Cette révélation est faite par le journaliste du Point, Marc Leplongeon, celui du Parisien Jean-Michel Décugis et la romancière Pauline Guéna dans leur livre Ministère de l'injustice (Grasset), à paraître le 16 mars, souligne le magazine français Le Point dans sa nouvelle édition hebdomadaire.
Selon Le Point, «cette information pourrait bien apporter un nouvel éclairage à ce cold case vieux de trente ans, rouvert par la Cour de révision depuis décembre».
«Cet élément nouveau donne force et vie à ma requête en révision et aux éléments que j'ai apportés à la commission d'instruction», répond au Point Sylvie Noachovitch, avocate du «jardinier marocain», qui dénonce «la plus grande erreur judiciaire du XXe siècle».
«On est vraiment sur une piste très sérieuse qui conforte les rapports scientifiques, et vice-versa.», relève-t-elle dans cet entretien.
Selon les auteurs, des gendarmes du sud de la France ont mené deux ans durant des investigations parallèles, après avoir reçu le témoignage d'une informatrice affirmant que le meurtre de Ghislaine Marchal, en juin 1991, à Mougins, pourrait être le fait non d'Omar Raddad (qui a toujours clamé son innocence), mais d'une bande de voyous d'origine slave, précise l'hebdomadaire.
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Problème: cette enquête, menée dans la plus grande discrétion, a été autorisée par le parquet de Grasse en septembre 2002, alors même que la Cour de cassation était déjà saisie d'une demande en révision du procès (finalement rejetée par les hauts magistrats en décembre 2002). Jamais, cependant, la Cour de cassation n'a été mise au courant du fait qu'une autre piste était, à la même période, suivie par des gendarmes… Pendant des semaines, de nombreux témoins ont été interrogés, les incohérences de l'enquête initiale pointées du doigt, jusqu'à ce que l'enquêteur chargé du dossier, à l'hiver 2004, ne rédige un procès-verbal de synthèse remis au parquet de Grasse, réclamant de pousser les investigations. Mais le parquet ne donnera jamais suite, explique-t-on.
Me Sylvie Noachovitch a qualifié les informations relatives à l’enquête de «découverte», qui «conforte» sa thèse depuis le départ, et celle qu’elle a «soutenue devant la commission d'instruction de la Cour de révision, à savoir la thèse du crime crapuleux».
Pour l’avocate d'Omar Raddad, cette information, qui est «essentielle», va dans le sens de savoir à qui appartiennent ces ADN retrouvés et mélangés au sang de la victime.
«Les éléments qu'apportent ces journalistes d'investigation sont aujourd'hui des éléments nouveaux indiscutables, qui révèlent qu'on n'a pas été jusqu'au bout de cette enquête, qu'il n'y avait pas une volonté de trouver la vérité. Le fait que le parquet ne donne pas suite est particulièrement choquant, d'autant qu'Omar Raddad a toujours clamé son innocence et que son ADN n'apparaît pas!», affirme-t-elle.
«Je reste convaincue que la justice ne veut jamais reconnaître ses erreurs. Il y avait eu ce procès en révision en 2002, il y a eu ensuite cette découverte d'une autre piste par ces gendarmes qui demandent à aller plus loin, en 2004…», ajoute l’avocate.
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«Ce qui est sûr, c'est que l'on n'a pas voulu aller jusqu'au bout et que ce n'est pas normal quand on a affaire à quelqu'un qui clame son innocence depuis le début, qui est reconnu handicapé, qui a une vie suspendue à la révision de son procès… Omar Raddad [gracié en 1996, mais pas innocenté, Ndlr] ne passera jamais à autre chose tant qu'il ne sera pas blanchi. Et pour la mémoire de Mme Marchal, il faut que l'on sache la vérité», plaide Me Noachovitch.
«Je vais communiquer ces informations à la commission d'instruction de la Cour de révision qui, j'en suis certaine, sera forcément intéressée par cet élément nouveau et voudra pousser les investigations», dit-elle, insistant sur la nécessité d’«aller jusqu'au bout des pistes», car il y a encore des «zones d'ombre»: ses comptes en Suisse (il n'y a pas eu d'investigation là-bas!), son entourage juste avant sa mort, ses fréquentations au Temple solaire, la piste du cambriolage qui avait rapidement été abandonnée au vu des inscriptions «Omar m'a tuer». Des lettres, qui, d'après des experts en 2002, n'ont pas été écrites de la main de Ghislaine Marchal...
«Personne n'est allé au bout des enquêtes. Les gendarmes et les juges ont considéré que le prénom d'Omar sur les portes leur suffisait. C'est ridicule…», dénonce-t-elle.
«C'est aussi choquant qu'on ait autorisé l'incinération du corps (Ghislaine Marchal voulait pourtant être inhumée) alors qu'on n'avait même pas reçu les résultats de l'expertise médico-légale. L'enquête et l'instruction ont été bâclées. Aucune contre-autopsie n'a pu être pratiquée pour, notamment, et ce n'est pas rien, connaître la date exacte de la mort, qui a changé de la main même des experts – une “faute de frappe”, disent-ils…», renchérit-elle.
Elle insiste également sur la nécessité de comparer les ADN retrouvés sur la scène du crime avec les personnes qui ont pu être suspectées par les gendarmes dans les années 2000, et que fréquentait Ghislaine Marchal, si elles sont encore en vie.