Dans un article publié le 15 juillet sur le site Le Desk, sous le titre «Omar Radi, espion du MI6: révélations sur une cabale insensée», le directeur de cette publication, Ali Amar, s’est référé avec ironie à un article de Le360 qui révélait, sans le nommer, l’identité d’un agent du MI6 qui a été en liaison avec le journaliste et activiste Omar Radi, soupçonné d’espionnage pour le compte d’une puissance étrangère. Il convient de rappeler que Omar Radi est présumé innocent, qu’il ne fait pas l’objet d’une poursuite judiciaire, et qu’il est entendu régulièrement par la BNPJ dans une enquête relative à la perception de financements en relation avec des services de renseignements étrangers.
Ali Amar explique dans cet article que l’officier britannique Clive DareNewell (c’est le nom de l’agent du MI6), qui occupe actuellement le poste de directeur de la zone MENA au sein de la société «G3 Good Gouvernance Group», a toujours affiché ouvertement son identité d’espion. Il écrit: «son CV affiché autant sur le site internet de G3 que sur son profil LinkedIn montre qu’il a travaillé durant 35 ans pour le UK Foreign Service, comprendre le fameux SIS, le Secret Intelligence Service, ou le service de renseignements extérieurs du Royaume-Uni, également connu sous la dénomination de MI6».
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Autrement dit, si l’on se fie au raisonnement du patron du Desk, les autorités marocaines n’auraient fait qu’enfoncer…une porte ouverte en accusant Omar Radi d’espionnage au profit d’un agent de renseignement britannique.
Clive DareNewell fait effectivement référence sur son profil LinkedIn et sur le site de «G3 Good Gouvernance Group» à ses 35 ans d’expérience au sein des Affaires étrangères britanniques (UK Foreign Service). Mais est-ce une raison pour établir une équivalence entre ce département et le MI6?
Le MI6 a un site internet (https://www.sis.gov.uk) qui présente ce service de renseignement, ainsi que ses activités. Dans cette présentation, le MI6 affirme travailler sous l’autorité de «ministres seniors». Un site gouvernemental du Royaume-Uni définit ce que le MI6 appelle «ministres seniors». Dans la liste de ces hauts ministres qui ont autorité sur le MI6, on ne retrouve aucun lien de subordination avec le foreign office. La déduction du Desk est donc farfelue.
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Plus loin, oubliant peut-être que Omar Radi travaille chez lui, Ali Amar fanfaronne que «Le Desk a eu accès à la documentation sur laquelle se fonde l’enquête du parquet». Deux documents relatifs à la relation de Omar Radi avec Clive DareNewell sont reproduits dans Le Desk. Le premier est un extrait de l’agrément qui lie les deux parties. Le deuxième est un e-mail, surprenant, que Ali Amar ne cite pas dans son article, dont il ne mentionne aucun extrait, et qui dément pourtant la banalité de la relation qu’il s’évertue à prouver entre Omar Radi et Clive DareNewell.
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Dans ce courriel, Clive DareNewell écrit à Omar Radi qu’il ne «l’a pas sollicité pour recueillir des informations open source (source ouverte), en précisant qu’il est parfaitement en mesure d’accomplir seul cette tâche». L’expéditeur précise davantage son propos en le soulignant pour en montrer le caractère focal: «je veux savoir dans quelle mesure vous pouvez collecter des informations auprès de sources humaines». Quand c’est un officier, qui a fait toute sa carrière dans le renseignement, qui formule une requête de cette façon, cela s’apparente fortement à un travail de renseignement.
Conférence de presse de Omar Radi le 15 juillet 2020.
Dans la conférence de presse qu’il a organisée, le 15 juillet, au siège du syndicat de la presse nationale, Omar Radi a fait un lapsus qu’il a tenté de rattraper. Il a dit qu’il était utilisé à la fois par Amnesty International (AI) et par les autorités marocaines dans le bras de fer qui les oppose, avant de se rétracter et de laver AI de toute instrumentalisation. Dans cette même conférence de presse, Omar Radi affirme qu’il a collaboré avec «l’officier» (c’est ainsi qu’il l’a désigné) Clive DareNewell, mais que ce dernier ne travaille plus pour MI6 depuis 2011, date à laquelle il a pris sa retraite.
«Depuis quand un officier des renseignements est mis à la retraite?», s’interroge une source bien informée sur les rouages de ce métier. «Un officier de renseignement peut prendre sa retraite sur le papier, mais plus il a acquis d’expérience et maîtrisé de dossiers, plus il sera sollicité chaque fois qu’une question converge avec un domaine où il a acquis de l’expertise», précise notre source. Et de conclure: «un agent de renseignement ne se déconnecte jamais de sa maison, y compris après sa retraite».
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Ali Amar évoque dans un «disclaimer» (déni de responsabilité) à la fin de son article, la collaboration entre Omar Radi et un autre cabinet de consulting, à savoir «K2 Intelligence», dans le cadre d’une «recherche à propos d’une filiale agro-industrielle du groupe Palmeraie». En déniant toute responsabilité sur la collusion entre Omar Radi et «K2 Intelligence», Ali Amar attire paradoxalement l’attention sur ce cabinet de consulting.
Dans un article publié par le mensuel français Le Monde Diplomatique du 15 juillet 2014, le journaliste Nizar Manek a pu recueillir de précieuses informations auprès de Mungo Soggot, présenté comme un ancien journaliste et ex-employé au sein de la firme «K2 Intelligence», en affirmant que le management de cette société ordonne à ses employés d’utiliser leur statut de journaliste ou de prétendre en être un, pour obtenir des renseignements ou gagner la confiance d’une source.
Autre fait à retenir dans cet article: «tous les collaborateurs sollicités par K2 Intelligence, optent pour des modes de paiement rapides, notamment, via les agences de transfert d’argent, telles que “Western Union“ ou “Moneygram“, au lieu de virements bancaires». Une manière d’éviter de laisser une trace de paiement entre la société et les personnes auxquelles elle recourt. Que sait le patron du Desk sur les liens de cette société avec Omar Radi pour ne pas vouloir engager sa responsabilité?
Dans ce même «disclaimer», Ali Amar cite Bertha Foundation en ces termes: «quant aux fonds reçus partiellement de la part de Bertha Foundation, il s’agit d’une bourse de recherche sur la spoliation des terres paysannes au Maroc dont le rendu académique destiné à cette fondation, devait faire aussi l’objet d’articles à paraître dans les colonnes du Desk».
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Dans un deuxième article, publié le 17 juillet, le Desk cite abondamment la Bertha Foundation, dont 29 lauréats ont écrit une lettre de soutien à Omar Radi. Ces journalistes ont tous bénéficié d’une bourse de cette fondation, au même titre que la personne à qui elles marquent leur solidarité: Omar Radi. Montant de cette bourse: entre 60.000 et 70.000 euros.
Le Sud-africain Tony Tabatznik, qui a fondé Bertha Foundation en 2009, a fait de l’activisme le mode opératoire préféré de son action. D’ailleurs, cette fondation forme les séparatistes sahraouis aux actions de guérilla, en utilisant l’image comme moyen le plus efficace pour porter leur message. C’est ainsi que Bertha Foundation finance «Witness and FiSahara», une plateforme qui entraine des Sahraouis à manifester et provoquer les forces de l’ordre, en vue de réaliser des vidéos avec smartphones. Ces images de la provocation des forces de l’ordre sont exploitées, via de tendancieux montages, pour être transformées en «répression des femmes et enfants sahraouis par les autorités marocaines» et diffusées sur Internet.
Omar Radi interviewé en février 2020 sur Démocraty Now par Amy Goodman.
En février 2020, Omar Radi a accordé depuis Londres une interview filmée à l’émission Democracy Now, qui diffuse ses contenus depuis son siège à New York. Omar Radi a été interviewé par la fondatrice et journaliste vedette de cette émission, Amy Goodman, bien connue par ses positions hostiles à l’intégrité territoriale. Elle a réalisé en 2018 un documentaire sur le Sahara occidental au titre sans équivoque: «La dernière colonie».
Durant cette interview avec Amy Goodman, Omar Radi a entendu neuf fois l’expression «le Maroc occupe le Sahara occidental» et une fois l’expression «le Sahara occidental est la dernière colonie en Afrique» sans réagir, donnant ainsi le sentiment qu’il adhérait sans réserves aux propos de son interviewer.Toutes les images du Sahara marocain qui ont été diffusées durant l’interview de Omar Radi avec Amy Goodman proviennent de «Witness and FiSahara»… également partenaire de Bertha Foundation.
Sur la page d’accueil du site de Bertha Foundation, le film institutionnel qui présente cette fondation, ainsi que ses activités, mentionne DemocratyNow comme un partenaire de choix. Le logo de Democraty Now apparait plein écran (4:08 mn) de même que le portrait de la journaliste Amy Goodman (4:11 mn).
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Omar Radi, boursier de la Bertha Foundation, était donc interviewé par Amy Goodman, bien connue pour son hostilité à l’intégrité territoriale et partenaire de Bertha Foundation, pendant une émission où ont été diffusées des images de «Witness and FiSahara», une plateforme des séparatistes sahraouis, également financée par Bertha Foundation.
Il est permis de penser qu’il s’agit d’une coïncidence. Merci Ali Amar.