Les États-Unis confirment leur stratégie économique au Sahara marocain

Nasser Bourita et Massad Boulos, vendredi 26 septembre 2025 à New York.

Nasser Bourita et Massad Boulos, vendredi 26 septembre 2025 à New York.

«Nous soutenons et encourageons sans réserve les investissements américains au Maroc, y compris au Sahara», a affirmé Massad Boulos, conseiller spécial du président Donald Trump pour l’Afrique, lors d’un briefing au Foreign Press Center de New York. Cette annonce réaffirme la reconnaissance américaine de la souveraineté du Maroc sur le Sahara et toute une stratégie économique en vue.

Le 27/09/2025 à 08h00

L’annonce faite à New York par Massad Boulos, conseiller spécial du président américain Donald Trump pour l’Afrique, éclaire d’un jour nouveau la stratégie de Washington au Maghreb et, plus particulièrement, au Sahara marocain. Tout en annonçant d’importants contrats avec l’Algérie dans l’énergie et l’agriculture, les États-Unis renforcent leur soutien aux investissements au Maroc, y compris et surtout dans ses provinces sahariennes.

Lors d’un briefing vendredi au Foreign Press Center, de New York, au siège de la mission permanente des États-Unis auprès de l’ONU, en marge de la 80ème session de l’Assemblée générale, le responsable américain a persisté et signé: «Nous soutenons et encourageons donc sans réserve les investissements américains au Maroc, dans tout le pays, y compris au Sahara. Nous apportons aussi notre soutien total au financement de ces projets, à commencer par la DFC, mais aussi d’autres institutions, comme l’EXIM Bank américaine».

Massad Boulos a, en cela, rappelé les propos du secrétaire d’État américain adjoint, Christopher Landau, qui a annoncé le soutien officiel de Washington aux entreprises américaines qui souhaitent investir et faire des affaires dans l’ensemble du Maroc, y compris au Sahara. Mercredi sur le réseau social X, Christopher Landau a en effet déclaré que «Les États-Unis ont reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara, et dans le cadre des initiatives mondiales de l’administration Trump visant à promouvoir la diplomatie économique et commerciale, nous sommes heureux d’annoncer que nous allons encourager les entreprises américaines qui souhaitent investir dans cette région du Maroc».

Cette déclaration a été faite à l’issue d’une entrevue, mercredi à New York, avec le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita.

Dans son briefing, Massad Boulos a rappelé que la politique africaine de Washington «ne se limite pas au pétrole, au gaz ou aux minéraux», mettant en avant les projets d’infrastructures, d’électrification et de transport soutenus par les États-Unis sur le continent. Mais au-delà de cette vitrine africaine, c’est bien le Sahara marocain qui occupe une place centrale dans le discours américain.

Reconnaissance politique et offensive économique

Cette dynamique économique s’inscrit dans la continuité de la reconnaissance américaine de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, décidée par l’administration Trump en 2020 et réaffirmée depuis. Donald Trump, dans un message adressé au roi Mohammed VI à l’occasion de la Fête du Trône, a réitéré que «la seule base réaliste» pour un règlement durable du différend restait le plan marocain d’autonomie. Son secrétaire d’État, Marco Rubio, a confirmé cette ligne en avril dernier après un entretien avec Nasser Bourita.

Pas plus tard qu’hier encore, vendredi, le même Massad Boulos revenait à la charge. Dans un message publié vendredi sur la plateforme X suite à une entrevue à New York avec Nasser Bourita, le conseiller spécial pour l’Afrique du président des États-Unis a indiqué avoir abordé lors de cette rencontre les efforts visant à accélérer le processus politique en vue d’aboutir à une solution définitive au conflit artificiel autour du Sahara marocain. Et de réitérer le soutien de Washington à la souveraineté du Maroc sur son Sahara et au Plan marocain d’autonomie comme «la seule base pour une solution juste et durable» à ce différend régional.

Massad Boulos a aussi précisé que les discussions ont porté sur les moyens de renforcer le partenariat stratégique et l’alliance entre Rabat et Washington, au moment où les entreprises américaines «sont en quête d’opportunités d’investissement à travers tout le Maroc, y compris au Sahara».

En face, les États-Unis cherchent également à développer un partenariat économique avec Alger, notamment dans le secteur énergétique. L’Algérie est la deuxième réserve de gaz naturel en Afrique et producteur majeur de pétrole. Le même vendredi, Boulos rencontrait à cet égard le ministre algérien Ahmed Attaf.

Les entreprises américaines, à travers ExxonMobil et Chevron, y explorent des opportunités dans la fracturation hydraulique, tandis que de grands projets agricoles sont mis en œuvre. Pour Washington, l’équation est claire: soutenir fermement le Maroc sur le Sahara tout en préservant une coopération pragmatique avec l’Algérie dans les domaines énergétique et sécuritaire.

À travers ce jeu complexe, une constante demeure: entre Rabat et Alger, Washington a toujours privilégié le Maroc comme partenaire stratégique. Les initiatives actuelles de Massad Boulos en offrent une démonstration éclatante. Cette posture américaine intervient à la veille d’une échéance cruciale: le vote, en octobre, d’une nouvelle résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara. Contrairement aux précédentes, celle-ci pourrait se distinguer par un appui exclusif au plan d’autonomie sous souveraineté marocaine et une révision éventuelle du mandat de la MINURSO. En recevant récemment Staffan de Mistura, envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU, Massad Boulos a réaffirmé la position claire des États-Unis: «Une autonomie authentique sous souveraineté marocaine constitue la seule solution réalisable pour le Sahara occidental».

Pour Washington, l’approche n’est pas conjoncturelle. Elle s’inscrit dans une stratégie globale où le Sahara devient un levier de diplomatie économique, mais aussi un point d’ancrage pour la stabilité régionale. Les États-Unis misent sur une «double voie»: l’investissement dans les provinces du Sud marocain pour accompagner leur développement et l’utilisation de la diplomatie discrète pour convaincre Alger de s’adapter à la nouvelle réalité internationale.

Washington ne se contente pas d’un soutien symbolique: il pousse activement Alger à infléchir sa position. Selon le média américain Al Hurra, affilié au Département d’Etat, Massad Boulos aurait, lors d’une visite discrète à Alger, encouragé les autorités algériennes à accepter le plan marocain ou, à tout le moins, à influencer le Polisario vers plus de flexibilité. Cette diplomatie parallèle illustre la volonté américaine de sortir le dossier saharien de l’impasse, tout en sécurisant ses propres intérêts régionaux.

Par Tarik Qattab
Le 27/09/2025 à 08h00