L’armement au cœur des confessions de Tebboune devant Vladimir Poutine

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune et le président russe Vladimir Poutine.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune et le président russe Vladimir Poutine.

Après trois jours d’attente à Moscou, le président algérien a été reçu jeudi par le président russe Vladimir Poutine. Devant ce dernier, il s’est lancé dans une véritable diatribe contre les pays occidentaux, les Etats-Unis et les Etats de l’Union européenne en tête, accusés de régenter le monde avec leurs monnaies (dollar et euro) et de soumettre l’Algérie à de «fortes et vaines pressions», en vue de rompre ses relations militaires avec la Russie. Abdelmadjid Tebboune a quémandé plus d’armes russes en vue de protéger une Algérie visiblement très menacée.

Le 16/06/2023 à 09h39

Quand Abdelmadjid Tebboune parle publiquement, la catastrophe est assurée. Jeudi, lors de l’accueil que lui a réservé Vladimir Poutine au Kremlin, le président algérien n’a pas dérogé à cette règle, surtout qu’il est apparu dans un état anormal, qui doit faire honte à tous les Algériens. Alors qu’il aurait dû venir à Moscou avec un discours bien ficelé et respectueux de son principal allié, Tebboune s’est laissé aller devant Vladimir Poutine à ce qui ressemble fortement à des confessions. Il a succombé à des complaintes contre les pays occidentaux en faisant étalage de son ignorance du b.a.-ba de la politique, de la diplomatie et de l’Histoire.

Tout d’abord, sur le plan de la forme, l’accueil de Tebboune dans les travées du «luxueux» Kremlin, ancien palais des tsars russes, a été fade. Il n’a pas eu droit, comme de coutume, à des discussions en tête-à-tête dans la salle tout en jaune-or réservée aux hôtes de marque de la Russie, et où Poutine a accueilli à deux reprises, en 2002 et en 2015, le roi Mohammed VI, et en 2017 le roi d’Arabie saoudite Salmane Ibn Abdelaziz, pour ne parler que de chefs d’Etat arabes. Même Abdelaziz Bouteflika, prédécesseur a eu droit au même tête-à-tête dans ladite salle, lors de sa visite à Moscou en 2008, et à une chaleureuse accolade de la part de Vladimir Poutine, digne des embrassades de Nikita Khrouchtchev et Leonid Brejnev, anciens présidents de l’ex-Union soviétique.

Le «discours» prononcé par Tebboune devant Valdimir Poutine, est, quant à lui, tout simplement une farce de mauvais goût. Il a ainsi commis un impair contre l’armée algérienne en affirmant que c’est la Russie qui a toujours été le défenseur de l’indépendance de l’Algérie, à travers l’armement qu’elle a régulièrement fourni à l’Algérie.

Selon lui, c’est donc la Russie qui protège l’indépendance de l’Algérie et non pas l’ANP, n’en déplaise à Said Chengriha, patron de l’armée algérienne, et autres généraux qui tirent dans l’ombre les ficelles du pouvoir en Algérie.

Ce dérapage verbal risque de coûter très cher à l’actuel président algérien, et ce, dès son retour au pays. Il est en effet très probable que les généraux, qui ont besoin d’une façade civile plus présentable, s’accordent sur la nécessité de le congédier dare-dare et lui trouver au plus vite un successeur.

Dans ses confessions à Poutine, Tebboune a dit ouvertement ce qui aurait dû être déclaré en off devant le président russe. «Nous subissons des pressions internationales, mais elles n’auront aucun effet sur l’amitié qui nous unit. Nous comptons sur la Russie fédérale pour nous armer et pour défendre notre indépendance, surtout dans un contexte régional difficile, voire très difficile», a-t-il lâché.

Le budget de l’armement de l’Algérie a été élevé à 23 milliards de dollars, soit une hausse de 120% par rapport à l’année dernière. Il est clair que Tebboune veut contribuer à renflouer les caisses de la Fédération de Russie, en l’aidant dans son effort de guerre contre l’Ukraine par des achats massifs d’armes. Un gros contrat est déjà signé entre les deux pays. Il porterait sur des acquisitions d’armes d’un montant de 11 milliards de dollars. Ce contrat a été confirmé jeudi 15 juin par le ministre russe de la Défense, le général Serguei Choïgou, qui a déclaré aux journalistes que ce contrat porte sur «des chars et des systèmes de défense aérienne ainsi que des avions», tout en démentant les rumeurs selon lesquelles la non-livraison de ces armes à l’Algérie a été affectée par un déficit de production dû à la guerre en Ukraine.

La volonté d’achat d’armes russes, formulée par Tebboune, risque-t-elle de remettre sur les rails le projet de sanctions américaines contre l’Algérie prôné par des dizaines de congressistes, démocrates et républicains, qui n’auront plus de difficulté à convaincre en ce sens le Département d’Etat américain?

Pour s’éloigner davantage de l’Occident, le président algérien a déclaré son attachement à la Russie. «Nous avons des relations historiques, et elles ne peuvent pas changer, même si la situation dans le monde change. Nos relations sont les mêmes depuis plus de 60 ans et l’Algérie y reste grandement fidèle», a-t-il dit.

Les attaques de Tebboune contre les adversaires de la Russie visent aussi à quémander auprès de Vladimir Poutine une entrée, non encore méritée, de l’Algérie aux BRICS. «Nous voulons accélérer notre adhésion aux BRICS afin d’entrer dans un système autre que celui du dollar ou de l’euro. Cela aura des effets positifs pour notre économie», a plaidé le président algérien.

A Moscou, Tebboune a aussi fait étalage de son manque flagrant de culture générale, en commettant une nouvelle bourde.

Il a ainsi rappelé que Nicolas II, le dernier tsar russe tué en 1918 par les révolutionnaires bolcheviks, est celui qui avait décoré l’émir Abdelkader suite à la libération par ce dernier de chrétiens russes détenus à Damas. Or la décoration en question a été décernée par le tsar Alexandre II en 1860, bien avant la naissance de Nicolas II, qui a vu le jour en 1868.

Par Mohammed Ould Boah
Le 16/06/2023 à 09h39