sur la question du Sahara marocain est véritablement historique, au sens noble de l’histoire. Les scènes de liesse qui ont embrasé la plupart des villes du Royaume et électrisé de fierté sa diaspora traduisent cette grande césure historique, ce bond en avant, cette accélération décisive. Et pourtant, le Maroc a le triomphe modeste: le discours royal, qui a célébré avec une immense charge symbolique ce tournant politique, a maintenu la main tendue de la réconciliation et offert aux autorités algériennes la possibilité de monter dignement dans le train de l’histoire.
Le Royaume aurait pourtant toutes les raisons de laisser exploser sa joie et sa fierté. Cinq décennies de guerres réelles, économiques et diplomatiques menées par un régime militaire algérien obsédé par l’idée de séparer le Maroc en deux, de le couper de ses racines africaines, de l’encercler par des lignes de front antagonistes. Alger y a consacré tous ses moyens, mobilisé toutes ses ressources financières et diplomatiques. Cette guerre larvée contre le Maroc a été érigée en priorité vitale, au prix du bien-être de sa propre population, condamnée à subir les frustrations économiques les plus aiguës, et au prix de sa jeunesse, sommée de choisir entre l’exil forcé et une vie de misère sans nom.
En treize ans de combat diplomatique, le Maroc a plié le match. Son plan d’autonomie sous souveraineté marocaine a réussi à convaincre et à séduire, jusqu’à obtenir cette unanimité internationale qui consacre aujourd’hui sa souveraineté sur le Sahara. Depuis 2007, la dynamique marocaine n’a cessé d’être ascendante, faisant tomber un à un les bastions hostiles, notamment ceux dont les perceptions avaient été façonnées à coups de pétrodollars algériens. La pente était raide, le combat rude, mais le Maroc a fini par triompher de manière magistrale. Il vient d’inscrire dans le marbre de la légalité internationale la marocanité de ses provinces du Sud.
«Cette accélération onusienne sur le dossier du Sahara ne manquera pas de produire des effets majeurs sur la scène africaine. Qu’adviendra-t-il des États du continent qui persistent à reconnaître la fantomatique «république sahraouie»?»
— Mustapha Tossa
Aujourd’hui, maintenant que l’aventure séparatiste est, de facto, définitivement enterrée, les regards se tournent vers l’avenir. La main tendue du Roi Mohammed VI au président algérien Abdelmadjid Tebboune est au cœur de toutes les attentions et de toutes les interrogations. Ce dernier va-t-il la saisir pour inaugurer une nouvelle ère régionale, adaptée à la nouvelle donne onusienne, et relancer les rêves unitaires du Grand Maghreb, longtemps reportés à cause de ce différend? Ou choisira-t-il de faire la sourde oreille, de continuer à ignorer ces évolutions et de se maintenir dans un monde parallèle, déconnecté de toute réalité?
Il est fort à parier que le débat, au sein du sérail algérien, est d’une rare intensité entre, d’un côté, ceux qui veulent en finir avec cette crise régionale et jeter les bases d’une normalisation des relations de leur pays avec son environnement immédiat, à commencer par une réconciliation avec le voisin marocain, et, de l’autre, ceux qui entendent continuer, cyniquement, à mettre des bâtons dans les roues de cette dynamique pour l’empêcher de porter ses fruits. Il est de notoriété publique que l’affaire du Sahara est devenue, pour certains, une véritable vache à lait, un prétexte pour continuer à détourner budgets et prébendes.
Lorsque le plan d’autonomie marocain entrera dans sa phase d’application, il sera demandé aux autorités algériennes de prendre une série de décisions lourdes de conséquences, au premier rang desquelles le désarmement des milices du Polisario, dont la moindre action armée contre le Maroc sera désormais automatiquement assimilée à un acte terroriste. Il leur reviendra également, en leur qualité de puissance de fait responsable des camps de réfugiés de Tindouf, de coopérer avec les Nations Unies et le Maroc à un recensement transparent de ces populations, afin d’identifier minutieusement celles et ceux qui ont réellement droit au retour au Maroc.
Cette accélération onusienne sur le dossier du Sahara ne manquera pas de produire des effets majeurs sur la scène africaine. Qu’adviendra-t-il des États du continent qui persistent à reconnaître la fantomatique «république sahraouie»? Sans aller bien loin, la Mauritanie voisine, qui continue de valider le Polisario sous pression algérienne, devra d’urgence revoir sa posture et, tôt ou tard, acter le retrait de cette reconnaissance. La Tunisie, elle aussi voisine, a pour sa part hypothéqué une partie de ses relations avec le Maroc sur ce dossier: son président, Kaïs Saïed, devra lui aussi réviser ses calculs.
La même problématique se pose avec acuité pour une organisation continentale comme l’Union africaine, qui accueille dans ses rangs une entité sahraouie inexistante ailleurs que dans la propagande algérienne. L’Union africaine devra inévitablement aligner ses positions sur les évolutions et les perspectives tracées par les Nations Unies, et procéder à l’expulsion du Polisario de ses instances. Il est aisé d’imaginer que ce mouvement pourrait intervenir rapidement, tant le Polisario a empoisonné les relations de l’Union africaine avec d’autres grands ensembles politiques et économiques, comme le Japon, la Chine, la Russie, l’Union européenne ou encore la Ligue arabe.





