Les déclarations de Tebboune sur Gaza soulèvent une vague de réprobations en Égypte

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune au palais présidentiel d'Alger, le 10 octobre 2022. AFP or licensors

En appelant faussement, dimanche dernier lors d’un discours électoral, les autorités égyptiennes à ouvrir leurs frontières avec Gaza devant l’armée algérienne, le président Abdelmadjid Tebboune a créé la première crise de son second mandat avant même qu’il ne l’entame. Officiellement, Le Caire n’a pas encore réagi à ces propos, mais sur la toile et les chaînes privées de télévision, c’est une bronca générale qui a descendu en flammes ces nouvelles «tebbounneries» et leur auteur.

Le 20/08/2024 à 14h02

À l’occasion de son premier meeting électoral, organisé dimanche dernier dans une salle à Constantine, le candidat à sa propre succession, Abdelmadjid Tebboune, a accusé l’Égypte de fermer ses frontières avec Gaza devant l’armée algérienne, insinuant par la même occasion que le président égyptien Abdelfattah Al-Sissi et sa puissante armée ne font rien pour protéger les Gazaouis. C’est en tout cas en ce sens que Tebboune a été pris au mot par les internautes égyptiens qui ont réagi en masse à ses accusations gratuites contre leur pays.

Ils ont ainsi fustigé des déclarations, qualifiées de «dangereuses», «irréfléchies», «irresponsables», voire «embarrassantes» aussi bien pour l’Égypte que pour l’Algérie, même si ces internautes reconnaissent qu’il ne s’agit là que de propos à «connotations électoralistes», et donc peu «tangibles». En gros, c’est sur le ton de la dérision et du sarcasme que les Égyptiens ont choisi de clouer Tebboune au pilori.

Sur la page Facebook d’un média algérien, Tebboune a été interpellé par un commentateur égyptien en ces termes: «Le passage de Rafah (entre Gaza et l’Égypte, NDLR) est ouvert tout le temps. Viens, libère-le par l’action, pas par des mots et des slogans bruyants.» Un post sur la plateforme X décoche à son tour une fléchette à Tebboune: «S’il vous plaît, montrez-nous votre courage, frère Tebboune. Vous faites tout pour gagner les élections dans votre pays. Libre à vous, mais ne mentionnez pas l’Égypte».

Dans un autre tweet, Tebboune est accusé de défoncer des portes ouvertes: «Le président algérien Abdelmadjid Tebboune est venu nous critiquer et a déclaré que l’Égypte avait empêché l’Algérie d’intervenir militairement à Gaza et que l’armée algérienne était prête à intervenir immédiatement si la frontière était ouverte entre l’Égypte et Gaza. Or cette frontière est ouverte et il est le bienvenu.»

Plus incisif, est ce post où on peut lire: «Dans son discours électoral, Tebboune a dit que l’armée algérienne est prête. Nous voulons juste que l’Égypte nous ouvre les frontières… À première vue, nous pensions que son armée allait brûler Tel-Aviv, mais à la fin, il a dit qu’elle construirait 3 hôpitaux à Gaza! Ne vaut-il pas mieux les construire pour les Algériens? Le nombre d’hôpitaux à Gaza est de 36, soit plus que les hôpitaux de votre capitale

Il est également reproché à Tebboune son électoralisme inutile, car il est déjà assuré de gagner la présidentielle du 7 septembre prochain: «Mon oncle Tebboune exploite la question palestinienne dans sa campagne électorale pour des élections déjà truquées en sa faveur», assène un autre. Tebboune, dont la culture générale laisse à désirer, s’est fait rappeler par les internautes égyptiens la réponse de leur ancien président feu Hosni Moubarak, qui a défié son homologue yéménite, Ali Abdallah Saleh (mort assassiné) qui a tenu des propos similaires à ceux de Tebboune, en le sommant de venir immédiatement libérer la Palestine à partir de la frontière égyptienne.

Ainsi Tebboune est vu en général comme un pitre, voire un fou, qui se rêve en «héros national», alors qu’il n’arrive même pas à résoudre les plus petits problèmes internes de l’Algérie. Sa folie des grandeurs l’amène à faire croire aux Algériens que leur pays est une «superpuissance» régionale. C’est ce qui explique qu’il ne cesse de faire des promesses ridicules et viser des objectifs irréalisables dont il n’a pas les moyens.

Face à cette bronca égyptienne, des voix commencent à s’élever en Algérie pour dire que les propos de Tebboune ont été mal interprétés. La défense des médias algériens est laborieuse et très peu convaincante. La vidéo de Tebboune est sans appel et en la visionnant, on se rend compte qu’au moment où il change son fusil d’épaule pour parler d’hôpitaux, il avait regardé vers la droite la salle et que probablement l’un de ses conseillers l’a exhorté à lire la feuille sur son pupitre. Le président algérien a jeté ensuite un œil sur son discours écrit avant d’ajouter que son armée est prête… pour construire trois hôpitaux de campagne en 20 jours.

Le hic, c’est depuis quand une armée d’un pays tiers s’invite dans une zone de guerre pour y dresser des bâtiments civils? En tout état de cause, les influenceurs et journalistes en Égypte ne sont pas dupes et cette énième «tebbounnerie» ne prête pas seulement à rire: elle risque de faire pleurer les vieillards séniles à la tête du régime d’Alger.

Par Mohammed Ould Boah
Le 20/08/2024 à 14h02